L'ordonnance portant levée de l'état d'urgence a été adoptée à une écrasante majorité par les deux chambres du Parlement, moins d'un mois après son adoption en Conseil des ministres. Le Conseil des ministres avait adopté, le 22 février dernier, le projet d'ordonnance abrogeant le décret législatif du 6 février 1993 portant prorogation de l'état d'urgence institué par décret présidentiel du 9 février 1992. L'ordonnance n° 11-01 du 23 février 2011 portant levée de l'état d'urgence a été publiée au Journal officiel n°12. En effet, le Conseil de la Nation a adopté, hier, à l'unanimité l'ordonnance portant levée de l'état d'urgence, en même temps que deux autres ordonnances, lors d'une séance plénière présidée par Abdelkader Bensalah, président du conseil. Les deux autres textes adoptés sont l'ordonnance complétant celle de 1966 portant code de procédure pénale ainsi que l'ordonnance relative à la participation de l'Armée nationale populaire (ANP) à des missions de sauvegarde de l'ordre public hors des situations d'exception. La loi portant approbation de l'ordonnance relative au code de procédure pénale prévoit également "l'adaptation du code de procédure pénale aux exigences de la lutte antiterroriste". Le rapport relève à cet effet "la prise en charge de certaines catégories d'inculpés et l'équilibre entre l'efficacité de la lutte antiterroriste et le respect des droits de l'Homme, en introduisant une nouvelle mesure en matière de contrôle judiciaire dans les affaires de terrorisme et des actes de subversion". Cette disposition consiste à "placer l'inculpé dans une résidence protégée fixée par le juge d'instruction conformément à la Constitution et aux conventions internationales paraphées par l'Algérie". Quant à la loi portant approbation de l'ordonnance relative à la participation de l'ANP à la sauvegarde de l'ordre public hors des situations d'exception, elle vise, "la mise en place d'un cadre juridique à même de permettre à l'armée de poursuivre sa mission de protection de l'Etat et ses institutions et d'assurer la sécurité des citoyens, notamment contre le terrorisme et les actes de subversion". L'Assemblée populaire nationale (APN) avait fait de même dimanche dernier. Les députés de deux formations politiques (RCD et FNA) n'avaient pas voté le texte, ayant décidé de geler leur participation aux activités parlementaires. La mesure avait suscité des réactions mitigées de la classe politique. Le Rassemblement national démocratique (RND) avait exprimé sa "grande satisfaction" de voir cette décision rapidement arrêtée par le président de la République, estimant qu'elle "confirme le respect par l'Etat de ses engagements". Le RND a considéré que la levée de l'état d'urgence "est annonciatrice du rétablissement de la stabilité et de la sécurité dans le pays", tout en mettant en évidence la nécessité de "rester vigilant et de faire face à toute menace terroriste". De son côté, le Mouvement de la société pour la paix (MSP) a considéré la levée de l'état d'urgence comme "un important pas franchi sur la voie des réformes", affirmant que l'Etat aura ainsi "honoré ses engagements dans tous les domaines". Par contre, pour le secrétaire général du Mouvement El Islah, Djamel Ben Abdessalam, les décisions prises sont "insuffisantes et ne répondent pas aux aspirations du peuple algérien à un changement réel". Quant au Parti des travailleurs (PT), il pense que la décision de lever l'état d'urgence devrait impliquer "la levée de toutes les restrictions sur les libertés et l'exercice de la politique". Cette formation a affirmé, toutefois, que la mesure "confirme le retour progressif de la paix dans le pays et cela doit signifier l'ouverture d'une nouvelle ère favorable à la construction d'une démocratie véritable". De son côté, le Mouvement Ennahda, qui a salué la décision, a cependant exprimé son inquiétude de voir les lois devant régir cette décision remplacées par d'autres "plus restrictives des libertés individuelles sous couvert de la lutte contre le terrorisme", selon ce parti. Au niveau international, les réactions étaient dans l'ensemble favorables, dont celle des Etats-Unis d'Amérique qui ont salué la décision, la qualifiant notamment d'"étape positive". Dans son rapport, la commission des affaires juridiques, administratives et des libertés de l'APN avait jugé que la levée de l'état d'urgence "confirme la détermination de l'Etat à poursuivre les réformes multiformes ainsi que le processus du développement durable et de prendre en charge les préoccupations des citoyens à travers les grands projets réalisés et ceux inscrits au programme quinquennal 2010-2014". R.N.