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«Comment j'ai réussi la transition...»
Adolfo Suarez. Ancien Premier ministre, architecte de la transition en Espagne, décédé dimanche
Publié dans El Watan le 27 - 03 - 2014

«La dictature n'est rien d'autre qu'une machine à fabriquer du passé avec de l'avenir.» Pierre Mertens
Les peuples, souvent, croient effacer leurs humiliations en confiant leur sort à des dictateurs ou à des mégalomanes. On voit ceux-ci surgir sur l'humus des défaites comme les champignons après la pluie, notait avec un humour acerbe l'homme politique français, Maurice Druon.
Les Espagnols, qui connaissent un bon bout de la dictature, ont longtemps enduré du fascisme sous la férule du général Franco, avant de franchir le pas en s'ouvrant à la démocratie avec cette conviction que la liberté jamais ne mourut au fond des prisons.
Car le transfert entre les mains d'un seul homme, du soin de décider de tout est la pire tentation qui menace les peuples, tous en sont avertis par l'histoire et pourtant aucun n'en est à l'abri. Débarrassée du caudillo, la transition en Espagne s'est faite en douceur grâce à l'intelligence d'un homme que les Ibères pleurent sincèrement aujourd'hui au vu de la stature de ce politicien qui n'avait d'yeux que pour son pays, réussissant la gageure de rassembler toutes les tendances politiques autour d'un même projet. Celui de passer d'une dictature dure et abjecte à une démocratie véritable et participative. Franco était déjà diminué mais tenait au pouvoir, sachant que la pire maladie qui puisse frapper un homme est de désirer le pouvoir sans avoir les factulés nécessaires pour l'exercer.
Franco le dictateur
Franco régnait sans partage. Les Espagnols vivaient stoïquement sous son joug sans broncher. Les peuples ne doivent-ils pas se défier des princes solitaires, car c'est parmi eux qu'on recrute les tyrans. Franco disparu, Adolfo Suarez était loin de soulever les passions lorsque le roi Juan Carlos 1er lui confia, en 1976, la formation d'un gouvernement dont l'objectif était le démantèlement des structures franquistes. Il n'avait que 44 ans et personne ne s'attendait à ce que cet avocat, ancien phalangiste, fils de républicains, méconnu du grand public malgré son passage à la direction de la radio télévision publique (1969-1973) et ses postes à responsabilité dans le «Mouvement» franquiste, soit choisi pour mener la transition de la dictature vers la démocratie. «II fut très critiqué, rappelle le politologue Fernando Vallespin. Tout le monde était perplexe. Nous ne pouvions pas imaginer que quelqu'un du régime puisse mener le changement.» Et pourtant.
A la tête de l'Union du centre démocratique, une coalition de centre-droit rassemblant des démocrates-chrétiens, des libéraux et d'autres politiques issus du régime, mais convertis à la démocratie, il servit de tampon entre la droite franquiste d'Alianza Popular et les Partis socialiste et communiste. Et «dès qu'il se retira, il fut considéré comme un quasi Dieu et loué pour les services rendus au pays», précise M. Vallespin. Courage est le mot qui revient le plus souvent pour le qualifier. Car, contre lui, il rassembla les militaires opposés à la légalisation du Parti communiste, l'Eglise, hostile à la loi sur le divorce, les chefs d'entreprise qui ne voyaient pas d'un bon œil le poids donné aux syndicats. Mais aussi l'ambassade des Etats-Unis, parce qu'il était hostile à l'entrée de l'Espagne dans l'OTAN, ou encore Israël, parce qu'il maintenait de bonnes relations avec Yasser Arafat.
La mort d'Adolfo la semaine dernière, à 82 ans, a suscité une vague d'émotion et de compassion à travers toute l'Espagne…
Tous les grands quotidiens espagnols publiaient en première page cette photographie prise le 18 juillet 2008 du roi Juan Carlos d'Espagne marchant, la veille, le bras sur l'épaule d'Adolfo Suarez, premier président du gouvernement de la démocratie post-franquiste. Affligé par la maladie d'Alzheimer, Adolfo Suarez, 75 ans, n'a pas reconnu le souverain venu lui remettre en sa résidence madrilène la Toison d'or, la plus haute distinction espagnole.Discret et émouvant, le cliché a été pris par le fils de l'ex-chef de gouvernement, Adolfo Suarez Iliana. «Mon père, dit-il, ne reconnaît personne. Il n'a pas reconnu le roi, mais il a noté sa tendresse. Ils ont vécu beaucoup de choses ensemble et ils sont arrivés à la fin d'un chemin.» La mémoire perdue d'Adolfo Suarez est pour les historiens un trésor évaporé avant d'avoir été palpé.
Les Espagnols doivent à Adolfo Suarez l'amnistie générale, la légalisation de tous les partis politiques, y compris le communiste, l'abolition de la censure, les premières élections démocratiques du 15 juin 1977 et la nouvelle Constitution de 1978, qui reconnaît les autonomies régionales réclamées alors, surtout par les Basques et les Catalans. Sa démission, en janvier 1981, demeure l'objet de conjectures. Les ambitions personnelles qui divisaient l'UCD et la grogne de l'armée, à l'époque encore dominée par des officiers franquistes, sont les deux causes les plus évoquées.
Mémoire perdue
C'est lors du vote parlementaire qui désignait le successeur d'Adolfo Suarez à la présidence du gouvernement, le centriste Leopoldo Calvo Sotelo, que quelque 200 gardes civils armés prirent en otages, le 23 février 1981, les députés et le gouvernement.
Les caméras de télévision filmèrent l'irruption au Parlement des putschistes commandés par le lieutenant-colonel Antonio Tejero. Sous les coups de feu d'intimidation tirés en l'air par les assaillants, on vit les centaines d'élus et les ministres se coucher au sol. Restées assises ou debout, seules trois personnalités sauvèrent alors par leur attitude physique la dignité institutionnelle : Adolfo Suarez, son ministre de la Défense, le général Manuel Gutierrez Mellado, et le leader communiste, Santiago Carrillo.
Cette tentative de coup d'Etat militaire échoua quelques heures plus tard grâce notamment à une intervention télévisée du roi Juan Carlos, en grand uniforme de commandant en chef des armées. Adolfo Suarez fut anobli en 1996 sous le titre de duc de Suarez. Sa maladie, révélée en 2005, la perte prématurée de sa femme et de sa fille aînée, emportées par le cancer, la nostalgie ainsi que l'importance mieux perçue de son rôle dans la transition entre dictature et démocratie expliquent l'affection collective et/ou le respect voués aujourd'hui par les Espagnols à l'ex-chef de l'Exécutif, moins apprécié lorsqu'il gouvernait le pays.«Jamais plus nous n'aurons un chef de gouvernement comme lui. Ils l'ont détruit parce qu'il n'était ni de droite ni de gauche. Il était très honnête», affirmait Maria Dolores Carmona Gonzales, une retraitée de 68 ans.
«II a su parler avec ses ennemis», ajoutait Maria Jesus Fernandez, 64 ans, rappelant le talent de négociateur de celui dont tous saluaient la stature d'homme d'Etat.
Juan Perez, étudiant en histoire à Madrid, n'a que 24 ans, mais il s'incline, ému comme les plus anciens, devant la dépouille de cet «architecte de la démocratie». «En Espagne, il y a un avant et un après Suarez. Pour moi, c'est très émouvant d'être ici», confiait-il.
Dans une de ses nombreuses interviews, Adolfo avait déclaré lors de son investiture qu'«il avait fait fi de toutes les pesanteurs, transcendé les convictions, même les siennes, et considéré ses adversaires politiques comme des partenaires ; l'objectif étant le même : permettre à l'Espagne d'entrer dans une ère nouvelle sans fracas ni chasse aux sorcières, ni rancœur, ni haine». Même les communistes qu'il ne tenait pas particulièrement pour des amis avaient droit au même chapitre. Sa stratégie a bien fonctionné et l'Espagne est sortie de l'ornière sans dégâts… Ce qui lui a valu d'être plébiscité par le peuple et remercié par le roi Juan Carlos.
Ingratitude
En évoquant la retraite imposée à Adolfo en 1981, l'on ne peut s'empêcher de penser alors à l'histoire racontée par Plutarque, celle d'Aristide, chef vertueux qui s'opposa à Themistole à propos de la stratégie à utiliser contre les Perses lors de la guerre médique. Le peuple grec, pour mettre un terme à leur rivalité, avait décidé d'exiler l'un d'entre eux par un vote d'ostracisme, sanction couramment prise contre un compatriote jugé trop puissant. Chaque citoyen devait inscrire sur une tablette en terre cuite le nom de la personne qu'il voulait bannir. Un paysan analphabète s'adressa à cette occasion à Aristide, sans le reconnaître, le prenant pour un homme du commun.
Il le pria d'inscrire sur sa tablette le nom d'Aristide. Celui-ci, tout étonné, lui demanda si ledit Aristide lui avait porté quelque tort. «Aucun, dit le rustre, je ne connais point cet homme-là, mais je suis ennuyé d'entendre partout l'appeler ‘‘le juste''.» Aristide ne répondit pas. Il inscrivit donc son nom sur la tablette et la remit au paysan. Adolfo fut lui aussi victime d'un vote d'ostracisme. Au plus intime de lui sans doute pensait-il à l'ingratitude des hommes. Comme Aristide, il ne leur en tenait pas rigueur, mais souffrait seulement de n'avoir pas été assez entendu. On ne trahit bien que ceux qu'on aime, n'est-ce pas.
La maladie finira d'achever Adolfo, rongé par le mal d'Alzheimer et qui le maintiendra loin des feux de l'actualité.Dans l'une de ses analyses critiques sur l'économie algérienne, le politologue Rachid Tlemçani avait écrit qu'«en 1975, l'Espagne était au niveau de l'Algérie. Mais depuis, l'Algérie s'est complu dans son économie rentière basée seulement sur les revenus pétroliers, alors que les Ibères avaient vite émergé.»
C'est une histoire de bonne gouvernance et d'un contrat moral entre gouvernants et gouvernés basé sur la sincérité. Peut-on réellement avancer ici, lorsque certains décideurs préconisent sans rougir d'affamer le peuple pour mieux l'asservir ?
En Espagne, un homme a su accompagner les principales composantes du peuple pour une transition pacifique qui a donné les résultats qu'on connaît.
A méditer…


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