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«Nous sommes en permanence en situation de vulnérabilité alimentaire»
Omar Bessaoud. Enseignant chercheur au CIHEAM
Publié dans El Watan le 22 - 11 - 2010

«La crise alimentaire n'est pas derrière nous, elle est devant nous», rappelle Omar Bessaoud, enseignant-chercheur au Centre international des hautes études agronomiques méditerranéennes à Montpellier, une citation de feu Hamid Aït Amara, expert en économie agricole, dont il était l'étudiant et le collègue sur des travaux de recherche, puisque «la production agricole de l'Algérie baisse» et «peut varier de 10 millions à 60 millions de quintaux», comme il l'explique dans cet entretien accordé à El Watan économie.
-Comment peut-on estimer la question de la sécurité alimentaire en Algérie ?
La question de la sécurité alimentaire se pose depuis toujours en Algérie. Depuis longtemps, elle est un pays vulnérable sur le plan des approvisionnements alimentaires. Elle était peut-être un pays exportateur pendant la période coloniale, mais elle importait l'essentiel des denrées de base, mais pas pour toute la population avec un niveau de consommation qui était très très bas. Selon le calcul, dans les années 1950, ce niveau était de 1 800 calories en moyenne pour les Algériens. D'ailleurs, cette situation de sous-nutrition et de malnutrition avait justifié et légitimé les premières politiques agricoles en Algérie qui consistait à offrir du lait aux enfants dans les écoles, à soutenir les prix des produits alimentaires de base pour que les Algériens aient du pain bon marché. Hamid Aït Amara avait travaillé sur la question de la sécurité alimentaire durant les années 1970 et récemment à l'occasion de la crise alimentaire de 2007-2008. Il disait une chose qui se vérifie aujourd'hui : «La crise alimentaire n'est pas derrière nous, elle est devant nous».
Nous avons importé 8 milliards de dollars en 2008, 5,4 milliards dollars en 2009, l'année record de bonne production avec 60 millions de quintaux et l'Algérie a même exporté de l'orge. Il y a une remontée des prix des produits laitiers, des produits céréaliers qui vont encore grever les budgets publics. Mais aussi, de nouveaux produits qui ont augmenté sur les marchés internationaux comme le sucre, dont la facture a pratiquement doublé. L'Algérie est l'un des plus grands consommateurs de sucre au monde, nous consommons 30 kg par habitant et par an sous différentes formes.
-L'Algérie était considérée comme le grenier de l'Europe. A-t-elle une vocation agricole ?
Elle a été considérée comme le grenier à blé de Rome dans l'antiquité et on évoque les exportations coloniales. Mais il faut savoir qu'à l'époque nous étions entre un et deux millions d'habitants sur des surfaces importantes avec des rendements importants de 3 à 4 quintaux à l'hectare. Donc, l'Algérie pouvait exporter. D'après les évaluations faites, on n'a pas pu exporter plus de 2 millions de quintaux, selon les études de Dumond, dans les années 1950, sur deux à trois siècles. Ce qui est peu. Aujourd'hui, la population algérienne est de 35 millions d'habitants. Il ne s'agit plus des mêmes niveaux et standards de consommation. Durant la période coloniale, il est vrai que l'Algérie exportait.
Les exportations agricoles représentaient les 2/3 des recettes d'exportation. Elles jouaient le rôle, à des niveaux plus modestes, des exportations pétrolières actuellement. Sauf que les 2/3 des recettes d'exportations étaient le produit du vin, puisqu'il ne se consommait pas au niveau interne. Il était la richesse et puis, il y a eu une grande crise du vin à l'échelle mondiale, dans les années 1970. Le vin constituait l'essentiel des exportations qui comprenaient résiduellement des agrumes, des primeurs. Il représentait plus de la moitié de la valeur ajoutée agricole, la moitié des salaires distribués dans l'agriculture pour 400 000 ha, mais pour 3 millions emblavés en céréales nous étions dépendants. Nous importions de la farine et du blé. L'Algérie a été importatrice de blé tendre avant l'indépendance, en plus du lait, du sucre, des huiles alimentaires, et on exportait de l'orge et du blé dur. Il ne faut pas exagérer, car les potentialités de l'Algérie sont très limitées.
-Quelles sont ces potentialités ?
Ce sont 8 millions d'hectares pour 35 millions d'habitants, soit un ratio de 0,23 ha par habitant contre 0,50 ha pour la France avec des qualités de terre. Nous sommes dans un pays aride et semi-aride et le changement climatique aggrave actuellement l'aridité et la semi-aridité. Ce qui explique les variations des cultures, car lorsque nous avons un climat favorable, nous avons une bonne récolte et quand le climat est défavorable quelles que soient les interventions, la production baisse. Elle peut varier de 10 millions à 60 millions de quintaux. Au regard des potentialités et des techniques, ou ce qu'on appelle les dotations techniques, nous ne sommes pas concurrentiels aux produits étrangers et nous ne pouvons produire assez pour se suffire.
L'autosuffisance est quasiment impossible. D'où la nécessité de diversifier l'activité économique que ce soit à l'échelle de l'économie nationale globale ou à l'échelle rurale. Dans les zones rurales, l'activité agricole monopolise l'essentiel, or il existe d'autres activités et d'autres métiers comme l'agro-industriel, l'artisanat, les petites industries que nous n'avons pas suffisamment développées.
-Que peut-on récolter des terres algériennes et dans quelles proportions ?
Aujourd'hui, 7% de la surface est à peu près irriguée, c'est sur cette surface que nous produisons l'essentiel des fruits et légumes. Nous avons aussi la production animale qui représente 50% de la valeur ajoutée : ovin, bovin et complexes avicoles. Il y a aussi la production végétale, les tois quarts des terres agricoles sont accaparées par les céréales. Or, ces trois quarts des terres de céréales combinées à la jachère ne produisent que 18% de la valeur ajoutée agricole. Ce qui est très peu. Nos rendements de blé sont les plus bas du bassin méditerranéen. La norme est de 12 à 14 quintaux à l'hectare en moyenne, alors que l'Algérie tourne autour de 10 quintaux en moyenne voire moins.
-En termes de ratio alimentaire, peut-on aujourd'hui assurer aux Algériens à manger ?
Oui, si on prend la sécurité alimentaire comme la mise à la disposition du citoyen une ration alimentaire en partie importée, car nous importons 70% de nos calories, une bonne partie des protéines à travers les importations laitières qui sont en concurrence avec les importations céréalières. Ces importations ne sont possibles que par rapport à la mobilisation de la rente pétrolière. Ce n'est pas interdit ! Un pays comme le Japon, avec 180 millions d'habitants mais ne dispose que de 2 à 3 millions d'hectares, c'est très très peu, mais il s'est doté d'une politique de souveraineté alimentaire.
Il s'agit de produire un minimum de riz avec une politique d'intervention de l'Etat et d'encadrement et ses apports en protéine viennent des produits de la pêche. Le modèle alimentaire japonais est fondé sur le riz et le poisson. Ce pays contrôle une partie de la production sans compter qu'il est le plus grand importateur mondial, avec 80 milliards de dollars par an en moyenne contre une moyenne de 5 milliards de dollars pour l'Algérie. Sauf que le Japon est un pays industrialisé, il a une puissance économique avec une accumulation technologique et financière tel qu'il peut s'approvisionner pour des générations pour assurer sa sécurité alimentaire. Il est un pays sur le plan commercial très présent sur les marchés. C'est ce tissu économique qui va supporter l'agriculture. C'est ce tissu que l'Algérie devra construire.
-Qu'en est-il de l'industrie agricole en Algérie ?
La cohérence de la politique dans les années 1970 avec la réforme agraire. Un ensemble industriel s'était mis en place pour la production d'engrais avec les complexes de Skikda, Arzew et une industrie mécanique à Constantine, à Sidi Bel Abbès. L'abandon de ce secteur industriel. Les politiques d'ajustement structurel sont passées par là, mais il y a 20 ans, c'est terminé, elles ont fait des dégâts mais nous avons les moyens humains, matériels et technologiques possibles. L'Algérie n'a pas le capital humain des années 1970 puisqu'elle a formé. Elle exporte même ses compétences à l'extérieur. Comment reprendre tout cela en main et construire.
-Les experts parlent de défragmentation des exploitations agricoles d'une part et d'autre part par l'exode rural, n'a-t-on pas appauvri les zones rurales en main-d'œuvre agricole ?
Non, c'est une idée reçue ! Actuellement, les mouvements démographiques comme on les connaît, la croissance de la population agricole et rurale continue. Nous sommes quasiment à 1% de taux de croissance. Il y a une surpopulation. La population rurale continue d'augmenter. Cette démographie participe au morcellement des terres par l'héritage. L'Algérie avait 8 millions d'hectares qui échappaient au morcellement. Je parie que sur une fragmentation, il y a un dépeçage de ce secteur public qui a été un butin de guerre de l'indépendance algérienne, c'est-à-dire les 2,7 millions d'hectares récupérés du fonds colonial.
Au lieu de le garder, de le maintenir, de créer des exploitations viables, la décision qui a été prise était de l'individualiser et de redistribuer mais va contribuer par l'augmentation de la population et le système d'héritage à dépecer le secteur. Ce n'est pas bon ! Autre danger, comme ce sont les meilleures terres sur lesquelles il y a eu un processus rampant d'accaparement, ces 20 dernières années, à des fins autres qu'agricoles. Les terres, les plus riches du pays, échappent à l'agriculture quand elles ne font pas l'objet de spéculation foncière.


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