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Pr Tayeb Kennouche. Sociologue : «Le hirak doit commander aux étudiants d'instituer un rapport nouveau avec leur université»
Publié dans El Watan le 03 - 03 - 2021

Le professeur Tayeb Kennouche revient, dans cet entretien, sur le retour du hirak estudiantin une année après son interruption. Il estime qu'il ne faudrait pas trop s'intéresser aux dates d'anniversaire au risque de vider se mouvement de son intemporalité et de son essence.

Propos recueillis par Lyes M.


-Après une année d'interruption due à la crise sanitaire, le hirak estudiantin revient à la faveur du retour des manifestations revendiquant toujours le «démantèlement du système». Quel regard portez-vous sur ce 2e anniversaire ?
Le hirak vient juste de sortir de son confinement. S'il a conservé sa détermination et sa fougue, il est revenu avec moins d'allégresse sur le visage des hirakistes et moins de sourire sur leurs lèvres. Il n'est pas de retour. En tant que mouvement et en tant qu'idée, il ne s'est point absenté de «l'espace public» que représentent, désormais, les réseaux sociaux. Dans cet «espace», qui ne fut à aucun moment déserté par les hirakistes, le hirak a continué, vaille que vaille, son chemin. Et d'ailleurs, devait-il, nécessairement, s'arrêter, car il a cessé, par mesure sanitaire, de marcher ? Beaucoup devraient, de mon point de vue, apprendre que le hirak n'a pas pour singularité première d'être pédestre. Sa nature est d'être, au contraire, une démarche quotidienne de l'esprit.
En effet, de son caractère populaire, massif et physique, est sortie victorieuse une épistémè nouvelle qui a cette vertu de nous conduire à rompre d'avec la continuité paisible et confortable de notre propre pensée. Je peux, aisément, admettre que ce mot est, peut-être, trop fort pour le moment mais par des nuances, des discontinuités, des hésitations, des choix, des bifurcations le doute tend à remplacer la certitude qui, elle, finit, toujours, selon Nietzsche par mener à la «folie».
Le hirak est une autre façon de penser, la nation, l'Etat, la société, la citoyenneté, la mémoire, le pouvoir, la justice, le politique. En un mot, c'est une autre posture qui nous réconcilie enfin, avec la philosophie dans son acceptation la plus existentielle, dans une société où la pensée se trouve être en jachère à l'université. Dans son ouvrage les ‘'Mots et les choses'', Michel Foucault nous convie à «...entreprendre de savoir comment et jusqu'où il serait possible de penser autrement au lieu de légitimer ce qu'on sait déjà». Penser autrement notre destin de peuple et de société voilà ce à quoi nous invite le hirak.
C'est la raison pour laquelle, le hirak, à mon a avis, n'a nul besoin que l'on fasse son panégyrique en décidant de fêter officiellement son anniversaire, car j'estime, qu'il s'agit là d'une bonne manière pour l'empêcher de grandir à sa façon. Dans ce genre d'anniversaire, où il est rattaché à un temps passé, on cherche à l'aide d'une paille de lui aspirer toute son intemporalité, de le vider de son essence. Par cette sorte d'anniversaire où il est programmé dans un protocole politique, qui n'est pas le sien, il encourt le risque de se voir figer dans une désuète ritualisation, alors que chaque vendredi comme chaque mardi il est célébré naissant et en même temps en devenir.
-La question de la structuration de ce mouvement se pose toujours. A quoi est due, selon vous, l'incapacité du mouvement estudiantin à s'organiser autour d'une structure représentative ?
Si cette question a l'air de se poser toujours, je ne sais pas si elle doit continuer de l'être indéfiniment. Car d'une part, j'ignore qui la pose et pour quelle raison, elle semble être si persistante ou tellement récurrente, d'autre part. Je dois souligner qu'elle ne figure nullement parmi les différents slogans du hirak que nous avons fini par apprendre par cœur. En effet, le peuple du hirak ne fait pas de cette question sa préoccupation. Elle ne semble pas être, tout au moins pour le moment, ni sa priorité et encore moins un handicap qui l'aurait empêché de porter, haute et forte sa voix qui, clairement, revendique pour le peuple une souveraineté pleine et entière. Qu'apporterait de plus une prétendue structuration à ce mouvement qui semble avoir trouvé auprès du peuple son véritable représentant, son vrai leader ? Je pense que nous persistons à vouloir appliquer au hirak de vieux modèles de structuration qui, du reste, lui sont atypiques. Le hirak a besoin d'être appréhendé comme une nouvelle forme de revendication politique populaire et nationale qui échappe aux prismes à l'aide desquels sont , habituellement, décryptés les mouvements sociaux . Pour percer l'âme du hirak, l'observateur doit faire appel à d'autres catégories de pensée. Seules des catégories de pensées alternatives sont capables de «dire» ce mouvement social qui vient de se déconfiner.
C'est à juste titre que le mouvement estudiantin, qui est né du Hirak, reprenne, par conséquent, à son compte son sens et se charge de sa substance.
L'université comme la société représente un terrain social qui nous offre, à satiété, les exemples de formation politique ou syndicale dont les structures représentatives ne sont que l'émanation de l'instance idéologique de la superstructure régnante. Cette dernière, les entretient, généreusement, car à tout moment, elle les instrumentalise comme de simples relais ou comme des caisses de résonance pour assoir son hégémonie dans l'espace universitaire. Pour se libérer de cette toile d'araignée dans laquelle les organisations estudiantines ont piégé l'université, les étudiants s'engagent dans le hirak sans structure représentative.
La liberté ne tombe pas bénie du ciel. Elle n'est pas non plus la fille aimée d'une saison que les hirondelles se chargent de nous la ramener avec le printemps. Au contraire, elle se cultive, en tout temps, dans une situation particulière où nous condamne l'engagement qui n'a rien à voir avec l'endoctrinement, l'embrigadement où l'adhésion dans un quelconque parti politique ou encore dans une organisation de masse. L'intellectuel disait Paul Nizan, dans son essai pamphlétaire ‘' Les chiens de garde'', est «seul parce que personne ne l'a mandaté». Cet engagement résulte juste du fait que «nous sommes embarqués», continue-t-il par affirmer. A L'heure actuelle, une bonne partie du peuple se trouve être dans cette situation.
-Quel devrait être l'apport des enseignants à ce mouvement ?
Ce mouvement estudiantin a, sûrement, besoin de l'apport utile des enseignants qui avec les étudiants sont censés composer la communauté universitaire qui pour de nombreuses raisons, j'ai le profond sentiment, qu'elle attend toujours de naître et sa naissance n'est pas pour demain hélas. Mais je dois à la vérité de dire que le Hirak a constitué, tout à fait à ses débuts, le lieu de ralliement, le point de rendez vous où s'étaient convergés et reconnus les membres d'une même famille universitaire qu'une administration omniprésente mais surtout envahissante a fini par disperser. C'est à ce moment qu'étudiants et enseignants sont sortis de leur isolement pour enjamber les barrières d'une vieille pédagogie scolastique, qui pendant longtemps, les a inutilement séparés, pour croiser et nouer, dans le même élan, leurs différentes générations pour les mettre, enfin, au service d'une cause commune.
Le bonheur, que nous avons ressenti durant ce moment intergénérationnel inédit, fut de courte durée. Nous pensions, avec beaucoup de candeur, que notre université nous était revenue. Qu'enfin, elle était entre nos mains. Qu'ensemble, étudiants et enseignants, nous allions pouvoir avec responsabilité exercer, non seulement, notre citoyenneté mais d'en être aussi ses propres acteurs. Que nous allions pouvoir façonner, notre université, à la taille et aux couleurs de tous les rêves de savoirs, de cultures et d'arts que nous avions faits pour elle. Mais parce que impérissable, ce rêve ne saurait mourir. Assurément, il ne peut y avoir de projet d'université sans un projet de société. En effet, l'université ne se limite pas seulement à transmettre des savoirs et à les questionner aussi pour mieux les continuer dans les saines ruptures qu'elle rend nécessaires.
C'est une institution qui pour fonctionner a besoin, également, de disposer d'une réelle autonomie pour se protéger des différents pouvoirs qui risquent de l'enrôler pour la mettre au service de leurs intérêts ou de leur idéologie.
L'université n'est pas une entreprise. Elle trouve l'essence de son mode de fonctionnement dans les capacités qu'elle a de s'autogérer au moyen de structures internes qui lui garantissent transparence et démocratie. Mais encouragée par le manque de mobilisation des enseignants ou de leur non-implication dans ce hirak qui nous est venu de l'histoire, l'administration a vite fait de reprendre les rênes d'une université qu'elle entend garder vassalisée et soumise à tous ses ordres comme à tous ses désordres.
Ce serait la fin de l'université si toutes et chacune des dimensions de la vie universitaire devaient être «normées» par le prisme des rapports « employeurs »-« employés». C'est ainsi, que le rôle de l'université s'est réduit à une stricte formation de «diplômés». Cette institution fut, depuis longtemps, déroutée de sa principale mission, celle de former, essentiellement, des universitaires qui ont cette particularité d'être, non seulement, porteurs d'un savoir-faire mais surtout d'un savoir-être.
Voila pourquoi le hirak doit commander, aussi bien aux étudiants qu'aux enseignants d'instituer un rapport nouveau avec leur université dont l'état actuel rend impérieux la mise en forme d'une sociologie tout à fait différente de celles que nous avons menées, jusqu'alors, dans le confort d'une pensée bien disciplinée, d'une pensée bien trop sage. .
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