Aucun des deux camps, serbe ou kosovar albanais, n'a formulé d'accusations explicites contre celui d'en face. Mais le ministre serbe des Affaires étrangères, Ivica Dacic, a évoqué un «grave coup porté à la stabilité de la région» des Balkans occidentaux. Le Premier ministre kosovar, Ramush Haradinaj, a lui convoqué «un Conseil de sécurité national pour examiner la situation sécuritaire du pays». Un mois avant le 10e anniversaire de la proclamation d'indépendance du Kosovo, que les Serbes ne reconnaissent toujours pas, cet assassinat est de nature à tendre encore la situation intercommunautaire dans cette ville toujours divisée entre quartiers serbes au nord (13 000 habitants) et albanais au sud (72 000), et en proie à une importante criminalité. Agé de 64 ans, Oliver Ivanovic a été la cible de tireurs se trouvant dans une voiture, alors qu'il arrivait au siège de son parti situé dans une maison de Mitrovica-nord, selon une source policière. Patron du parti social-démocrate local, l'Initiative civique, il est considéré comme un politique serbe modéré dans un univers politique resté radical, près de deux décennies après la guerre de 1998-99, entre forces de Belgrade et rébellion indépendantiste kosovare. Côté serbe, la vie politique est empreinte d'une violence endémique. Le président du Kosovo, Hashim Thaçi, a «fermement condamné» l'assassinat, tandis que son homologue serbe, sans explicitement désigner de suspects, a dénoncé «une attaque (…) d'abord contre les Serbes du Kosovo, mais aussi contre la Serbie dans son ensemble». Il a demandé à ce que son pays soit associé à l'enquête. Pristina a de toute façon beaucoup de mal à exercer son autorité dans cette partie serbe de la ville. Oliver Ivanovic était une figure politique locale singulière. Condamné à neuf ans de prison pour «crimes de guerre», il avait vu sa peine annulée par une cour d'appel en février. Libéré, il devait être rejugé. Conseiller municipal de l'opposition de Mitrovica-nord, il était un des rares membres de la scène politique serbe kosovare à parler l'albanais, et à critiquer publiquement la politique menée par Belgrade au Kosovo. S'il n'a pas reconnu l'indépendance du Kosovo, Oliver Ivanovic semblait plus enclin au dialogue avec Pristina. La guerre du Kosovo a fait 13 000 morts, dont 11 000 Kosovars albanais et quelque 2000 Serbes. Elle s'est achevée par une campagne de bombardements des Occidentaux. Le Kosovo a été placé sous protection internationale, avant que cette ancienne province albanaise de la Serbie ne proclame en février 2008 son indépendance. Avec le soutien de la Russie à l'Organisation des Nations unies (ONU), Belgrade et la minorité serbe du Kosovo refusent toujours de la reconnaître. L'Union européenne (UE), qui a appelé hier «au calme et à la retenue», tente actuellement de relancer le dialogue de normalisation des relations entre le Kosovo et la Serbie, au point mort depuis des mois. Première conséquence de l'assassinat : les représentants serbes ont annulé une réunion à Bruxelles avec leurs homologues kosovars albanais.