«Djaballah est une victime. Nous sommes touchés par son appel. Mais la direction de notre parti est toujours là. Il aurait été préférable pour lui d'appeler le pouvoir à réhabiliter les anciens du FIS avant de les appeler à rejoindre son parti.» Cette réplique, confiée par l'ancien chef terroriste Ali Benhadjar à nos confrères d'El-Khabar, en dit long sur les intentions de ce qu'on appelle communément les «anciens du FIS». Ou plutôt ce qui en reste.Depuis que la justice algérienne a décidé – a tort ou à raison, le débat n'est pas tranché – de dissoudre le Front islamique du salut, en 1992, les dirigeants de ce parti qui a participé, d'une manière ou d'une autre, aux malheurs de l'Algérie, sont dispersés. Ou les a-t-on crus ainsi. Il n'est resté sur la scène, comme une éternelle provocation, que le tonitruant Ali Benhadj, capable à lui seul de mobiliser une brigade de policiers pour l'extraire d'une mosquée. L'ancien imam reste, malgré lui, l'incarnation de ce qui reste de ce parti qui avait marié, dans ses discours, religion et violence. Il n'est pas seul le baroudeur de Kouba, celui qui avait mis son treillis militaire pour aller demander à l'homme fort de l'époque, Khaled Nezzar, des armes pour aller combattre en Irak.Hormis ceux qui sont morts, l'essentiel de l'encadrement de l'ancien parti dissous est donc mobilisable. En majorité exilées, des têtes pensantes sont toujours en embuscade, même à des milliers de kilomètres d'Alger. C'est le cas de Anouar Haddam. Cet ancien membre du conseil consultatif, qui ne figurait pourtant pas dans le premier cycle des chefs islamistes, exilé aux Etats-Unis, est surtout connu pour avoir revendiqué et salué l'attentat du boulevard Amirouche qui avait coûté la vie à des dizaines de citoyens. Ce physicien de renom a continué à faire du bruit à partir des Etats-Unis. Un de ses «hauts faits d'armes» est la signature, en 1995, du Contrat de Sant'Egidio. Il y a quelques jours, l'homme a confié à des confrères son mal du pays. Il veut rentrer.Contrairement à Haddam, Rabah Kébir, qui a présidé des années durant le Conseil exécutif du FIS à l'étranger, a réalisé son «rêve» de rentrer au pays. C'était en 2006. L'enfant de Skikda n'est pas resté longtemps en Algérie. De retour dans son exil allemand, Rabah Kébir ne désespère pas de rentrer au pays et de reprendre l'activité politique. Un autre groupe d'anciens responsables du FIS, dont Mourad D'hina, a créé une connexion avec des mécontents du régime, dont l'ancien militaire Samraoui et l'ancien diplomate Zeitout. Ils ont fondé, à Londres, un mouvement nommé Rachad. Il s'appuie surtout sur les chaînes satellitaires arabes pour passer des communiqués.L'ancien président du Front islamique du salut, lui, est dans une sorte de pré-retraite. Exilé, dès sa sortie de prison en 2003, à Kuala Lumpur, en Malaisie, puis à Dubaï, Abassi Madani se contente de quelques déclarations conjoncturelles. La dernière, publiée il y a tout juste quelques jours, est cosignée avec son éternel adjoint, Ali Benhadj. Elle dénonce l'exclusion dont ils font l'objet dans la nouvelle loi sur les partis politiques. Une loi qui leur interdit de pratiquer de la politique. D'autres têtes, plus ou moins connues, se contentent de sorties médiatiques. Tandis que d'autres, qui étaient pourtant au premier plan au début des années 1990, se sont totalement éclipsées. C'est le cas, par exemple, de Ahmed Merani qui, après s'être intégré dans le gouvernement comme ministre des Affaires religieuses au milieu des années 1990, s'est complètement effacé de la scène.Ne restent sur la scène médiatique nationale que d'anciens dirigeants de la branche armée de l'ancien parti islamiste. On y trouve Benhadjar, Madani Mezrag ou encore Abdelhak Layada. Ces derniers, chefs terroristes, repentis après la Concorde civile en 2000, se sont reconvertis dans les affaires. Pas seulement, puisqu'ils gardent un œil bienveillant sur la scène politique. On ne sait jamais… A. B.