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Bonnes feuilles
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Publié dans El Watan le 27 - 03 - 2015


Ce qu'en pensent les autres historiens
De tous les chercheurs qui ont travaillé sur les supplétifs algériens, seul Abderahmen Moumen les a brièvement évoqués, dans un chapitre qu'il intitule «Entre marginalisation sociale et (ré)insertion» : «Le devenir des familles d'anciens supplétifs restés en Algérie constitue aujourd'hui, du fait de recherches scientifiques lacunaires sur cette population, une réalité difficile à apprécier (…). L'incertitude est aussi importante quant au nombre d'anciens supplétifs demeurés en Algérie, qui permettrait éventuellement de relativiser le bilan des victimes durant les violences post-indépendance.»
Avant lui, Gilbert Meynier s'était permis une généralisation un peu abrupte : «Les harkis furent généralement protégés lorsqu'ils parvinrent à se réfugier dans leur communauté d'origine, où la solidarité tendait à prévaloir. Rappelons qu'il y a eu des jama'a (conseils villageois) pour désigner les jeunes qui iraient au maquis et ceux qui seraient goumiers, et elles eurent à cœur de protéger leurs harkis.» Dans son étude publiée en 2002, Des harkis berbères, de l'Aurès au nord de la France, Nordine Boulhaïs parle longuement de harkis restés vivants dans les Aurès, qu'il a rencontrés au cours de son enquête.
«En ce qui concerne les Aurès, les témoignages montrent que, même si quelques représailles sont signalées dans les environs de Biskra, les rescapés – que l'on retrouve dans le bassin de la Sambre et ailleurs en France, mais aussi dans les Aurès ! – sont relativement nombreux. En effet, de nombreux harkis sont restés dans les Aurès, relativement épargnés car non compromis et peut-être bénéficiant de structures tribales, les mêmes qui les ont poussés à s'enrôler auprès des Français (…).
Nous en avons retrouvés lors de notre voyage d'août 1991.» Sur les 196 mokhaznis affectés à la SAS d'Arris, le chercheur a réussi à retracer le destin de 93 d'entre eux. «La majorité (60%) sont restés dans les Aurès et plus précisément, à deux exceptions près, à Arris !» Pour Gilles Manceron, «la grande majorité de ceux qui avaient été, à un moment ou un autre, employés comme supplétifs durant la guerre ont continué à vivre en Algérie en se fondant dans la vie sociale, en évitant d'être désignés par le terme stigmatisant de harki. Ils ont réussi à éviter l'incarcération dans les prisons algériennes, où certains ont subi des années d'emprisonnement dans des conditions terribles, sans jamais être jugés, jusqu'en 1969. Ainsi que la marginalisation économique et sociale qui a perduré jusqu'à nos jours pour certains anciens harkis et pour les membres de leurs familles».
A la fin de sa longue thèse de doctorat, François-Xavier Hautreux aboutit à la même conclusion en ce qui concerne les supplétifs : «Quelle que soit l'intensité des massacres de l'été, il faut donc bien considérer que la grande majorité des Algériens ayant combattu dans une unité auxiliaire durant la guerre est restée vivre en Algérie après 1962.»
Situation juridique des harkis en Algérie
La mention des «harkis», même indirecte, est extrêmement rare dans la législation algérienne produite depuis l'indépendance. Ce silence, qui pourrait paraître comme un avantage (on leur aurait «pardonné»), se révèle cruellement handicapant. Car elle laisse la porte ouverte à n'importe quel petit fonctionnaire doté de pouvoirs d'appliquer ses propres règles, souvent discriminantes vis-à-vis de ceux qu'il considère comme des «traîtres» — sans que ces derniers puissent s'appuyer sur une loi qui les protégerait. Au lendemain de la guerre, le président Ben Bella avait fait quelques déclarations tonitruantes, affirmant que son gouvernement «préparerait actuellement un texte frappant d'indignité nationale les anciens harkis». Mais l'annonce ne déboucha sur aucun texte de loi.
Ce n'est qu'en 1996 qu'apparaît la première mention des «harkis» dans la législation algérienne. Dans la troisième Constitution, l'article 73 stipule que «pour être éligible à la Présidence de la République, le candidat doit (…) justifier de la participation à la Révolution du 1er Novembre 1954 pour les candidats nés avant juillet 1942 (ou) de la non-implication des parents du candidat né après juillet 1942, dans des actes hostiles à la Révolution du 1er Novembre 1954». Une formulation très avantageuse pour les membres de la «famille révolutionnaire» : s'il est assez vieux, le candidat doit être un ancien moudjahid (et donc ni un harki ni même un «neutre»).
Et s'il est trop jeune, son père ne doit pas être un «ancien harki». Trois ans plus tard, la loi du 5 avril 1999 relative au moudjahid et au chahid, signée par le président Liamine Zeroual, assène un coup violent aux anciens harkis.
Dans son article 68, elle stipule : «Perdent leurs droits civiques et politiques, conformément à la loi en vigueur, les personnes dont les positions pendant la Révolution de Libération nationale ont été contraire aux intérêts de la patrie et ayant eu un comportement indigne.» Mais qu'est-ce que «les droits civiques et politiques» ? Les définitions sont tellement vastes (droit de vote, droit d'éligibilité, droit d'exercer certaines fonctions, droit de témoigner en justice, etc.) qu'un tel article de loi est impraticable sans les décrets d'application qui en permettent l'utilisation concrète par les administrations.
Résultat : cet article de loi n'eut aucune conséquence directe sur la vie des harkis et passa longtemps inaperçu. Huit ans plus tard, le 18 février 2007, la presse algérienne annonçait la publication d'un décret d'application. Cette annonce provoqua la réaction de Khaled Bounedjma, président de la Coordination nationale des enfants de chouhada, dans le quotidien Liberté du 10 avril 2007 : «Cette loi vise à préserver l'histoire du Mouvement national.
Grâce à cette loi, il sera désormais possible d'attaquer une personne qui était autrefois contre la Révolution algérienne et qui occupe aujourd'hui un poste à responsabilités. Il existe maintenant une disposition qui dit qu'une personne dont le père était un harki ne peut occuper un poste au niveau des institutions de l'Etat.» Cette réaction illustre une des caractéristiques importantes de la vie en Algérie. D'une part, chaque personne dotée d'un certain pouvoir (cela va d'un personnage officiel au plus humble fonctionnaire de mairie) se permet d'interpréter la loi comme bon lui semble. Dans le cas présent, la loi d'avril 1999 ne parle que des harkis eux-mêmes et en aucun cas de leurs enfants.
Ce qui n'empêche pas Khaled Bounedjma de les inclure arbitrairement. D'autre part, il existe en Algérie une véritable phobie concernant une supposée présence massive de harkis qui occuperaient des postes importants dans les rouages de l'Etat, présence d'autant plus inquiétante qu'elle est invisible. A ma connaissance, aucun harki n'a été licencié de son poste en application de la loi de 1999 – ou de son supposé décret d'application de 2007. Par contre, cette loi a certainement renforcé de façon diffuse le sentiment de légitimité des petits fonctionnaires à discriminer arbitrairement tous les «harkis» qui se présentent à leurs administrations.
L'attitude de l'ALN
La question de la participation de djounoud, d'officiers, voire de hauts responsables de l'ALN aux assassinats de «harkis» en 1962 est parasitées par des positions idéologiques tranchées. En gros, ceux qui insistent sur le «massacre de harkis» ont tendance à accuser dans le même temps les responsables de l'ALN/FLN. A l'opposé, les soutiens divers à la Révolution algérienne, même s'ils ne manquent pas de mots très durs envers les harkis, trouveraient indigne de leurs héros de s'être livrés, au lendemain de la victoire, à des assassinats massifs, odieux, et surtout hors de tout cadre juridique. Ils préfèrent alors rejeter la faute sur un «peuple incontrôlé et assoiffé de vengeance».
C'est par exemple le discours que tient aujourd'hui Ali Haroun, un ancien responsable du FLN en France pendant la guerre. Lors d'un colloque organisé en 2006 à l'Assemblée nationale française, il prit la parole : «Je voudrais dire un mot des massacres de l'été 1962. Certes, durant les mois concomitants à la proclamation d'indépendance, les représailles furent souvent inhumaines, comme je l'ai déjà écrit. Face à un FLN inhibé au sommet, ce sont les directions de wilaya qui interdisaient formellement toute atteinte à la vie des harkis.
Ce qui n'empêcha pas nombreuses exécutions durant cette période transitoire particulièrement trouble. Non sur ordre formel du FLN, mais le plus souvent à l'initiative d'individus incontrôlés, de villageois avides de vengeance longtemps refoulée ou de "marsiens", ces résistants du mois de mars, les intervenants de la vingt-cinquième heure.» Je ne prétends pas résoudre ici cette question délicate de la responsabilité des dirigeants algériens, militaires et politiques.
Je me contente de signaler certains documents qui peuvent aider le lecteur à forger son opinion. D'autre part, dans tous les entretiens que j'ai menés, j'ai systématiquement pris soin de demander à mes interlocuteurs, le cas échéant, le statut de leurs tortionnaires. Dans de nombreux cas, les exactions les plus cruelles ont en effet été le fait de «marsiens» ou même de simples civils, tandis que les vrais moudjahidine ont plutôt eu une attitude respectable, voire protectrice.
Ce qui n'empêche pas que dans d'autres cas, des moudjahidine ou des militants aguerris du FLN aient commis de sanglantes exactions. Là encore, je laisse le lecteur tirer ses conclusions.
Je commencerais par un document jamais cité : juste après la déclaration de cessez-le-feu, il est devenu soudain possible pour les journalistes présents en Algérie de s'aventurer dans le djebel (la montagne) afin de rencontrer ces «combattants musulmans» demeurés si longtemps inaccessibles. Après deux nuits de marche à dos de mulet dans les Aurès, André Pautard, envoyé permanent du Monde en Algérie, parvient au PC d'un des responsables de la Wilaya I. Il rencontre «un homme âgé de plus de trente ans, qui avait servi trois ans comme sous-officier dans un régiment de tirailleurs avant de gagner les rangs de la rébellion, au tout début de la guerre».
Le journaliste poursuit : «Evoque-t-on le cas des harkis, des supplétifs musulmans, qu'aussitôt (il fait) état des consignes de clémence, ajoutant que depuis le 19 Mars, les désertions ont été nombreuses (pour la seule région de Batna on en a noté une quarantaine). Ces hommes ont été recueillis et, disent-ils, seront jugés par un tribunal militaire, à commencer par ceux dont la conduite ne fut pas exemplaire à l'égard des populations civiles. Les autres ? Ils ont fait la guerre...»
Maurice Faivre, ancien général de l'armée française en Algérie, cite une série de directives émanant des niveaux supérieurs de l'ALN, piochées au hasard dans les archives militaires françaises, qui montrent en fait l'absence totale de cohésion concernant l'attitude à avoir vis-à-vis des harkis. Cela va des directives les plus radicales aux plus conciliantes, et chacun semble y aller selon ses humeurs. En février 1962, Mohand Oulhadj, chef respecté de la Wilaya III (Kabylie), envoie la directive suivante : «S'agissant des Algériens enrôlés chez l'ennemi et désarmés, il est interdit de les inquiéter. Il faut mettre une sourdine à notre amertume et éviter les exécutions collectives. Si l'un d'eux continue de collaborer, il sera jugé par le tribunal de la kasma.»
Dans l'hebdomadaire Jeune Afrique, il affirme à la même époque : «Des harkis criminels de guerre sont rentrés dans les douars (…). Après l'indépendance, le gouvernement décidera s'il doit instituer des tribunaux.» D'autres sont plus menaçants que le vieux chef kabyle. Le 10 avril 1962, un mois donc après les Accords d'Evian, le commandement de la Wilaya V (Oranie) diffuse cet ordre : «A travers toute l'Algérie, l'ennemi a entrepris la démobilisation massive des harkis, goumiers et ralliés qui n'ont maintenant plus aucune raison d'être. Le colonialisme français, ayant fini de se servir et d'exploiter ces valets inconscients, a décidé de les rejeter définitivement comme ce devait arriver tout à fait naturellement (…).
Nul n'ignore leur honteuse et abominable histoire qui restera à jamais connue de toutes les générations à venir. Si la Révolution les a condamnés, il n'en reste pas moins que le peuple les frappe de son mépris et continuera toujours de les haïr et les renier.
Néanmoins, le cessez-le-feu n'étant pas la paix, nous devons user de tact et de souplesse afin de les gagner provisoirement (…) Leur jugement final aura lieu dans l'Algérie libre et indépendante, devant Dieu et le peuple qui sera alors seul responsable de leur sort.» Le comité de la Wilaya II (Nord-Constantinois) prescrit de «se montrer conciliant envers les harkis afin de ne pas provoquer leur départ en métropole, ce qui leur permettrait d'échapper à la justice de l'Algérie indépendante».
Mais une nouvelle directive de la Wilaya V (Oranie), recueillie par les militaires français à la mi-juin 1962, penche à nouveau vers une solution non violente : «Vous pouvez accepter les soldats appelés et les harkis qui désirent rejoindre nos rangs avec leurs armes, il faut leur enlever les armes et les remettre aux anciens djounoud, les endoctriner politiquement afin d'en faire de vrais combattants après un lavage de cerveau.»


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