La tournée effectuée, depuis samedi dernier, par « La caravane des ksour », organisée par l'Office de gestion et d'exploitation des biens culturels, sous l'égide de la wilaya d'Ouargla et la wilaya déléguée de Touggourt, à travers les ksour, a jeté la lumière sur l'étendue de la dégradation des sites et monuments. Pour sensibiliser contre le mal qui ronge cet héritage identitaire d'une inestimable valeur, une journée d'étude sur la « problématique de l'approche par rapport aux monuments historiques a été animée, mardi dernier, dans la commune de Tibesbest, relevant de la circonscription de Touggourt. Plusieurs participants, universitaires, archéologues, étudiants, autorités locales, représentants d'institutions publiques œuvrant dans le patrimoine (Capterre, ANSS) ont pris part à cette rencontre. Professeur d'architecture à l'Université Mohamed-Khider de Biskra, M. Saouli a mis en exergue le rôle fondamental devant échoir au mouvement associatif et la participation citoyenne dans les opérations de restauration, protection et mise en valeur du patrimoine dans sa dimension matériel ou immatériel. « Cette mission ne relève pas uniquement des pouvoirs publics quand bien même leur rôle est primordial », dit-il en soutenant que la mobilisation de la société civile débouchera inéluctablement sur une dynamique qui aiderait à mettre en exergue la valeur identitaire, culturelle, économique et sociale au sein de la société locale. Pour ce faire, l'universitaire appelle à un partenariat entre les associations, les collectivités locales et les institutions que ce soit au niveau local ou national. « Les associations devraient constituer une force de pression et de proposition pour peser sur les décisions et la législation concernant le patrimoine » explique-t-il, en indiquant que cette position aiderait le mouvement associatif à constituer également une force de contrôle pour assurer la prise en charge du patrimoine. M. Saouli suggère, dans ce sens, aux associations, de travailler sur plusieurs dimensions, locale, régionale, nationale voire internationale en citant l'exemple de la National Trust, une association britannique qui assure la gestion et l'exploitation de 90% du patrimoine de la Grande-Bretagne. Forte de ses 67.000 membres (Architectes, restaurateurs, archéologues, juristes...) elle constitue une force fondamentale dans tout ce qui touche au patrimoine du pays. En Algérie, le mouvement associatif a connu, selon lui, un certain développement grâce l'évolution législative qui a permis le développement des associations œuvrant dans tous les domaines (70.000 associations, dont plus de 900 à vocation nationale, ont été enregistrées en 2010). Concernant le patrimoine culturel, l'architecte assure que la loi 98 04 sur le patrimoine a donné l'importance au mouvement associatif qui jouit désormais d'un rôle essentiel dans l'intervention sur des biens culturel. « Par exemple, les associations peuvent se constituer en partie civile pour ester en justice les auteurs d'une infraction au patrimoine », indique-t-il. Son collègue du même département, Rachid Djebnoune, a placé le côté technique dans son intervention sur les « obstacles relatifs à la réalisation efficace de la restauration des monuments historiques ». Arguments en main, il dénonce vigoureusement les opérations de « façade » et de « replâtrage » de plusieurs bureaux d'études œuvrant dans la restauration des biens culturels. « Nous faisons dans le maquillage du bâti » déplore-t-il, en appelant à l'introduction des sciences, chimie, hydrologie et géologie, pour une restauration de meilleure qualité. Il ajoute que les autorités publiques ont déployé des moyens appréciables pour la restauration de ces vestiges mais sans que cela conduise à un meilleur entretien. Raison pour laquelle, le conférencier insiste sur la sensibilisation des intervenants au sujet de la valeur civilisationnelle des sites et monuments archéologiques. Biens classés Pour sa part, le représentant de la direction de la culture de la wilaya de Ouargla a fait savoir que des projets de classement de 59 sites et monuments historiques ont été réalisés en 2009. Les seuls biens qui ont été classés par l'ANSS (Agence nationale des secteurs sauvegardés) comme secteurs sauvegardés sont la vieille ville d'Ouargla qui englobe le ksar, ainsi que le ksar de Temacine. Concernant le patrimoine immatériel, il dira que la direction de la culture a classé 21 Ziaras dans les Zouias, 10 jeux traditionnels et un précieux recueil de poésie populaire.Le représentant de la ville de Tibesbest a mis en garde contre la détérioration du ksar de la ville construit dans la seconde moitié du XVIe siècle et qui abrite la célèbre Zaouia de Ragouba. « Ce ksar qui vibre au quotidien au rythme de la vie publique locale a perdu pratiquement deux tiers de sa superficie », déplore-il en appelant les autorités locales à mettre fin à la marginalisation de cet héritage. Il faut notamment aider la création d'un office local pour le tourisme dans l'espoir de faire sortir de l'ombre cette ville historique.