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L'avocat garant de la sécurité juridique (2e partie et fin)
Publié dans El Watan le 25 - 04 - 2005

Les pouvoirs publics ont la possibilité d'intervenir dans le processus décisionnel de l'Ordre, notamment pour revêtir le règlement intérieur par la forme d'un arrêté ministériel, d'intervenir comme partie pour demander ou défendre et pour constituer la Commission (paritaire) nationale de recours (article 60 de la loi 91-04). Cette indépendance est aussi le corollaire indispensable de l'indépendance du pouvoir judiciaire, et individuellement celle du juge, indépendance qui constitue un principe essentiel de l'Etat de droit selon le postulat de la séparation des pouvoirs élaboré par Montesquieu : « Il n'y a point (...) de liberté si la puissance de juger n'est pas séparée de la puissance législative et de l'exécutrice » (12). Comme pour l'avocat, l'indépendance n'est pas un privilège du juge ; elle ne lui est donnée que dans l'intérêt de la protection des droits des individus (13). L'indépendance de l'avocat et du juge est une responsabilité. Mais le juge n'est pas dépendant de l'Etat (14), il est lui-même l'Etat ; il est son organe le plus prestigieux. A l'Ordre des avocats correspond le Conseil supérieur de la magistrature (15), chargé de veiller à cette indépendance (16). Leur indépendance doit être garantie par l'Etat conformément à ses propres engagements nationaux et internationaux. La Déclaration universelle des droits de l'homme citée par notre Constitution prévoit (article 10) que toute personne a le droit d'être jugée par « un tribunal indépendant et impartial ». Cette exigence est aussi celle de l'article 14 du Pacte international des droits civils et politiques ratifié par l'Etat. Selon la Constitution, ce Pacte a, sans ambiguïté, une place supérieure à la loi dans l'ordre juridique interne. L'Etat doit assurer le respect de ses engagements internationaux en permettant d'éviter l'incohérence de l'ordre juridique interne avec l'ordre international. En cas de contradiction entre deux textes de niveaux distincts, le conflit se règle par le respect de l'ordre de préséance de la hiérarchie des normes en cause. Aujourd'hui, sur cette base et celle de l'actualité, des adaptations du statut de l'avocat sont nécessaires par la révision d'anciennes règles professionnelles. J'en propose sept à la réflexion :
1 Par exemple, aux Etats-Unis, un juriste salarié d'une société (in-house) est néanmoins avocat membre d'un barreau (17). Pourra-t-il plaider en Algérie ? L'article 6 de la loi 91-04 le permet. Les cours américaines fédérales de justice considèrent sans importance la question de savoir qui emploie le juriste. C'est la fonction et non le statut qui importe. Les statuts d'agent ou conseils en brevet d'invention (patent agents) et d'avocat sont cumulables aux USA et dans de nombreux autres pays (France, Danemark, Hollande, Japon etc.) ; la Cour suprême des USA a autorisé l'exercice de la profession d'agent de brevet en l'assimilant à l'activité de conseil juridique (18). De fait, de nombreuse entreprises d'avocats occidentales cumulent ces activités, et travaillent en Algérie même ou envisagent de le faire.
2 Pourquoi continuer d'interdire la publicité (article 78 de la loi 91-04) contrairement à ce qui se fait à l'étranger ? La libéralisation de la publicité est partout permise, sauf en Algérie ; elle fut initiée par l'article 161 du décret du 27 novembre 1991 en France. Sa mise en œuvre a été rendue célèbre par un arrêté relatif au Cabinet Thieffry qui fut autorisé à faire de la publicité pour son cabinet en première page du Monde et des Echos. L'avocat algérien a aussi un intérêt économique à gagner sa vie, mais la publicité doit être conforme aux règles déontologiques et à l'intérêt public, et ne saurait déroger aux principes d'intégrité, d'indépendance ou d'efficacité, elle ne doit pas induire en erreur la personne non informée, ni faire naître des espoirs mal fondés et des attentes irréalistes.
3 Déjà, plusieurs cabinets d'avocats algériens exercent des activités internationales, interviennent dans des transactions trans-frontalières impliquant les systèmes juridiques de plusieurs Etats, sont consultants internationaux et disposent de bureaux secondaires dans plusieurs pays ou dans le même pays étranger. Ce fait n'est pas conforme aux normes locales actuelles qui interdisent le bureau secondaire ; elles ont un effet seulement territorial fort heureusement. L'article 15 du statut des avocats français porte sur les « bureaux secondaires », définis comme « une installation professionnelle permanente distincte du cabinet principal ». Ils ne sont pas assimilés au cabinet secondaire de la « société d'avocats » de l'article 97 de notre loi 91-04. En effet, selon le texte français, les bureaux secondaires sont autre chose que « L'établissement créé par une société inter-barreaux hors de son siège social et au lieu d'inscription au tableau de l'un de ses associés ». Ce point mérite d'être revu, puisqu'il prive l'avocat algérien (article 8 alinéa 2 de la loi 91-04) d'un avantage qui ne peut être interdit à l'avocat étranger, admis à s'installer et travailler en Algérie par des conventions internationales multiples (OMC, UE etc.).
4 Les « consultations gratuites » et l'assistance judiciaire gratuite sont obligatoires (article 77 loi 91-04), sous peine de sanctions, devoirs auxquels ne sont pas soumis les avocats étrangers, ni chez eux ni chez nous. Ces « devoirs » sont manifestement contradictoires à l'obligation faite à l'avocat d'être àjour de ses charges fiscales et sociales. La fiscalité, les charges sociales, le coût toujours plus élevé des taxes judiciaires, du téléphone, des loyers, etc. minent le désintéressement de l'avocat, alors que l'aide judiciaire, qui devrait être étendue à une aide juridictionnelle, devrait peser sur l'Etat, totalement ou partiellement (19). Comme le recommande le Conseil de l'Europe, les avocats doivent donc « pouvoir continuer à exercer en toute indépendance même si les services procurés à des personnes économiquement faibles sont subordonnés à l'aide judiciaire financée par l'Etat ». On ne peut soutenir que la gratuité exigée du travail de l'avocat algérien est la contrepartie du monopole qu'il exerce dans son domaine. Chaque profession a un monopole. D'ailleurs, l'office d'un avocat n'est obligatoire que devant la Cour suprême et devant les tribunaux criminels.
5 La formule du serment de l'avocat telle qu'elle figure au Code de procédure civile (20) est désuète et devrait être revue. En effet, pourquoi prêter serment de « ne rien dire ou publier de contraire aux lois, aux règlements, à la sûreté de 1'Etat et de ne jamais s'écarter du respect dû aux autorités publiques » alors que la tendance naturelle de l'avocat le conduit à critiquer, remettre en cause et interpréter la loi pour qu'elle contribue davantage à l'ordre social et aux besoins collectifs. L'avocat pousse vers l'Etat de droit et protège les citoyens de l'arbitraire des autorités ; dans les démocraties qui se respectent, aucune initiative législative touchant les droits humains ne fait l'économie de consulter la profession et de bénéficier de son point de vue critique.
6 L'Algérie négocie le traité OMC, ouvrant ses frontières au droit d'établissement et à la libre prestation des services, y compris juridiques. Or, le métier d'avocat dans les pays développés s'exerce par de grandes entreprises employant des centaines, voire des milliers d'avocats, dont les prestations sont plus larges que celles permises (conseil et défense) par le droit local aux avocats algériens (21). De plus, des organismes tels que l'Union nationale des barreaux et les Ordres des avocats peuvent être considérés comme des associations d'entreprises d'avocats, ou un groupement d'entreprises bien que ces organismes ne déploient eux-mêmes aucune activité économique (22) et, dès lors, peuvent être critiqués par ces entreprises pour « position dominante » dans le marché des services juridiques. Ils peuvent aussi être critiqués par les avocats locaux pour abus de cette position en contraignant les avocats affiliés à se comporter, sur le marché, par rapport aux avocats et entreprises étrangers, d'une manière qui discrimine et restreint la concurrence ? Le règlement empêche les avocats et, par exemple, les experts-comptables de créer des structures associatives capables dofflir de meilleurs services à des clients qui opèrent dans un environnement économique et juridique complexe. Le droit occidental le permet, posant de sérieux problèmes comme le cumul de fonctions de conseil et de contrôle. Nos réformateurs devraient y réfléchir.
7 Comment nos organismes professionnels, qui refusent d'envisager la profession s'exercer dans le cadre d'entreprises internationales d'avocats mêlant l'activité judiciaire, l'activité de conseil et de contrôle, pourront-ils survivre ? Si des avocats algériens s'associent avec certaines de ces entreprises, ce qui est parfois à l'origine d'une perte de l'indépendance, comment réagirait l'Ordre face à ce déséquilibre économique entre l'avocat et son « employeur » étranger ? L'entreprise d'avocats avec sa force et la puissance de ses structures dirigées de l'étranger constitue un puissant groupe de pression vis-à-vis de l'Etat, qui n'a à côté de lui qu'un organe professionnel archaïque, contraint de limiter l'activité de ses membres, de facto, aux procès de divorce et aux rixes entre voisins. En guise de conclusion, disons que toute entreprise de réforme de la profession d'avocat doit prendre en considération l'implication très probable d'acteurs étrangers dans un domaine aussi sensible pour la souveraineté nationale que le secteur judiciaire. Si l'on facilite l'implémentation dans notre culture juridique des droits de l'homme et de l'environnement portés par les traités internationaux ratifiés par l'Algérie, et si l'indépendance absolue de la profession est consolidée, on a alors fait le premier pas de la garantie de la sécurité juridique au profit tant de la population, du pays que de l'Etat.
Notes de renvoi
12) De l'esprit des lois, livre XI, § 6.
13) Oberto, Les garanties de l'impartialité des juges et de l'indépendance de la justice, in Le rôle du juge dans une société démocratique, Strasbourg, 1996, pp. 15-30.
14) Le juge qui y renonce devient un simple fonctionnaire qui se soumet à la volonté du pouvoir. Certes, il obtient la paix, l'avancement et la garantie d'une vie tranquille, mais il ne jouera pas son rôle. Le juge plus que l'avocat d'ailleurs doit veiller à l'image qu'il donne de la justice. On est plus révolté par la décision injuste du juge que par celle du gouvernement. Le principe selon lequel les juges ne sont soumis qu'à la loi doit s'appliquer aussi aux magistrats du ministère public, ce qui n'est pas le cas en Algérie, nécessitant davantage de garanties pour l'indépendance de l'avocat.
15) L'étude du statut de ce Conseil ainsi que la place accordée au principe de l'inamovibilité du juge tant qu'il n'a pas atteint l'âge obligatoire de la retraite renseignent sur son degré d'indépendance.
16) Constitué dans sa majorité de magistrats élus par leurs pairs et ayant compétence à décider les questions touchant au recrutement, à la formation, à la carrière, aux mutations et aux sanctions disciplinaires.
17) Confirmé dans Genentech Inc. v. US International Trade Commission (Fed. Cir. 1997) et In re University of California (Fed. Cir. 1996).
18) Affaire Sperry v. Florida.
19) Le financement étatique ne devrait pas être un prétexte pour un droit de contrôle sur la profession d'avocat ni l'occasion de retirer des tiroirs les projets visant à tarifer ses prestations.
20) Article 429- les avocats prêtent serment devant la cour en ces termes : « Par Dieu, je jure de ne rien dire ou publier comme défenseur, de contraire aux lois, aux règlements, aux bonnes mœurs, à la sûreté de l'Etat et à la paix publique, et de ne jamais m'écarter du respect dû aux tribunaux et aux autorités publiques. »
21) Par exemple, la société Arthur Andersen Worldwide et Price Waterhouse réalisent un chiffre d'affaires mondial respectif de 8 et 10 milliards d'euros avec 17 et 20% dans le seul domaine des services de conseil en fiscalité.
22) La notion d'entreprise comprend, selon le droit communautaire européen, « toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement ». Arrêt du 23 avril 1991, Hfner et Elser, C-41/90, Rec. p. 1-1979, point 21.


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