Richesse ■ La 5e édition du salon national du tapis s'est ouverte mardi à la maison de la culture Ali-Souaï en présence d'artisans venus de plusieurs wilayas du pays. L'objectif visé est de mettre en valeur un des produits les plus représentatifs du patrimoine matériel du pays. Placée cette année sous le slogan «pour la préservation de l'authenticité», cette manifestation représente une belle opportunité pour les contacts et les échanges d'expériences entre artisans de divers horizons, ont souligné les organisateurs. Dès l'ouverture du salon, de nombreux citoyens, souvent en famille, se sont rendus à la maison de la culture Ali-Souaï pour découvrir (ou redécouvrir) le savoir-faire authentique de tisserands et de tisserandes de différentes régions de l'Algérie profonde. Le tapis de Babar de la wilaya de Khenchela représente par ses motifs, ses couleurs et sa texture particulière, un patrimoine typique qui pérennise la pure tradition de la tapisserie d'art des Aurès. Ce tapis dont la renommée a dépassé les frontières du pays, figure désormais sur la carte de visite culturelle de la wilaya de Khenchela. Selon des tisserands de la localité de Babar, une commune distante de 30 km de Khenchela, ce tapis se distingue par sa palette particulière de couleurs, sa texture délicate et ses motifs représentant généralement des bijoux dont notamment la «khlala» (genre de broche), mais aussi des lances, des épées ou des croissants lesquels, ajoutent-ils, ont en commun d'être de «bon présage». Le tissage se fait sur le métier à tisser localement appelé «Seddaya» et fait appel à un outillage approprié comprenant notamment Lekhlala qui est un peigne en acier servant à tasser les fils de laine. Le tissage proprement dit est précédé, de plusieurs phases de préparation de la laine incluant son cardage au moyen du «Kardech» (carde constituée de deux plaques en bois menues de plusieurs rangées d'aiguilles en fer et tenues par une poignée).Dans la phase de filage, la laine est transformée en fils à l'aide du «Maghzel» (genre de quenouille). Les couleurs dominantes de ce tapis sont le rouge, le noir et le jaune qui composent les divers motifs hérités d'une génération à une autre et parfois au sein d'une même famille, au point que certains modèles portent des noms de familles connues de la localité. Ces couleurs sont obtenues, par l'utilisation de colorants naturels à base de «mélanges savants» de végétaux dont le henné, la peau de grenade et l'écorce de noyer (swak). Vient ensuite le moment d'installer le métier à tisser, composé de deux planches épaisses, horizontalement parallèles et soutenues par deux autres planches parallèles disposées verticalement. Le tapis fabriqué ici pèse entre 30 et 50 kg en fonction de ses dimensions. Dans cette localité, dit-on, chaque foyer doit posséder un tapis que l'on déroule lors des grandes occasions, des fêtes ou lorsqu'on reçoit des hôtes distingués. La tradition orale locale fait remonter les origines de ce tapis à l'arrivée dans la région des tribus des Beni Hilal. Un des anciens modèles du tapis de Babar, se singularisant par de superbes motifs et par l'agencement de ses couleurs, est conservé au musée du Louvre, à Paris (France). Un morceau de tapis retrouvé dans la ville de Fostat, en Egypte, à la suite de fouilles archéologiques, présente des similitudes frappantes avec le tapis maghrébin en général. Par bonheur, le tissage traditionnel dans la wilaya de Khenchela présente depuis quelques années des signes de relance favorisés par les dispositifs d'aide aux artisans, contribuant ainsi à la préservation de ce patrimoine.