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Que peut-on encore sauver ?
Alger Historique À ville policée, habitants cultivés
Publié dans El Watan le 17 - 04 - 2005

Les six palais sont situés les uns à proximité des autres, en Basse Casbah. Ces palais : Dar Aziza, Dar Hassan, Dar Mustapha Pacha, Dar Es Souf, Dar Khedaoudj El Amia et Dar El Hamra. Ces noms auxquels on a tenté de substituer d'autres appellations n'ont jamais pu disparaître, la mémoire populaire les ayant précieusement conservés et préservés ; leur usage est de nos jours aussi courant que jadis.
Le palais Dar Aziza est un véritable chef-d'œuvre. Sa cour intérieure, ou patio, est d'une beauté saisissante, avec ses galeries, ses colonnes et leurs chapiteaux, ses balustrades en bois, le fer forgé des fenêtres, la pièce d'eau centrale, le marbre et la céramique. C'est à partir et autour de cette cour que tout le reste du palais s'ordonne et se développe. Situé près de la Jenina, ce palais servait de résidence aux hôtes de marque ; il devint propriété de la princesse Aziza qui était fille de dey et épouse de bey ; après 1830, il fut attribué à l'Evêché. Ce palais est aujourd'hui accessible au public et tout visiteur peut avec un peu d'imagination voir en son milieu : « Un patio andaluz con flores, fuentes, pajaros, huz y poesia. » Mais une fois à l'extérieur, le charme est brisé et tout se gâte ; sur les deux flancs du palais, plusieurs échoppes ont poussé comme des verrues. On ne sait qui a permis ce qu'il faut bien appeler des empiétements sur le domaine de l'Etat. Il y a ensuite ce toit en tôles ondulées et couvert de détritus, visible de la rue Ibn Badis. Il y a aussi ces vitres de fenêtres, cassées ou dépareillées, ces fils électriques, anarchiques et cette antenne de TV qui apparaît sur la terrasse ! Il y a enfin derrière le palais cette courette avec une fontaine sans robinet ni eau, remplie de cartons d'emballage jetés. Dar Khedaoudj El Amia est un musée national, et en tant que tel il est ouvert au public ; ce palais qui aurait été construit au XVe siècle a été racheté et refait au XVIIIe siècle par un membre du divan qui en fit ensuite don à sa fille Khedaoudj. On a toujours dit de celle-ci qu'elle devint aveugle - d'où son surnom - à force de se contempler dans ses miroirs. Cette légende a tout l'air d'être l'adaptation algéroise du mythe grec de Narcisse. Le palais de Khedaoudj est comme celui de Aziza un véritable joyau ; tout y est élégance, harmonie et richesse. Pour celui qui a visité ce palais et le précédent, qui fort heureusement sont restés presque intacts, il ne saurait y avoir de doute qu'Alger était une cité policée et non une bourgade chaotique peuplée de forbans incultes. Les quatre autres palais qu'il reste à évoquer sont actuellement fermés pour cause de travaux. Mais aucun de ces chantiers n'affiche de renseignement ni sur le bureau d'études chargé de la maîtrise d'œuvre, ni sur l'entreprise de travaux, ni sur les délais contractuels de réalisation. Le palais Hassen est contigu à la mosquée ; comme celle-ci ; il a été construit par le Dey Hassan (1791 - 1797). Après 1830, il devint, sous l'appellation de Palais d'hiver, la résidence des gouverneurs généraux d'Algérie. Dans les années 1950, il fut affecté à l'enseignement des études islamiques ; à l'indépendance, on y installa le ministère des Affaires religieuses puis le Conseil supérieur islamique. Ces changements de destination accompagnés d'occupation par des services administratifs ont bien évidemment laissé des traces tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de ce palais qui fut sans doute très beau. On espère qu'il sera, une fois remis à neuf, ouvert au public. Les palais Dar Mustapha Pacha et Dar Es Souf, qui se trouvent à quelques pas l'un de l'autre, ont été construits par le Dey Mustapha (1798-1805). Le premier était sa propriété personnelle : en tant que dey, il résidait au palais des deys de la Jenina, et ne se rendait à sa propre demeure qu'en fin de semaine, du jeudi au vendredi. Ce qui singularise ce palais, c'est sa céramique dont chaque carreau représente un vaisseau, différent des autres, formant ainsi une imposante armada ; cette décoration témoigne de l'engouement d'une certaine classe sociale pour la mer et la marine. Appel au voyage et à la rêverie, cette céramique est d'une certaine manière aussi un rappel du rôle important que la marine algérienne a joué en Méditerranée et de la place privilégiée qu'elle occupait au sein des forces armées. Il n'est donc pas surprenant que les navires de guerre de notre actuelle marine portent les noms de quelques célèbres « raïs » de l'époque. Pour toutes ces raisons, Dar Mustapha Pacha pourrait, une fois rénovée, devenir le musée de la marine. Dar Es Souf a été attribuée aux janissaires par le Dey Ahmed (1805-1808) dès son avènement. A leur tour, les généraux français en firent un hôtel militaire. Elle devint plus tard siège d'un tribunal pénal. Pendant la Bataille d'Alger (1956-1957), elle servit de « centre d'interrogatoires ». Celle-ci paraît tout indiquée pour l'installation d'un musée et d'un centre de documentation sur la Bataille d'Alger. Dar El Hamra, notre ultime étape, se trouve à quelques pas de la mosquée Ali Betshin et du Bastion 23 que d'aucuns, il faut le rappeler, ont failli raser, et qui a été sauvé et restauré en un temps record. Elle appartenait au Dey Hussein qui l'a construite en 1800, alors qu'il était membre du Divan en qualité de khodja El Kheil. Reliée au quartier de la marine par une longue galerie à voûtes, elle formait un imposant ensemble. Hussein qui en tant que dey résidait au palais de la forteresse s'y replia,vaincu et déchu, le 5 juillet 1830 pour la quitter définitivement le 11 juillet 1830 et partir en exil. Depuis cette date, Dar El Hamra a subi d'importantes modifications. L'inconscience et la négligence de ceux qui l'ont successivement occupée depuis 1962, l'ont réduite à un pitoyable taudis qu'accentue son sordide environnement. Le souhait que l'on fait, c'est que Dar El Hamra devienne le siège des deux sociétés d'histoire et d'archéologie dont on a parlé ci-dessus.
Symbole et hommage
On terminera, en formulant ces derniers souhaits. Le premier est que l'on maîtrise au plus tôt cette immense cohue faite de commerçants ambulants, de vendeurs à l'étalage ou à la sauvette qui, chaque jour, déferle des deux côtés de la voie publique. Tant que ce quartier sera abandonné à cette anarchie, rien de sérieux ni de durable ne se fera pour la réhabilitation de l'environnement des monuments énumérés. Le second souhait est que la place des Martyrs qui s'est convertie en un terrain dégradé, avec un kiosque à musique où l'on ne voit jamais de musiciens, soit enfin aménagée en un espace vert fait de bosquets, de haies et de parterres fleuris, comme la très ancienne Jenina, et que l'on y érige la grande statue équestre de l'Emir Abdelkader, qu'un choix douteux a isolée sur un rond-point encaissé de la rue Ben M'hidi. Alors la place des Martyrs retrouvera son ancrage historique, son âme et de la dignité. Placée au centre des trois cercles concentriques formés par le Maghreb arabe, l'Afrique septentrionale et la Méditerranée occidentale, située en plus dans l'axe de cet ensemble politico-économique que ses concepteurs ont baptisé Le Grand Moyen-Orient, la ville d'Alger doit, si l'on tient à ce qu'elle y joue quelque rôle, sortir de sa torpeur provinciale et se moderniser au pas de charge. C'est à ce prix qu'elle pourra avoir un avenir. Son passé, cependant, ne devrait pas être réduit à la portion congrue. A Alger, on peut lire, comme sur une coupe géologique, toutes les strates civilisationnelles et les séquences historiques successives qui sont à l'origine de l'apparition dans ce pays-ci d'un Etat et d'une nation.
Par Zineddine Sekfali (*)
(*) Ancien ministre


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