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L'économie algérienne face à la pandémie de Covid-19
Publié dans Le Soir d'Algérie le 30 - 04 - 2020


Par M. Miloudi Boubaker(*)
L'apparition soudaine de la pandémie de Covid-19 à travers le monde a bouleversé la communauté internationale, non pas par le caractère imprévisible de l'entreprise humaine, mais cette fois-ci pour des raisons naturelles qui restent cependant à vérifier. L'Algérie, à l'instar des autres nations, n'a pas échappé à cette pandémie de Covid-19 qui est une crise sanitaire doublée d'une crise conjoncturelle et structurelle de l'économie du pays.
En attendant un vaccin, les décideurs n'ont trouvé comme moyen de lutte que le confinement total adopté par la Chine et qui a donné des résultats satisfaisants.
La problématique qui se pose consiste à chercher, d'un côté, un équilibre entre le confinement total qui bloque les activités économiques, dont les conséquences immédiates sont les pertes d'emplois, et de l'autre le confinement partiel qui va ralentir davantage l'économie du pays, et prolonger la période de confinement.
Cette pandémie due au Covid-19 se répand rapidement, forçant ainsi l'arrêt brutal des économies. Le spectre du chômage de masse réapparaît à travers le monde et dans notre pays.
L'objectif recherché serait d'éviter les licenciements et de maintenir les entreprises en activité pour permettre le redémarrage immédiat de l'économie après le confinement.
Nous allons d'abord examiner les chiffres avancés par les organisations internationales, rechercher les actions à entreprendre pour sauver notre économie dans la phase actuelle et par la suite réfléchir à une stratégie de développement appropriée.
D'après les experts du BIT (Bureau international du travail), à la fin du confinement, il pourrait y avoir plus de 25 millions de chômeurs supplémentaires à travers le monde. Pour l'économiste Paul Krugman, prix Nobel, l'Amérique du Nord (Etats-Unis) enregistre à l'heure actuelle plus de 22 millions qui sont inscrits au chômage, et ces chiffres sont en progression continue ! Selon les experts du Pnud, la crise du Covid-19 va impacter les économies des pays à travers le monde. Donc cette crise sanitaire sera aussi sociale et surtout économique, dévastatrice, au cours des mois à venir.
Les conséquences économiques de cette crise sont alarmantes, les experts en estiment les pertes à 220 milliards de dollars dans les pays en voie de développement et près de la moitié des emplois pourraient être perdus en Afrique !
Ces pertes se répercutent sur toutes les sociétés, affectant l'éducation, la sécurité alimentaire de base et surtout les systèmes de santé fragilisés par cette crise sanitaire de grande ampleur.
Dans la phase actuelle, les gouvernements ont réagi rapidement.
En Europe, ils essaient d'empêcher les licenciements et les faillites des entreprises en espérant que le confinement ne va pas dépasser les deux mois. Pour eux, il s'agit de préserver le tissu productif afin de sauvegarder les emplois. En Italie, par exemple, le gouvernement accepte d'assumer l'ensemble des secteurs en difficulté (transport, tourisme, etc.) et de permettre aux entreprises de préserver au maximum leurs trésoreries (reporter les dépenses de cotisations, de TVA ou d'impôts).
Par ailleurs, il s'agit de garantir, sans limites, des prêts aux entreprises pour éviter les crises de liquidités. D'autres Etats en Europe vont annoncer également des aides au chômage partiel afin de protéger les emplois. D'après les chiffres publiés, le gouvernement français a dégagé, à cet effet, une enveloppe plus de 20 milliards d'euros pour les entreprises qui rencontrent des difficultés ou une baisse d'activité, c'est-à-dire le salarié reçoit 80% de son salaire net et l'employeur est indemnisé à 100%.
Comme en Belgique, en Angleterre, les Etats interviennent rapidement et dont l'objectif est de protéger les emplois en dégageant un budget conséquent pour aider les entreprises en difficulté afin de ne pas licencier leurs employés.
Pour les Espagnols, le confinement d'un mois est équivalent à 400 000 emplois perdus. De même pour les Français, un mois de confinement dû au Covid-19 entraîne 6 points en moins de croissance du PIB. Tous ces chiffres nous permettent de mesurer l'ampleur considérable de cette pandémie à travers les économies mondiales avec son lot de chômage de masse.
Quelles sont les conséquences de cette pandémie aux plans sanitaire, économique et social pour notre pays ?
Malgré un système de santé fragilisé et saturé, laissé dans cet état par les anciens décideurs, dès le départ, le gouvernement a pris des mesures exceptionnelles en dégageant un budget de 100 millions de dollars pour endiguer l'épidémie. A l'heure actuelle, les autorités du pays semblent maîtriser la situation en espérant, avec l'aide du Bon Dieu, que la maladie virale ne va pas évoluer !
À l'instar des autres pays, l'Algérie expérimente l'hydroxo-chloroquine avec un antibiotique, l'arythromycine, administré au début de la maladie qui, nous l'espérons, donnera des résultats satisfaisants. Sur le plan économique, l'expansion de cette pandémie a atteint toutes les wilayas. Elle va entraîner un bouleversement en chaîne de l'économie du pays. Ainsi les premières mesures de confinement sont instaurées et entraînent de facto la fermeture de nombreux secteurs d'activité.
Tous les secteurs des services (cafés, restaurants, transports, habillement, tourisme) sont à l'arrêt total. Les règles sanitaires ont conduit un nombre d'entreprises et d'artisans à observer la suspension de leur fonctionnement. Les commerces de gros également, éloignés des centres urbains, ont affecté le commerce de détail d'une manière partielle. Le secteur tertiaire occupe une place majeure dans l'économie du pays. Il intervient entre 45 à 50% environ dans la valeur ajoutée. Dans le secteur industriel, les autorités du pays ont indiqué que quelques entreprises essaient d'augmenter leurs capacités de production en se concentrant sur celles des produits les plus demandés dans cette conjoncture difficile.
Des mesures fiscales ont été prises au profit des entreprises comme le report des déclarations fiscales. Ces mesures sont encourageantes mais insuffisantes devant l'ampleur des dégâts.
Il faut penser aux franges les plus fragiles de la population qui n'ont pas de revenus comme les ouvriers et autres qui ne sont pas affiliés à la Sécurité sociale. Pour eux, le confinement est synonyme d'absence de revenu et ils tombent dans la misère parce qu'ils ne peuvent pas nourrir leurs familles.
Il faut souligner que cette crise sanitaire peut avoir des répercussions différentes d'un secteur à un autre. Cette précarité à laquelle il faut trouver une solution !
Il faut souligner, suivant les statistiques établies, que 56% des jeunes travaillent dans l'informel, soit plus de 6 millions de personnes. Le secteur informel est énorme dans notre pays, c'est là où il faut prendre en considération le poids des travailleurs indépendants qui pratiquent une activité aléatoire. Par ailleurs, les indicateurs montrent que le secteur agricole est moins dégradé, ce qui est un point positif.
Actuellement, beaucoup de secteurs sont durement touchés, un ensemble de facteurs convergent tous à la mise en difficulté de l'ensemble du secteur productif créateur d'emplois et de richesse.
Il ne faut pas oublier que le compte courant en Algérie est déficitaire d'une manière structurelle, c'est-à-dire la monnaie quitte le pays, comme les déficits sont persistants et à long terme, ce qui montre que la plupart de nos industries sont vétustes et manquent de compétitivité. Ainsi l'onde de choc de la pandémie fait vaciller l'économie algérienne. L'Algérie va entrer de plain-pied en récession, c'est-à-dire un ralentissement de l'activité économique qui conduira à une dépression.
Cette dernière se traduit par la baisse du revenu national et par une augmentation du chômage.
C'est pourquoi le gouvernement doit agir rapidement sur plusieurs axes. D'abord estimer l'ampleur des dégâts occasionnés par cette épidémie sanitaire, ensuite évaluer les pertes dues à la baisse du prix du pétrole.
Nous avons estimé entre 4 et 6 milliards de pertes pour un mois de confinement et les pertes dues à la baisse du prix du pétrole entre 12 et 15 milliards de dollars.
Beaucoup d'observateurs pensent que la période de confinement sera étalée sur un minimum de deux mois.
A cet effet, nous avons donc deux hypothèses :
H1- une perte estimée à 20 milliards de dollars ;
H2- une perte estimée à 27 milliards de dollars.
A ces pertes il faut ajouter le déficit budgétaire prévu par la loi de finances initiale pour 2020, élaborée par le précèdent gouvernement et qui s'élève à 12% du PIB, soit 20 milliards de dollars !
Pour faire face à l'évolution drastique de cette perte, il faut mettre en place un fonds de solidarité nationale (FSN) où tous les Algériens doivent participer pour compenser les pertes dues à la crise sanitaire et à la diminution des prix des hydrocarbures.
Il faut importer uniquement les produits essentiels comme les inputs et autres produits prioritaires afin de réduire les importations, non pas de 30%, mais jusqu'à 50% et surtout de lutter contre la surfacturation !
Pour alimenter le budget de l'Etat, le prélèvement excessif de l'impôt est déconseillé parce que trop d'impôts tue l'impôt, suivant la courbe de Laffer, indiquant qu'à partir d'un certain taux la fiscalité freine les incitations au travail et à l'investissement. Il faut beaucoup plus d'incitations volontaires en faisant appel à plus de solidarité comme dans le confinement total dans la wilaya de Blida.
Cependant, ces mesures restent insuffisantes et comme la volonté politique existe, il faut que l'Etat donne des gages significatifs au peuple pour qu'il puisse participer à l'effort demandé.
Dans la phase actuelle nous préconisons que le gouvernement adopte une politique conjoncturelle qui peut être avant tout une politique contracyclique pour soutenir l'activité économique. Cette politique peut servir en quelque sorte, en utilisant le concept d'actualité, «d'amortisseur» pour l'économie du pays afin de contrebalancer les effets négatifs de la double crise.
Il peut mener une politique de relance qui passe par une politique budgétaire expansive en augmentant les dépenses d'une manière rationnelle. Elle peut provoquer l'inflation en même temps diminuer le chômage ce qui entraîne la recherche de l'équilibre entre ces deux concepts (courbe de Phillips).
Le gouvernement peut disposer de plusieurs instruments comme l'allocation des ressources afin de préserver les emplois. Elle permet de diminuer les charges imposées aux entreprises, leur facilitant la production et en créant beaucoup plus de postes d'emploi.
Dans ces conditions, il s'agit de développer la politique de l'offre en rendant le marché de travail plus flexible, en baissant les impôts et en encourageant les industries de substitution à l'importation. Comme conséquence l'offre pourra répondre à la demande et il y aura une croissance économique.
Cette baisse d'impôt permettra d'augmenter le pouvoir d'achat des ménages. Le gouvernement, pour encourager la croissance et éviter le chômage, doit stimuler l'épargne principalement celle des ménages. Cette épargne rend possible l'investissement en fournissant les fonds dont les entreprises ont besoin pour développer davantage leurs activités.
C'est pourquoi nous recommandons vivement des subventions directes qui doivent être versées aux ménages avec des prêts à court terme pour éviter la précarité et en boostant la consommation, l'un des facteurs de la croissance.
Egalement il faut agir sur la politique monétaire en particulier la balance des paiements qui est déficitaire dans notre pays. La balance des paiements est la somme des transactions qu'effectue un pays avec le reste du monde. Elle est la somme du compte courant et du compte des capitaux. Pour réduire le déficit de la balance des paiements, il faut agir sur deux axes :
Il s'agit d'instaurer une politique d'inversion des dépenses qui se traduit par des surcoûts sur les dépenses de l'importation (augmentation des tarifs douaniers) et de provoquer une baisse du taux de change par une dévaluation, ce qui entraîne une diminution du taux d'intérêt d'emprunt et donc une hausse de la demande de la monnaie ; en revanche, la baisse du taux d'intérêt peut conduire à une inflation qui est un élément perturbateur de l'économie qu'on peut combattre d'une part.
D'autre part, l'Etat peut réduite les dépenses à tous les niveaux et diminuer ses propres dépenses (celles considérées comme superflues), baisser les dépenses publiques, y compris les salaires et autres avantages des hauts responsables en incluant ceux des députés et sénateurs, qui sont des gages significatifs de bonne volonté vis-à-vis du peuple.
Cette politique de réduction des dépenses permettra de libérer une certaine capacité financière qui peut être utilisée dans des secteurs productifs. Cette politique donnera à l'Etat les moyens de surmonter cette crise économique et de relancer l'économie. Aussi faut-il, dans une autre phase, une fois que la période de confinement sera levée, étudier, d'une manière rationnelle, l'utilisation des réserves de change restantes ou faut-il attendre qu'elles s'épuisent rapidement ?
D'autres solutions peuvent exister comme la création d'un fonds souverain avec une somme au départ de 10 milliards de dollars à prélever sur les réserves de change (environ 60 milliards de dollars). Il permettrait d'acquérir des unités industrielles dans le monde et dont la production compensera une part des importations, là où les pays développés seront en récession.
Egalement l'Etat peut emprunter jusqu'à trois fois la somme déposée sur les marchés financiers avec un faible taux parce que les réserves de change existantes garantissent aux créanciers la solvabilité de l'Algérie. Cet emprunt servira d'investissement dans des secteurs productifs créateurs de richesse dans le pays. Avec la mobilisation optimale des ressources disponibles internes et externes, le pays surmontera cette double crise sanitaire et conjoncturelle, mais surtout d'entreprendre à moyen et long termes les transformations structurelles nécessaires pour construire les fondements d'une véritable économie nationale, c'est-à-dire celle qui peut assurer durablement la croissance et la compétitivité.
Dans ces conditions, il s'agit d'accroître les possibilités de production en orientant les activités vers des secteurs bénéficiant des progrès récents comme le numérique et autres. Et de mettre en place les outils nécessaires comme : une autorité de régulation dont le rôle est de maintenir durablement le système économique qui assure la croissance et le progrès.
Ainsi les transformations profondes des structures de l'économie, qui seront engagées, donneront une économie plus adaptée aux évolutions du marché moderne et où l'Algérie ne sera plus dépendante des recettes des hydrocarbures.
Pour terminer, nous tenons à rendre hommage au corps médical et à tous ceux et celles qui sont au front pour lutter contre cette pandémie de Covid-19.
M. B.
(*) Professeur à l'Université d'Alger 3.


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