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Benoit Magimal (Acteur français dans l'Ennemi intime)
« La France a un passé colonial et historique qui dérange... »
Publié dans El Watan le 11 - 02 - 2008

Il est l'initiateur de l'idée du projet du film français L'Ennemi intime, réalisé par Florent-Emilo Siri, avec Patrick Rotman, historien et documentariste. Rencontré à Paris, l'acteur Benoît Magimel a l'aura et la grandeur des gens humbles. Interview d'un ami déclaré !
Propos recueillis à Paris
Le réalisateur Florent-Emilio Siri nous a confié que l'idée de tournage du film L'Ennemi intime venait de vous... Oui ! On avait déjà émis l'envie d'abord de faire un film de guerre avec lui (Florent-Emilio Siri), il y a quelques années. Et puis, j'ai des amis d'enfance d'origine algérienne, à Paris, en France. Je me souviens, j'avais une vingtaine d'année et on avait parlé comme cela sur la Guerre d'Algérie. Mon grand-père l'avait faite. Et depuis lors, je posais des questions sur cette guerre, personne n'avait de réponses, quoi ! C'était un peu l'omerta. Les gens n'arrivaient pas à en parler. A un moment donné, je me suis dit : « Quand même, on devrait faire notre ‘'Guerre du Vietnam”, notre film de guerre. » Et l'Algérie s'est imposée d'elle-même en fait. A l'école et dans les livres d'histoire, il n'y a rien sur la Guerre d'Algérie. Donc, cela a suscité de la curiosité. En fait, ce qui a rendu possible le projet de réalisation du film L'Ennemi intime, c'est ma rencontre avec Patrick Rotman (historien et documentariste). Alors, qu'on passait nos vacances ensemble en famille, je lui avait exprimé le souhait de faire un film sur la Guerre d'Algérie. Il a été surpris, il croyait que c'était un “canular”. Il m'a appris qu'il était passionné par l'histoire de l'Algérie et qu'il avait réalisé le documentaire La guerre sans nom et qu'il préparait un autre L'Ennemi intime, sur le même sujet. Il a tout de suite été séduit par le projet du film L'Ennemi intime et exprimé le vœu de participer à cette belle aventure. Aussi, j'ai proposé un réalisateur : Florent-Emilio Siri. Je les ai fait rencontrer. Et puis, j'ai trouvé un producteur, à l'époque.
Le projet du film datait depuis longtemps...
Oui ! Cela a été un peu chaotique et long. Cela a pris cinq ans en fait, pour le faire. Vous savez, en France, les gens vous disent un tel film, c'est merveilleux. Mais finalement, on se rend compte que cela fait beaucoup plus peur.
Justement, même pour vous, c'était un rôle contre-emploi par rapport à ce que vous aviez fait... C'est un pari risqué ?
Oui, avec un tel film, c'est déjà un risque. Aujourd'hui, les gens ont besoin de se divertir au cinéma. On voulait faire un film de divertissement pour permettre de le voir avec moins de réticence. Par rapport aux autres films plus austères sur la Guerre d'Algérie, il fallait qu'on ait un film très large, visuel, faisant passer l'idée, l”histoire... Aujourd'hui, on est dans un système qui nous oblige à réaliser des films d'une certaine tenue. Si non, c'est extrêmement compliqué.
Vous ne vouliez pas faire un film manichéen, mais avoir un autre regard français sur la guerre... Subjectif...
De toute façon, il y a toujours des contradictions dans les conflits. Parce qu'à un moment donné, on ne sait plus qui est l'ennemi. C'est très compliqué. Déjà, comme vous le dîtes, c'est un point de vue français. Donc, c'est très délicat d'aborder ce genre d'histoire. On ne voulait pas que du côté algérien on dise : “Regardez, ils ( les Français) ont pris parti.” Surtout, être plus juste. Le regard d'un lieutenant à travers un moment parmi d'autres de cette histoire. Parce que tout le monde n'a pas connu la même chose. Il ne fallait pas mentir. Quand vous êtes en 1940, vous savez qui est l'ennemi quoi ! Sincèrement, c'est très clair. Là, je vous parle du point de vue français, on vous dit que vous allez dans un pays qui est la France (Algérie) où on parle une autre langue, avec une autre culture...Et puis, il y a eu la colonisation de plus d'un siècle. C'est très compliqué. Moi, j'ai bien aimé le cinéaste Clint Eastwood retraçant la guerre du Japon. Il réalise deux films, pour avoir deux points de vue. Et cela est formidable. Cela aurait été génial de le faire avec l'Ennemi intime. J'aurais adoré filmer une section du FLN, des résistants...Cela aurait été intéressant. Donc, on ne voulait pas être manichéen, être juste, traiter la vérité telle que l'on pouvait la rendre. C'est vrai que la France a un passé colonial et historique qui dérange. Une amnésie complète. Pour ce que cela aille mieux, il faut parler de ces choses qui gênent et avoir un regard de vérité sur tout cela. C'est pour cela que ce film était nécessaire. Je pense qu'il est important.
Vous campez le rôle du lieutenant Terrien qui est humaniste voulant bousculer l'establishment colonial et qui, par la suite, est rattrapé par l'horreur de la guerre... Une machine de guerre...
Oui, il (lieutenant Terrien) se perd complètement dans la guerre. Ce qu'on veut exprimer dans ce film, c'est que quand on est dans une guerre, on devient son propre ennemi. C'est soi-même ! Ce n'est plus l'autre. Parce qu'on finit par devenir quelqu'un d'autre. Tous les traumatismes qu'a engendrés cette guerre, c'est phénoménal. Mais personne ne veut en parler. Il y a un sentiment de honte. Il existe quelque chose, comme ça d'enterré. Ils sont nombreux les anciens soldats français qui ne sont pas allés voir le film. Mais, il y aussi beaucoup qui l'ont vu. Ce qui est troublant, c'est la jeunesse de ces soldats. Ils avaient à peine 19 ans, ils sortaient de leurs villages, ils ne sont jamais allés nulle part. Et, il arrivent là-bas, en Algérie, où ils sont confrontés à une guerre qui n'est pas la leur. C'est qu'on leur avait menti sur cette guerre. Ils ne savent même plus pourquoi ils se battent ? Aujourd'hui, vous voyez les Américains en Irak. On a lu avec un ami des témoignages d'un soldat américain et celui d'un français. Finalement, c'est le même style de guerre. C'est à dire qu'ils ne savent pas contre qui ils doivent se battre. C'est la population (civils). Il peut y avoir un parallèle contemporain aujourd'hui dans ce type de guérilla (Révolution de Novembre 1954) . Ce n'est pas la grande guerre conventionnelle. La logistique de l'armée française en Algérie était démesurée, bien que l'on sait ce qui s'est passé avec le napalm...Mais on a jamais voulu le raconter.
Justement, la scène du bombardement au napalm est terrible dépassant tout entendement humain...
Pour seulement une quarantaine de combattants algériens, quoi ! C'est-à-dire, on déplace des moyens colossaux pour régler un problème. Et ce qui est bien rendu dans le film, c'est le rapport du soldat français vis-à-vis de cela (le bombardement au napalm). Parce qu'ils sont conscients de l'horreur. A un moment donné, je crois que pour tout être humain, il y a une limite à ne pas franchir. Ce qui fait que ces gens-là, n'ont plus le sens de la réalité. Ils deviennent fous, quoi ! C'est tellement insupportable pour un être humain de voir un spectacle aussi barbare et cruel. Tout d'un coup, vous découvrez que les décisions prises par les politiques sont inhumaines. Les méthodes sont inacceptables. Une contradiction dans le parcours des personnages. Comme le rôle du soldat Dougnac interprété par Albert Dupontel, un vieux brisquard de l'Indochine rencontrant le lieutenant Terrien (Benoît Magimel) venant avec son idéal, sa force de jeunesse, voulant faire une guerre propre tout en respectant l'ennemi. Finalement, ils découvrent que le gouvernement français les a floués. Alors, ils commencent à réfléchir en disant : “Mais oui, peut- être qu'on peut quitter cette guerre et changer de vie”. Faire le choix ! Tout être humain, à un moment donné, a un choix difficile à faire. Après, cela engendre des conséquences. Il s'agissait de filmer les personnages du point de vue humain avec leurs contradictions.
La balle que reçoit le lieutenant Terrien est suicidaire, une délivrance...
Oui ! C'était intéressant de montrer cet espace, la beauté de la nature. On essaie de jouer avec le spectateur et le surprendre. Au début, le rôle de Dupontel devait mourir. Nous avons beaucoup lu sur ces soldats. Tous les soldats qui ont pu vivre des choses terribles sont rentrés chez-eux et puis ils ont eu le besoin de repartir. C'est déjà trop tard, ils sont traumatisés et suicidaires. Je pense que c'est la culpabilité qui les ronge, en fait ! Ont-ils le droit de vivre ? Je me souviens du film Voyage au bout de l'enfer de Michael Cimino, le personnage de Robert De Niro voulait absolument retourner au Vietnam, pour mourir. Cette solitude, ce poids et cette culpabilité... Mesrine est devenu l'ennemi public n°1, parce qu'il a fait la Guerre d'Algérie. Et il avait une quarantaine de morts sur la conscience et lui-même le disait.
Vous verra-t-on un jour en Algérie pour le tournage d'un film ?
J'aimerais beaucoup, bien sûr !
Pas forcément, un film de guerre...
Oui, avec plaisir ! D'abord, je serai vraiment ravi de venir en Algérie, présenter le film l'Ennemi intime. On aurait tellement aimé tourner en Algérie. Un acteur, ça voyage ! Peu importe la nationalité. L'important, c'est un regard, un rôle, un personnage et une rencontre. Si demain, on me propose un beau rôle en Algérie, je viens.


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