Sans une profonde révolution du secteur public, aucune espèce de réforme n'est réellement possible : ni l'assainissement de la sphère informelle, ni l'amélioration du cadre de vie et encore moins la relance d'une économie nationale moribonde. Celà, le nouveau Premier ministre le sait et le défend dans le plan d'action -qu'il présente aujourd'hui mardi devant les députés- et le Forum des chefs d'entreprises le lui a encore rappelé, hier par la voix de son président, Réda Hamiani. «Le nouveau gouvernement est sur la bonne voie mais nous n'en sommes qu'aux annonces. Nous attendons la mise en application sur le terrain», a prudemment estimé le chef du patronat en rappelant que l'un des maux de l'Algérie - peut-être le plus profond, en tout cas le plus pernicieux- réside dans son Administration très particulière, dont l'inertie et la paralysie freinent toute velléité de développement et d'évolution.Le simple citoyen-administré est confronté tous les jours à ses lourdeurs, ses files d'attente; le jeune porteur de projet en dénonce les portes fermés et l'absence d'écoute et l'investisseur préfère désormais placer ses finances ailleurs, dans des régions du monde où les mécanismes administratifs sont plus fluides et l'environnement plus sûr. Les fréquentes querelles entre les administrés et les agents d'administration, la faiblesse de la création de microentreprises viables et concurrentielles, le refus des opérateurs économiques de prendre le risque industriel et les lourds retards supportés par les projets de développement témoignent suffisamment de la nuisance de la bureaucratie algérienne. Abdelmalek Sellal a, donc, eu raison d'inscrire la réhabilitation du service public parmi les priorités de son agenda et de vouloir remettre l'Administration à sa place, à savoir au service du citoyen : «C'est fondamental si on veut gagner la confiance des citoyens», estime-t-il, à juste titre. La question est de savoir si le nouveau Premier ministre réussira la difficile gageure de vaincre et soumettre cette Administration, pervertie par des décennies de fâcheux réflexes, et amener les fonctionnaires à revoir l'idée -forcément erronée- qu'ils se font du service public. Plus que toute autre action, la réforme du service public est probablement celle qui donnera le plus de fil à retordre au nouveau gouvernement. S. O. A.