Tunis, Mohamed Kettou Faillite économique, situation sanitaire préoccupante, chômage en accroissement continu. Autant de problèmes parmi tant d'autres non moins graves qui sont , depuis plusieurs jours, occultés par une affaire survenue subitement, au palais présidentiel de Carthage, à savoir celle du colis «empoisonné». En effet, cette affaire fait, depuis mercredi dernier, de l'ombre à toutes les activités, voire à tous les événements qui font la vie politique, économique et sociale en Tunisie. Cela a été interprété comme un attentat à la vie du président de la République. Le communiqué de la présidence péchait par son manque de précision et par un déficit de communication, selon de nombreux politiciens et observateurs. C'est le cheminement de l'enquête qui est, particulièrement, mis en cause. Dans une institution comme la présidence de la République, peut-on laisser filer une correspondance douteuse pour qu'elle arrive au bureau de la cheffe du cabinet du Président ? Où sont les services de sécurité devant être les premiers à prévenir de tels désagréments ? Ces questions reviennent sur toutes les langues qui, d'ailleurs, ne saisissent pas encore le sens du retard enregistré dans l'annonce de cette affaire. Pourquoi la présidence de la République a attendu 48 heures pour annoncer la réception du colis ? Des questions qui restent encore sans réponse. Sauf que le colis était arrivé la veille du passage des nouveaux ministres devant le Parlement. Le Président attendait-il le résultat du vote parlementaire qu'il souhaitait négatif, pour arrêter sa stratégie ? C'est là l'une des interprétations que d'aucuns ont avancées pour expliquer au citoyen lambda les dessous d'une affaire élevée au rang de «trahison» par un ancien ministre. Pour le parti Tayar Echeaab qui emploie les mêmes termes, l'envoi d'un tel colis est une tentative de conduire le pays vers la violence. Pour d'autres tel le député du parti Qalb Tounes, Iyadh Elloumi, il s'agit d'un mensonge. «C'est un scandale inventé par la présidence de la République», a commenté ce député. Comme soutiens, il a trouvé certains de ses collègues au Parlement qui ont franchi le Rubicon pour appeler à la destitution pure et simple du chef de l'Etat, en l'accusant, comme le dit le député Khairi, de «mener le pays vers la guerre civile». D'autres, après avoir pris connaissance des résultats des analyses, se demandent comment la cheffe du cabinet, en manipulant le colis, s'est évanouie et perdu la vision alors que ces analyses ont prouvé l'inexistence de produits toxiques. A tort ou à raison, les auteurs de ces questions ont trouvé l'ouïe auprès de la masse, elle-même désorientée par le communiqué de la présidence de la République. Aujourd'hui, qui croire ? Le doute plane. D'autant plus qu'au niveau communicationnel, Carthage brille par un manque flagrant de spécialistes en la matière en faisant un usage exagéré du «complotisme» sans accorder l'attention requise aux contradictions que véhiculent les communiqués de la présidence. Pire encore, pour jeter plus de discrédit au traitement de l'information au palais de Carthage, l'on annonce qu'après manipulation par Mme Nadia Akacha, la lettre «empoisonnée» a été jetée dans une déchiqueteuse avant d'être récupérée pour analyse. Serait-ce un moyen pour faire disparaître la principale preuve de cette affaire ? Beaucoup de points sombres enveloppent ce «célèbre» colis qui finira, sans doute, par avouer ses tenants et ses aboutissants à la justice. Toujours est-il que Kaïs Saïed n'est pas à l'abri, sachant le nombre de ses détracteurs parmi les lobbies qui foisonnent dans le pays et qu'inquiète la détermination du président de la République à lutter contre la corruption. M. K.