L'Algérie doit améliorer l'efficacité de son système de lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. D'autant que le Groupe d'action financier international (Gafi), instance habilitée à réglementer la lutte contre ce phénomène au niveau international, procédera prochainement à l'évaluation de l'efficacité du système algérien. C'est ce qui ressort de la journée d'information organisée, hier, à Alger, par le site Lkeria.Com conjointement avec le centre de formation PMS, Elnada. Placée sous le thème « lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme », cette rencontre est dédiée aux professionnels du secteur de l'immobilier. Le président du site Lkeria, Lotfi Ramdani, a souligné que malgré le renforcement de l'arsenal juridique et réglementaire à travers les amendements introduits dans la loi 05-01 relative à la prévention et la lutte contre ce phénomène, des efforts supplémentaires sont nécessaires en matière d'application. « Mis à part les établissements financiers qui se sont impliqués pleinement dans cette lutte, les autres secteurs sont à la traîne », a-t-il déploré ajoutant que le secteur de l'immobilier reste le maillon faible de toute la chaîne. Si les banques envoient, en moyenne, une centaine de déclarations de soupçon par année à la cellule de traitement et renseignement financiers (CTRF), du côté des acteurs intervenant dans le secteur immobilier (promoteurs immobiliers, agences immobilières, notaires, avocats...), on enregistre zéro déclaration », a souligné le même intervenant. « Dans ce cadre, l'accent a été mis sur les contraintes qui rendent difficile l'application de certaines dispositions législatives, à l'instar de l'obligation de déclaration de soupçon qui doit, au vu de son caractère confidentiel, être déposée au siège du CTRF à Alger, ce qui constitue une contrainte majeure pour les professionnels installés dans les autres wilayas notamment au sud », a-t-il indiqué. « En 2014, selon les statistiques de la CTRF, seulement sept déclarations de soupçon ont été transmises au parquet », a mentionné Ramdani. Raison pour laquelle un travail de sensibilisation doit se faire pour inciter les acteurs de ce secteur à s'impliquer dans cette lutte, a-t-il préconisé. Cette rencontre s'inscrit d'ailleurs dans cette perspective. Il s'agit, selon lui, « de vulgariser les dispositions législatives et réglementaires encadrant la lutte contre le blanchiment de capitaux. Les agents immobiliers doivent savoir qu'ils sont protégés par la loi. Même si leur déclaration de soupçon n'est pas fondée, ils ne risquent aucune poursuite judiciaire ». Toutefois, la loi 05-01 prévoit dans son article 35 des amendes allant oscillant de 1.000.000 à 10.000.000 DA contre « tout assujetti qui s'abstient, sciemment et en connaissance de cause, d'établir et/ou de transmettre la déclaration de soupçon sans préjudice de peines plus graves et toute autre sanction disciplinaire ». L'amende peut aller jusqu'à 20.000.000 DA si les assujettis portent, sciemment, à la connaissance des mis en cause l'existence de la déclaration de soupçon. Cette rencontre a été également l'occasion de débattre de la problématique liée à l'importance des moyens à mobiliser par certaines catégories d'assujettis. « Si les institutions bancaires et financières disposent de moyens financiers adéquats, les fonctions libérales et les sociétés de personnes physiques ne disposent pas des mêmes moyens », a-t-il affirmé, ajoutant que les banques ont fortement investi en achetant des solutions de filtrage qui coûtent plus de 500.000 euros par solution. 80% des transactions immobilières passent par l'informel Le président de la Fédération des agences immobilière, Abdelhakim Aouidat, a fait observer que 80% des transactions immobilières passent par le canal informel. Il a indiqué que la lutte contre le blanchiment d'argent ne peut porter ses fruits si le secteur de l'immobilier n'est pas assaini. « Il est impératif, a-t-il recommandé, d'imposer à ce que toute transaction immobilière passe par une agence agréée », affirmant qu'aucune déclaration de soupçon n'a émané des acteurs de ce secteur.