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Le riche parcours d'un homme exceptionnel
Tahar Hannache, pionnier du cinéma algérien
Publié dans El Watan le 10 - 03 - 2016

Tahar Hannache, de son vrai nom Tahar Benelhannache, demeure l'une des grandes figures dans l'histoire du cinéma algérien, qu'on cite rarement de nos jours, et dont le fabuleux parcours n'a pas été révélé au grand public.
C'est grâce au magnifique travail de mémoire entamé en 1990 par sa fille aînée Thouria Benazzouz et ses trois sœurs, que ce grand pionnier du 7e art en Algérie, est sorti de l'anonymat et surtout de l'oubli, pour avoir droit à tous les honneurs. «Mon père était un homme très méticuleux, il conservait soigneusement toutes ses archives.
C'est ainsi que je n'ai pas eu de difficultés à collecter tous les documents qu'il classait dans des pochettes bien ordonnées, dont des lettres, des correspondances administratives, des autorisations de filmer, des photos, des coupures de presse, mais aussi tout ce qui avait trait à sa riche carrière cinématographique, c'est grâce à mon père que j'ai pu organiser une exposition à son hommage», explique Thouria rencontrée à Constantine qu'elle a visitée pour la première fois. L'homme, qui a reçu tous les honneurs, lors d'une première exposition organisée au mois d'avril de l'année écoulée au Palais de la culture Moufdi Zakaria à Alger, est revenu à sa ville natale, Constantine, à l'occasion des premières journées du film arabe primé, tenues au Vieux Rocher en décembre 2015. Une histoire passionnante d'un homme qui a montré une curiosité pour tout dès son enfance, et découvrit le cinéma à l'âge de 10 ans.
Enfance à Sidi Djeliss
En racontant l'histoire de son père, Thouria se rappelle des moindres détails : «Mon père est né en 1898 dans une maison du quartier populaire de Sidi Djeliss, dans une famille aisée». Son père, Khoudir, gérait une manufacture de tabac et une tannerie. «Malheureusement, on ne savait pas beaucoup de choses sur l'enfance de notre père, sauf qu'il avait fréquenté l'école primaire du quartier», témoigne-t-elle. Tahar était décrit comme un enfant calme, sage et tranquille, mais surtout studieux dans ses études. Il aimait tant les sciences et les techniques et se passionnait pour tout. «C'est lors de ses multiples promenades dans la ville qu'il découvre la première salle de cinéma dans sa vie», rappelle Thouria.
C'était la salle Nunez, le doyen des établissements de cinéma dans la ville de Constantine, située dans le quartier de Bab El Djabia, près du pont Sidi Rached. La salle deviendra plus tard Le Royal en 1958, puis le Rhumel après l'indépendance. Quand la salle avait ouvert pour la première fois en 1908, le petit Tahar avait 10 ans. Il assistera ainsi au premier film qui marquera son destin pour la vie. Quatre ans après la mort de son père en 1916, Tahar choisira de partir en France, après avoir passé son service militaire à Miliana. «Il avait à peine 22 ans quand il avait débarqué en France, dans les studios de Boulogne-Billancourt où il avait un seul projet en tête, apprendre le cinéma et devenir cinéaste», raconte sa fille Thouria.
Premier rôle de figurant
Dans son livre Tahar Hannache, un cinéaste dans l'oubli, édité en 2015, l'auteur Ahcene Dafer rapporte une anecdote originale et historique qui marque le début de l'aventure cinématographique de Tahar Hannache, suite à une rencontre qui décidera de son destin en 1922 : «En s'approchant des studios de Boulogne-Billancourt, Tahar croise un homme qui n'est autre qu'un régisseur à la recherche de figurants arabes pour le film l'Atlantide. Tahar lui demande si c'est bien ici qu'on tourne le film. Le régisseur l'interroge : vous êtes un Arabe ? A la réponse positive de Tahar, le régisseur lui dit : vous êtes engagé, présentez-vous demain à 8h.» Tahar décroche ainsi son premier rôle de figurant dans le film L'Atlantide, de Jacques Feyder, à l'époque du cinéma muet. Une première pour un Arabe. Tahar Hannache n'aura plus peur de conquérir le monde du cinéma en France.
Animé d'une soif d'apprendre lors de ses premières années aux studios de Billancourt, Tahar assure presque tous les métiers du cinéma. Il ne cesse de progresser grâce à sa persévérance. Il profitait de sa présence sur les plateaux pour apprendre les ficelles de la prise du son, du tournage, du maniement de la caméra, de la direction des acteurs et de la mise en scène. Il sera ainsi opérateur, régisseur, photographe, cameraman et assistant réalisateur dans plusieurs films, dont ceux d'Abel Gance, Julien Duvivier et Marcel Pagnol. En 1924, il est régisseur et figurant dans le film Les fils du soleil, de René Le Somptier. Il aura son premier rôle d'acteur en 1926 dans le film The Arab, de l'Américain Rex Ingram. Il a même joué aux côtés de Jean Gabin en 1935 dans le film La Bandera, de Julien Duvivier. Dans sa riche filmographie qui s'étend sur une soixantaine de films de 1922 à 1955, Tahar Hannache a été 12 fois acteur, 17 fois opérateur-régisseur, 16 fois cameraman et 14 fois comme directeur de photo, sans compter les films réalisés et produits par Tahafilms. Du jamais vu dans l'histoire du cinéma algérien jusqu'à nos jours.
69 ans avant Arthus-Bertrand
Fort d'une belle et riche expérience, Tahar Hannache décide en 1938 de créer sa propre boite de production Taha Films. Une initiative audacieuse à l'époque où ce genre d'entreprises n'était réservé qu'aux Européens. L'aventure commence ainsi par un documentaire, Aux portes du Sahara, qui ne sera pas diffusé et dont le négatif finira par être perdu. L'expérience de Taha Films sera interrompue suite au déclenchement de la Deuxième Guerre mondiale. Tahar, qui obtiendra sa carte d'identité professionnelle en 1942, sera mobilisé par le service français du cinéma aux armées. Malgré les années d'éloignement, Tahar gardera toujours ses liens avec sa ville natale, Constantine. Juste après la fin de la guerre, et de retour en Algérie en 1946, il décidera de concrétiser un vieux rêve, en produisant un documentaire en hommage à sa ville intitulé Constantine, l'ancienne Cirta. Un film qu'il tourna avec intelligence, pour éviter la censure des services français. Il choisira ainsi de montrer des projets réalisés par les Français dans la ville, tout en profitant pour montrer la beauté naturelle de Constantine, ses vestiges, son rocher, sa vieille ville, ses marchés et son artisanat. «C'est un film où de nombreuses séquences ont été filmées pour la première fois à partir d'un avion qui survolait la ville, c'était vraiment très beau à voir, notamment les images du rocher», a révélé Thouria Benazzouz. Tahar Hannache fut le premier à avoir filmé Constantine à partir du ciel. Cela s'est passé 69 ans avant que le photographe Yann Arthus-Bertrand.
La plus ancienne œuvre de fiction
Dans une contribution parue dans le journal El Watan du 7 février 2008, Abdennour Zahzah signe une analyse du film Ghetassine Essahra (les plongeurs du désert), considéré comme «la plus ancienne œuvre de fiction conservée à ce jour dans l'histoire du cinéma en Algérie». Interprété par des acteurs et des figurants algériens, le film sans dialogues est tourné à Tolga, dans l'actuelle wilaya de Biskra. Les principaux rôles sont tenus par Himoud Brahimi (Cheikh Ali) et Djamel Chanderli (son fils Mansour). Leur travail est l'écurage des puits bouchés de sable et de boue. L'histoire du film rappelée par Abdennour Zahzah est simple.
Elle est racontée par une voix off, sur la musique composée par un grand artiste algérien : Mohamed Iguerbouchene. «Les habitants d'une oasis font face à l'assèchement de leur fontaine. Le sage de la tribu, Cheikh Messaoud fait appel aux plongeurs du désert. Leur intervention est nécessaire pour la survie de l'oasis et de ses habitants. Après le nettoyage du puits, l'eau recommence à couler. Des années après, la machine arrive. Elle fait le travail. C'est l'effet de la modernité. On ne fait plus appel à Cheikh Ali et son fils. C'est la fin du métier des plongeurs du désert». Produit en 1952, Les plongeurs du désert ne sera pas diffusé par les services français du cinéma. L'œuvre a été mal accueillie et mal perçue, parce qu'elle est la première du genre à être produite, financée, tournée et réalisée uniquement par des Algériens.
Par cette production, Tahar Hannache dérangeait sérieusement les autorités françaises, qui craignaient que des Algériens puissent maîtriser d'une manière professionnelle cette arme dangereuse qu'est le cinéma, interdite jusque-là aux Arabes. Ironie du sort, Les plongeurs du désert sort quelques mois seulement avant le déclenchement de la Révolution algérienne en novembre 1954.
Ce n'était pas étrange, car Tahar Hannache et son neveu Djamel Chanderli seront les précurseurs du cinéma en Algérie. Plus tard, Djamel Chanderli sera le premier cinéaste à rejoindre les services de l'image et du son de l'ALN à Tunis. Avec d'autres cinéastes, il tournera les premières images au maquis. Tahar Hannache restera à la télévision où il formera les futurs techniciens algériens de l'ex-RTA d'après l'indépendance. On retiendra ce témoignage du grand critique et spécialiste du cinéma Ahmed Bedjaoui, qui dira de lui : «Je l'ai connu à la fin de sa vie lorsque j'ai rejoint la RTA en 1969. Je garde de lui l'image d'un homme aimé de ses pairs, discret, affable et toujours disponible».
Tahar Hannache décédera le 1er août 1972, à l'âge de 74 ans, sans jamais penser prendre sa retraite. «Le travail de recherche que j'ai pu réaliser avec l'aide des mes trois sœurs pour faire connaître l'histoire de notre père n'était pas aussi facile, il nous a demandé des années de dur labeur, nous espérons avoir ouvert la voie à d'autres chercheurs pour apporter leur contribution pour faire connaître le parcours de cet homme qui a servi son pays avec bravoure, tout notre souhait est que ses œuvres conservées à la Cinémathèque algérienne soient montrées au grand public, notamment les jeunes générations», lancera Thouria Benazzouz.


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