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Dans la peau des exilées
La Tribu des gonzesses de Tierno Monénembo
Publié dans La Tribune le 05 - 06 - 2008

écrivain important des nouvelles écritures africaines, Tierno Monénembo, romancier de Guinée, signe avec la Tribu des gonzesses sa première pièce de théâtre. le désordre traverse l'œuvre de cet écrivain très connu pour l'originalité et l'exigence de son travail littéraire et très réputé pour son style ironique et corrosif, et inscrit, d'emblée, sa pièce, dans un dérèglement qui a pour lieu l'exil. En puisant dans le vécu de femmes terrassées par l'exil, les innommables déchirements, tout simplement par les choses de la vie parisienne qui ne sont pas systématiquement en rose, l'écho se fait douleur et tiraillement, et la peur et l'angoisse planent comme pour dire la menace et la grossièreté qui menacent l'étranger sur ce bout de terre qui attise les feux du départ, quitte à vaincre la monstrueuse houle de la Méditerranée. Non pas simple proie de Le pen mais aussi proie des siens, comme le dit Ayenga dans une réplique «c'est drôle, on est donc plus proche de son bourreau que de l'inconnu du pôle nord». A méditer la mise en exergue, fragment de Jean Cocteau, choisi par l'auteur de Peuls, «dans une pièce moderne, le casse-tête me semble de faire un grand jeu et de rester un peintre fidèle d'une société à la dérive», l'essence même de ce travail y trouve la forme et la conception de cet art et aide à saisir ce qui se cache dans les méandres de la pièce, signalons-le, il traduit la douloureuse question des exils, lesquels ne cessent de frapper l'Afrique de plein fouet.
Dans un espace clos, le salon d'un vieil appartement parisien du genre que l'on squatte, situé quelque part dans le ventre des quartiers des étrangers, Barbes ou Stalingrad, et dans un décor africain, des femmes bavardent de la vie, de tout et de rien. A travers cette conversation arrosée de koutoukoutou et du placali, des itinéraires se dessinent les personnages, qui se révèlent à la lumière du dialogue. C'est chez Eyenga, couturière, considérée comme la confidente et la mère de fortune, que d'autres femmes se réunissent et se confessent en polémiquant, à l'exemple de Zenzie et d'Okassa qui ne cessent de se jeter des propos malsains et quelque part contradictoires, l'une voulant une carte de séjour et l'autre cherchant un mari blanc. Penda, la femme de rue, la plus lucide d'entre elles, dit simplement sa dure et double réalité d'exilée et de pute ; Sia, la femme de ménage qui veut s'enrichir et repartir dans son village, choisit son mari ; Nélé Gallée, étudiante, et Madame Scarano, une Française voisine de Eyenga par laquelle on découvre le discours raciste et maléfique de ceux qui clament égalité, fraternité et liberté dont le sens des mots n'est qu'un masque d'une couche épaisse de haine et de stéréotypes, abandonnée par son mari, qui n'aime pas les Nègres mais les Négresses, quitte sa femme pour aller vivre avec une Antillaise. Ce qui attise et accentue cette vaine haine, car, à la fin, il s'est avéré que cette dame est aussi étrangère, une Italienne. Kesso, une jolie petite fille élevée chez Ayenga, cette dernière est amoureuse de son père et n'osa pas le dire jusqu'à la découverte de sordides histoires. C'est l'agenda tant cherché par elle que des questions trouvent réponses et des éclaircissements. Ayenga insiste et pose au détour de chaque question l'ombre de ce cahier raturé et griffonné par Samba et ce, jusqu'au jour où Ayenga le découvre chez Nélé amputé d'une page, d'une date, le 31 mai. Penda, prostituée de profession, prend la parole et clame haut les bribes de souvenirs de Samba, et des visages se crispent et s'interrogent, toutes les femmes sont tombées dans les rets de Samba (sacré Samba, il nous aura toutes possédées ! dit Okassa), sauf Penda et Ayenga, la femme qu'il a aimée et qui attend son retour afin de fonder une famille. C'est à travers ces personnages que les masques tombent, et l'identité véritable des exilés se révèle, le rapport avec soi, le corps par exemple, leurs rapports avec le pays natal, le pays d'accueil, la morosité du quotidien et la puanteur des coups bas infligés non seulement par ceux qui considéraient dans le cercle étroit de la communauté les autres, mais aussi par les siens. Les préoccupations des exilés fusent et nous embarquent dans un enfer sans couleur, dans les dédales d'une vie faite de malheur et de douleur. Du côté de chez Tati où chaque mardi les files se rallongent, dans les sombres cercles de communautés où le regard ne peut que scruter douloureusement les tristes recoins d'un chemin épineux. Très détaillée et empreint d'un réalisme, cette pièce laisse apparaître un quotidien peu commode et difficile de simples gens partis quêter le bonheur sous d'autres cieux, chassés par la grisaille du ciel de leur propre pays où la joie n'est qu'une chimère sans plus. Tierno Monénembo nous offre une fresque d'une douloureuse existence sans tomber dans la facilité du discours, il pénètre un espace intime qu'il décrit avec talent et beaucoup de finesse, dont la structure signifie combien il est difficile d'écrire tout comme vivre dans la peau de l'une des exilées. Ecrire n'est-il pas déjà un exil ?
A. L.


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