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L'impossible deuil
Le café d'Yilka de Cécile Oumhani
Publié dans Le Midi Libre le 28 - 08 - 2008

Dans son dernier roman, l'écrivaine amoureuse des belles lettres se penche sur la question des disparitions sans retour des périodes de guerre et du deuil que les proches des disparus sont incapables de faire. Une écriture sobre en souligne le propos.
Dans son dernier roman, l'écrivaine amoureuse des belles lettres se penche sur la question des disparitions sans retour des périodes de guerre et du deuil que les proches des disparus sont incapables de faire. Une écriture sobre en souligne le propos.
Inspirée par sa rencontre avec une jeune femme triste à l'aéroport de Budapest, Cécile Oumhani narre le calvaire de Emina et Alija, deux enfants jetés sur les routes de l'exode par la guerre de Bosnie, parmi des centaines de milliers d'autres.
Confiée par leur mère Yilka à leur voisine Marija qui les fait passer pour siens, les deux enfants sont recueillis par la sœur de leur voisine le temps pour leurs parents de les rejoindre. Mais voilà, le couple, dont Edin l'époux est dans un camp, ne les rejoindra jamais. Des années plus tard, alors qu'ils ont appris à vivre en Allemagne chez une cousine de leur mère, Emina décide de faire le chemin inverse vers Petovo, la ville de leur enfance quittée sous les bombardements. Les deux enfants devenus jeunes gens n'ont jamais accepté l'idée de la mort de leurs parents. Ils ont toujours guetté leur retour, d'un foyer d'accueil à l'autre. Jamais ils n'ont réellement posé leurs valises en attente de l'instant où les leurs viendraient les reprendre.
La narratrice s'introduit dans l'intériorité amère d'Emina qui dès le début du malheur qui s'abat sur sa communauté confie à son journal ses états d'âme. Hantée par la voix de sa mère qui l'appelle dans la nuit, Emina a du mal à reconstituer son visage. «Le bras de sa mère soulève la petite casserole de cuivre où elle fait le café du matin. Elle voit l'avant-bras sortir de la manche brodée qui retombe…. Lisse, doux, si doux. Et puis plus rien. Seule l'odeur du café du matin lui revient. Le reste a disparu. Gommé, évanoui… Des tonnes d'heures l'ont enseveli sous la poussière. (….) la voix d'Yilka , sa mère… A-t-elle cessé d'appeler sa fille ? Elle entrevoit un pan de sa robe lilas. Une vision qui s'attarde dans un jardin mouillé… Parce qu'au-delà de sa mémoire, Yilka fait peut-être encore le café du matin dans une cuisine quelque part à la surface de cette terre….»
De retour en Bosnie, elle se rend chez son oncle maternel Feti et sa femme Selma, où elle réalise que ce qui l'amène est un espoir fou. Toutes ses recherches restent vaines et ne servent qu'à la désespérer plus. En effet, elle rend visite aux femmes qui sont restées, aux hommes qui ont été emprisonnés comme son père. Les rescapées ont toutes été violées. On lui montre des photos de charniers… Elle connaît une sorte d'apaisement lorsque son cousin Baki l'amène dans une zaouiya de la confrérie des Bekhtachia, où est enterré un voyageur juif du 19 ème siècle. «Regarde cet endroit tranquille, l'arbre qui a poussé contre sa tombe. Qui sait où les siens l'ont cherché ? Si même ils ont pu le retrouver ?» l'interroge Baki.
«Emina inspire profondément l'air soulevé par la brise à l'intérieur du Tekké. Elle pense à cette tombe, à ceux qui ont accompagné l'inconnu, même s'il était venu d'ailleurs. Derviche ou simple voyageur, qu'importe.»
Revenue dans sa ville pour y découvrir la trace de ses parents, Emina y rencontre une forme d'apaisement qui lui permettra peut-être d'être heureuse malgré le gouffre béant que la guerre a creusé dans son être.
Le roman admirablement construit et écrit dans une prose épurée à la tonalité grave est d'une grande beauté. Son rythme tranquille, comme celui des saisons permet au lecteur de regarder l'horreur en face. La guerre vécue par les enfants y est décrite dans son absurdité. Emina s'accroche à son journal, son petit frère à son chat. C'est en hurlant qu'il le quitte pour partir. Des personnages dignes et généreux traversent ce roman qui ne larmoie jamais. Avec sobriété l'auteure s'attache à dépasser le monde des apparences pour brancher le lecteur sur l'indicible. Cécile Oumhani, âgée de 52 ans est franco-britanno-tunisienne. Elle a grandi en Occident et a découvert la Tunisie à l'âge adulte. On la dit héritière de la sensibilité artistique de sa mère qui est l'artiste-peintre écossaise Madeleine Vigné-Philip. «Agrégée d'anglais, Cécile Oumhani a consacré son Doctorat d'études britanniques à Lawrence Durrell. Elle est maître de conférences à l'Université de Paris 12. Ce n'est sans doute pas par hasard si elle a choisi de consacrer sa thèse à un écrivain dont l'œuvre est ancrée dans le monde méditerranéen. Auteur de plusieurs recueils de poèmes, de nouvelles et de romans, son écriture finit toujours par trouver son ancrage en terre méditerranéenne. Et pourtant son univers d'écriture pour être méditerranéen n'en est pas moins le lieu d'un questionnement qui est celui de l'homme dans une perspective plus large», peut-on lire dans une biographie rédigée par l'auteure elle-même. A découvrir absolument.
K.T.
Le café d'YIlka, éd. Elyzad, 2008
123 pages, prix public : 600,00 DA.
Inspirée par sa rencontre avec une jeune femme triste à l'aéroport de Budapest, Cécile Oumhani narre le calvaire de Emina et Alija, deux enfants jetés sur les routes de l'exode par la guerre de Bosnie, parmi des centaines de milliers d'autres.
Confiée par leur mère Yilka à leur voisine Marija qui les fait passer pour siens, les deux enfants sont recueillis par la sœur de leur voisine le temps pour leurs parents de les rejoindre. Mais voilà, le couple, dont Edin l'époux est dans un camp, ne les rejoindra jamais. Des années plus tard, alors qu'ils ont appris à vivre en Allemagne chez une cousine de leur mère, Emina décide de faire le chemin inverse vers Petovo, la ville de leur enfance quittée sous les bombardements. Les deux enfants devenus jeunes gens n'ont jamais accepté l'idée de la mort de leurs parents. Ils ont toujours guetté leur retour, d'un foyer d'accueil à l'autre. Jamais ils n'ont réellement posé leurs valises en attente de l'instant où les leurs viendraient les reprendre.
La narratrice s'introduit dans l'intériorité amère d'Emina qui dès le début du malheur qui s'abat sur sa communauté confie à son journal ses états d'âme. Hantée par la voix de sa mère qui l'appelle dans la nuit, Emina a du mal à reconstituer son visage. «Le bras de sa mère soulève la petite casserole de cuivre où elle fait le café du matin. Elle voit l'avant-bras sortir de la manche brodée qui retombe…. Lisse, doux, si doux. Et puis plus rien. Seule l'odeur du café du matin lui revient. Le reste a disparu. Gommé, évanoui… Des tonnes d'heures l'ont enseveli sous la poussière. (….) la voix d'Yilka , sa mère… A-t-elle cessé d'appeler sa fille ? Elle entrevoit un pan de sa robe lilas. Une vision qui s'attarde dans un jardin mouillé… Parce qu'au-delà de sa mémoire, Yilka fait peut-être encore le café du matin dans une cuisine quelque part à la surface de cette terre….»
De retour en Bosnie, elle se rend chez son oncle maternel Feti et sa femme Selma, où elle réalise que ce qui l'amène est un espoir fou. Toutes ses recherches restent vaines et ne servent qu'à la désespérer plus. En effet, elle rend visite aux femmes qui sont restées, aux hommes qui ont été emprisonnés comme son père. Les rescapées ont toutes été violées. On lui montre des photos de charniers… Elle connaît une sorte d'apaisement lorsque son cousin Baki l'amène dans une zaouiya de la confrérie des Bekhtachia, où est enterré un voyageur juif du 19 ème siècle. «Regarde cet endroit tranquille, l'arbre qui a poussé contre sa tombe. Qui sait où les siens l'ont cherché ? Si même ils ont pu le retrouver ?» l'interroge Baki.
«Emina inspire profondément l'air soulevé par la brise à l'intérieur du Tekké. Elle pense à cette tombe, à ceux qui ont accompagné l'inconnu, même s'il était venu d'ailleurs. Derviche ou simple voyageur, qu'importe.»
Revenue dans sa ville pour y découvrir la trace de ses parents, Emina y rencontre une forme d'apaisement qui lui permettra peut-être d'être heureuse malgré le gouffre béant que la guerre a creusé dans son être.
Le roman admirablement construit et écrit dans une prose épurée à la tonalité grave est d'une grande beauté. Son rythme tranquille, comme celui des saisons permet au lecteur de regarder l'horreur en face. La guerre vécue par les enfants y est décrite dans son absurdité. Emina s'accroche à son journal, son petit frère à son chat. C'est en hurlant qu'il le quitte pour partir. Des personnages dignes et généreux traversent ce roman qui ne larmoie jamais. Avec sobriété l'auteure s'attache à dépasser le monde des apparences pour brancher le lecteur sur l'indicible. Cécile Oumhani, âgée de 52 ans est franco-britanno-tunisienne. Elle a grandi en Occident et a découvert la Tunisie à l'âge adulte. On la dit héritière de la sensibilité artistique de sa mère qui est l'artiste-peintre écossaise Madeleine Vigné-Philip. «Agrégée d'anglais, Cécile Oumhani a consacré son Doctorat d'études britanniques à Lawrence Durrell. Elle est maître de conférences à l'Université de Paris 12. Ce n'est sans doute pas par hasard si elle a choisi de consacrer sa thèse à un écrivain dont l'œuvre est ancrée dans le monde méditerranéen. Auteur de plusieurs recueils de poèmes, de nouvelles et de romans, son écriture finit toujours par trouver son ancrage en terre méditerranéenne. Et pourtant son univers d'écriture pour être méditerranéen n'en est pas moins le lieu d'un questionnement qui est celui de l'homme dans une perspective plus large», peut-on lire dans une biographie rédigée par l'auteure elle-même. A découvrir absolument.
K.T.
Le café d'YIlka, éd. Elyzad, 2008
123 pages, prix public : 600,00 DA.


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