En recevant le prix Nobel de littérature à Stockholm, Albert Camus avait eu ces mots tranchants : « Au bout du compte, s'il faut choisir entre la justice et ma mère, je choisis ma mère. » Il venait de faire un choix définitif qui le poursuivra dans l'éternité. Lorsque l'homme est poussé dans ses derniers retranchements, il est rare qu'il soit en possession de toute sa conscience et sa liberté de penser devient une contrainte. Il en est ainsi de cet habitant de Nekmarya qui se posait la question cardinale entre continuer à émarger -malgré les déconvenues de 46 ans d'indépendance- à l'esprit patriotique de Novembre ou changer de direction. Ils sont légions ceux qui vivent depuis si longtemps dans la désillusion. Personne ne les blâmera de le faire en conscience. Car c'est suite à la défection de la conscience collective de Novembre que les lézardes sont apparues. Pourtant, on peut ne pas avoir connu Novembre et préférer la justice à sa mère. Ils sont combien dans ce cas ? Moralité, tout rentrera dans l'ordre quand votre mère aimera la justice. D'où l'insoutenable déprime de cet habitant de Nekmarya, qui attend depuis 46 ans que les promesses de novembre reviennent en juillet. Ils sont très nombreux dans ce cas. Les autres n'osent pas le dire. Ils ne connaissent encore rien de Nekmarya. A part le fait qu'elle donne toujours plus qu'elle ne prend.
