Taoufik Makhloufi n'ira pas à Tokyo où il devait prendre part aux Olympiades avec l'intention de rééditer son exploit de Rio de Janeiro, il y a cinq ans. Un «forfait» programmé, en définitive, le natif de Souk-Ahras n'ayant fait que très peu d'apparitions depuis les JO de 2016. Cette décision a surpris plus d'un, l'athlète devant prendre un vol de Qatar Airways Alger-Doha-Tokyo au milieu de l'après-midi. Si personne à la fédération et au COA, dont des membres devaient procéder aux formalités de départ au Japon de quelques athlètes algériens dont Makhloufi, n'était parvenu à contacter le spécialiste du 800 m et du 1 500 m, ce dernier tenait à s'exprimer à travers un communiqué dans lequel il motive son absence par «une blessure contractée au genou». «J'ai longtemps essayé de repousser l'échéance pour prendre une décision finale. Malheureusement, je ne pourrai pas embarquer avec mes compatriotes qualifiés, auxquels je souhaite la réussite, vers le Japon ce 26 juillet 2021. Je me trouve contraint d'écouter mon corps et ce genou récalcitrant qui a longtemps perturbé ma préparation, tout comme la Covid-19 que j'ai contractée l'année passée», écrit Makhloufi dans son communiqué. Déçu de ne pas pouvoir honorer ses engagements et ses promesses, Makhloufi anticipe sur les éventuelles mauvaises langues qui viendront l'accuser d'avoir manqué ce rendez-vous pour d'autres raisons. «Comme vous le savez, toutes et tous, depuis des années maintenant, j'essaie de donner le meilleur de moi pour représenter dignement l'Algérie. Depuis les Jeux Olympiques de Londres 2012 aux Championnats du monde de Doha 2019 en passant par les Olympiades de Rio 2016, j'ai pu connaître des moments de gloire et une joie immense. Ces instants, vous les avez partagés avec moi comme si c'était les vôtres», fait-il rappeler. Lui qui note qu'«être à la hauteur des attentes n'est pas toujours chose facile, surtout pour porter les espoirs d'un peuple aussi formidable que le nôtre. Je sais que vous comptiez sur moi pour briller aux JO-2020 de Tokyo. J'aurais aimé entretenir la flamme olympique pour qu'elle ne s'éteigne pas pour la troisième édition de suite. Mais, parallèlement aux espérances et à l'ambition, chez un sportif, il y a aussi la forme athlétique et les défaillances. J'aurais tant aimé suivre mon cœur qui m'incite à courir avec la chasuble de l'Algérie, courir pour vous et essayer d'aller accrocher une nouvelle médaille pour mon peuple. Mais j'ai préféré ne pas vous donner de faux espoirs parce que mon amour pour vous et l'Algérie est vrai et sincère», se lamente encore le champion algérien dont certaines «mauvaises langues» assuraient que son forfait était prévisible dès lors que le COA avait choisi le boxeur Flissi et la nageuse Melih comme porte-drapeau de l'Algérie lors de la cérémonie d'ouverture de ces Olympiades. Makhloufi terminera son texte par une dernière confession : «Il n'est pas évident d'être à la hauteur quand la forme athlétique ne suit pas. J'ai passé plusieurs tests. Ils n'étaient pas concluants. Ne pas être dans les temps habituels à l'entraînement est frustrant pour un coureur. Mais ma frustration aurait été plus grande si j'avais couru pour revenir les mains vides du Japon.» Puis, une dernière promesse, celle d'une participation XXL aux JM d'Oran et aux Mondiaux, en 2022. «Je vous promets d'essayer de revenir plus fort pour les rendez-vous qui se profilent. Il y aura les Jeux méditerranéens 2022, chez nous, à Oran qui me tiennent à cœur ainsi que les Mondiaux 2022 aux Etats-Unis», a-t-il conclu. Un communiqué pour s'expliquer... C'est la seconde fois que le champion algérien informe ses fans et ses responsables par voie de communiqué. Il y a deux années, en pleine tourmente, suite aux révélations faites par les médias français sur une prétendue affaire d'une perquisition de la chambre de Taoufik Makhloufi à l'INSEP par les gendarmes de l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP) qui auraient permis de trouver des seringues, des produits utilisés pour des injections et des perfusions et des documents personnels appartenant à l'athlète algérien, ce dernier a publié un communiqué dans lequel il dénonçait «une campagne calomnieuse» contre «un champion propre». Cette réaction prompte du demi-fondiste algérien avait à cette période suscité la curiosité de certains et l'indignation de beaucoup d'Algériens qui ont perçu ces attaques de la presse française comme un moyen de tenir l'image d'un des symboles du pays. Dans son communiqué rapporté par l'APS, canal officiel de l'information en Algérie, Makhloufi étayait son innocence en révélant qu'il «possède un passeport biologique depuis des années» et qu'il est «régulièrement contrôlé, à l'instar de tous les champions, par les instances internationales, à savoir la Fédération internationale d'athlétisme (World Athletics) et l'Agence mondiale antidopage (AMA)». Taoufik Makhloufi affirmera ensuite qu'il n'a «jamais fait l'objet d'un contrôle positif», qu'il était «un athlète propre et ce n'est pas aujourd'hui que je vais changer». Concernant les révélations de l'émission de «Stade 2» diffusée par la chaîne publique française, Makhloufi confiera qu'il n'a«jamais touché aux produits dopants tout au long de sa carrière», et de poursuivre : «Toutes les médailles et les victoires remportées lors des grands événements mondiaux l'ont été grâce au travail, à l'abnégation, à la patience et au sacrifice. [...] Je n'ai rien à voir avec cette affaire, je suis serein. C'est une tentative malsaine qui vise à nuire à ma réputation et à l'image d'un champion olympique. [...] Ce n'est pas la première fois que je suis attaqué de la sorte. Ils cherchent à me dénigrer et à me faire du mal. Ils tentent de salir le sport algérien à travers ma personnalité, mais ils n'arriveront jamais à atteindre leur objectif. [...] Cette tentative malsaine, qui n'est pas la première du genre, va me motiver davantage pour pouvoir relever les prochains défis.» Le «harcèlement médiatique» terminé, Makhloufi pensait reprendre sereinement sa préparation. Une préparation onéreuse et qui se fait généralement loin du pays. Seulement, des soucis Makhloufi n'en manquera point. Des soucis financiers qui remettaient en question son planning pour préparer Tokyo, jeux repoussés d'une année à cause de la pandémie du Covid-19, faut-il le rappeler. Mais également d'ordre logistique. Sa préparation en Afrique du Sud pendant l'hiver-printemps 2020 aura été un vrai calvaire. Le pays arc-en-ciel vivait ses pires moments en raison de l'apparition d'un variant qui paralysait toutes les activités. L'athlète âgé alors de 32 ans criait sur la toile son désarroi d'avoir été abandonné par les autorités de son pays au moment où d'autres sportifs, des Français avec lesquels il avait rallié l'Afrique du Sud, mais aussi des Tunisiens qui étaient en stage à Johannesburg et dans d'autres villes sud-africaines, ont été rapatriés. Ce n'est que fin juillet que Taoufik Makhloufi a regagné le pays. Pour s'éclipser définitivement de la scène. Qu'en sera-t-il maintenant ? M. B.