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Abdelkader El Goriassi
Publié dans Le Soir d'Algérie le 30 - 01 - 2012

Des youyous stridents montent en volutes dans l��paisse brume du bidonville de Gorias � El Harrach, entre l�oued et les rails. Zahia, la femme de m�nage, vient de mettre au monde un gar�on. L�enfant se d�bat, casse tout et, press� de sortir, s�agrippe au cordon, ne le l�che plus puis hargneux attend la suite.
La suite, c�est la rebouteuse qui jette l��ponge dans le seau d�eau, d�go�t�e par l�arriv�e tonitru�e de l�enfant. �a commence mal. Le gar�on s�appellera Abdelkader en souvenir du regrett� mari, un dealer abattu dans le bidonville. Sa m�re originaire du Hodna, son p�re de l�Ouarsenis tous deux descendants de G�tules des Hauts- Plateaux, Abdelkader h�rite donc de g�nes de la transhumance depuis le XIIIe si�cle, l��re des tribus rebelles. Par ses yeux en forme de cauris et sa bouche scrofuleuse (d�j� !), Abdelkader semble dire : �On verra ce qu�on verra !� De z�ro � trois ans, Abdelkader apr�s avoir us� les seins de sa m�re, pousse gr�ce aux sachets de lait puis il est mis � la bouillie et aux p�tes jusqu�� sa sixi�me ann�e. Ses premiers jouets sont un pistolet en plastique ramass� dans la d�charge et les couteaux tra�nant sur la meida. A force de manipulation, il se blesse souvent. Il suce son sang, s�en r�jouit. Quand il fait des b�tises, Zahia sa m�re lui crie fort : �Nechrab demmek.� Le sang, donc, il conna�t. Le malheur d�Abdelkader est qu�il est n� le 5 juillet 1962, date charni�re entre ce qui fut et ce qui ne sera pas.
La sardine, la d�brouille et les copains houmistes
En 1965, � trois ans, il entend en sursautant, les premiers tirs de fusilmitrailleur FM 24-29 � l�occasion du sursaut r�volutionnaire. Il enregistre dans sa m�moire olfactive l�odeur de la poudre, il a vu les balles tra�antes. �a lui servira. En 1968, il a six ans, il va � l��cole dans la baraque du bidonville. L�instituteur �gyptien de la vall�e du Nil lui apprend l�alphabet, la phon�tique et d�j� la mon�tique. Il lui dit �galement comment gr�ce � l��gypte, lui, Abdelkader se trouve l� devant lui. Il saura plus tard, apr�s un match de foot, que c�est l��gypte qui avait lib�r� son p�re. Abdelkader pousse et grandit gr�ce au soleil, � la sardine, la d�brouille et les copains houmistes. Ab�ti, cr�neur et le c�ur comme �a, il entre gaillardement au CEM avec les dogmes de l�imam Kechk et ses kechkoulates nubiennes. C�est l��poque du Festival panafricain, la rue est noire de monde, de plumes et de peaux de l�opard. C�est l�ann�e aussi o� on a interdit � Taos Amrouche de chanter. C��tait en 1969. De 1970 � 1976, Abdelkader grimpe p�niblement les quatre ann�es de CEM Type 800, d�cr�t� par Hoffmann le wali d�Alger construit subrepticement par la DNC/ANP. Entre-temps, autour d�un Conseil de la R�volution �vanescent, Boumedi�ne a saisi le p�trole et l�Alg�rie en un mouvement all�gorique et deux plans quadriennaux. Faut ce qui faut, on ne m�ne pas l�attelage sans saisir les r�nes. Surtout quand l�ensemble est dans le tout FLN et qu�il n�y a pas une opposition d�mocratique organis�e. Apr�s la marche verte de Hassan II, on a battu la France 2-1 gr�ce � Betrouni et � Mekhloufi qui nous a concoct� une belle �quipe nationale sous l��gide de l�arm�e. Commence alors l��re des autorisations de sortie et les bons Sonacome. Abdelkader qui a �t� � l��cole �gyptienne a appris � domestiquer le vent. En fin de CEM, il s��tait d�brouill� un bon Sonacome pour le directeur et une autorisation de sortie du territoire pour le surveillant. Son accession au lyc�e s�est effectu�e les doigts dans le nez. Sans avoir fait ni une addition ni une dict�e au CEM, voil� notre Abdelkader au lyc�e d�El Harrach. Et � El Harrach, une place �a s�arrache. B� Debza ! En 1980, il arrive cahin-caha au baccalaur�at sans inqui�tude ni appr�hension. Il monte � Benak et, contre des bons de gigots de mouton du Souk El Fellah, il obtient les sujets du bac. �a passe ou �a casse ! Il est re�u avec mention. Ne parlant ni l�arabe belbien ni le fran�ais belbien, ne faisant aucune diff�rence entre une racine de navet et une racine carr�e, il investit l�universit� pour une licence de droit. Il veut �tre avocat comme tous les faux moudjahidine exempt�s de CEM, de lyc�e et de bac. Pourquoi eux et pas lui? Il a senti la poudre, il a vu les balles tra�antes, diable ! Tu manges, je mange.
Le journal est vendu seulement � El Harrach, Baraki et Kalitous
Quatre ann�es d�universit� lui donnent des ailes et, nanti d�une licence, option p�nal, il se fait avocat, fraie avec la p�gre et approche Hama Loulou. Nous sommes en 1985, l�ann�e o� il �tait interdit de mettre du linge sur les balcons. Tous les policiers avaient la t�te en l�air, les mains dans les poches. Le champ est libre, les voyous pouvaient s�vir, les responsables se servir. Pendant que G�nisider creusait le trou du m�tro, que Lavalin finissait le Riadh el Fedh, nos banques, par oukases, d�versaient des tonneaux de pr�ts � des malpropres. Trous bancaires oubli�s que le peuple a support�s par des ponctions sur les salaires durant les ann�es noires pour les dirigeants, rouges pour le peuple, vertes pour les islamistes et blanches pour les d�brouillards. Ma�tre Abdelkader n�ayant aucune id�e du spectre, navigue du noir au blanc et du vert au verre �vitant le rouge, lui qui, d�s sa naissance, a bu du sang. On ne la lui fait pas ! Ag� de 30 ans, Ma�tre Abdelkader arrive au portail du lib�ralisme et sent qu�il va se passer quelque chose. Il est n� dans un bidonville. Au lieu d�ouvrir prudemment la porte de la maison Alg�rie, Hamrouche, de bonne foi, ouvre toutes les fen�tres. S�engouffrent alors l�aliz�, le sirocco, le foehn et le mistral. Initi�s, les roublards accaparent les entreprises. Les journaux aux copains, les librairies aux cr�tins, les imprimeries aux malins, l�audiovisuel aux f�lins et � celles qui se font sauter. Les moyens de la culture se retrouvent entre les mains de desperados sans foi ni loi, seul l�argent compte. Ma�tre Abdelkader adopte la devise du moment �koun ma� elouaguef�. Le peuple est � plat. Il �tudie le panorama et, comme font les g�ologues, il cherche le filon. Qu�il trouve : c�est dans la presse qu�il fera. Il cr�e La Cause du Peuple avec l�aide de l�Etat. Le journal en arabe est tir� � 5 000 exemplaires, vendus seulement � El Harrach, Baraki et Kalitous. L� o� il habite. Il met dans sa poche les DEC, le FIS et les petits esprits. Il d�ambule dans la banlieue jusqu�� Baraki, distribuant gadgets et cadeaux, il prend en charge les dialys�s et les prostates, il sucre les diab�tiques. Les �lections sont pour septembre, il faut chauffer le bendir. Le printemps et l��t�, il bat les banlieues d�Alger, il �vite la rue Didouche et les quartiers riches. Il les laisse aux intellectuels et aux d�mocrates, c�est du bidon. Apr�s une derni�re tourn�e, ragaillardi par le petit peuple qui le soutient, il s�avachit dans son bureau d�avocat pour recevoir les notables du FLN, les fonctionnaires en disgr�ce susceptibles de r�appara�tre et les industriels qui cherchent des alliances et qui voient plus loin que le bout de leur nez. Il embrasse tout le monde, deux fois. Il sait que les embrassades sont pour les Alg�riens ce que le parac�tamol est pour la fi�vre. �a r�conforte. Deux semaines avant les �lections, Si Abdelkader El Goriassi comme l�appellent maintenant les gens, s�affuble d�un burnous en poils de chameau, d�un ch�che safran� et dans la main un chapelet pur Mecque. Il p�n�tre dans la mosqu�e Ben Badis sous le regard envieux de la pl�be. En septembre, les �lections ont lieu. T�t le matin, les quartiers pauvres d�ferlent vers les bureaux de vote � El Harrach et Baraki. La rue Michelet, El Mouradia et Hydra dorment encore. Le soir, on apprendra que Si Abdelkader El Goriassi a �t� �lu � la majorit�. Il est d�put� parce qu�en naissant, ses yeux en forme de cauris et sa bouche scrofuleuse semblaient dire : �On verra, ce qu�on verra !� Si Abdelkader El Goriassi ayant tout vu depuis sa naissance s�installe dans un nouveau projet celui d�aller au sommet. Ainsi est l�histoire de Si Abdelkader El Goriassi, ayant chemin� dans les m�andres de la r�publique de Gorias au Gotha : l�Assembl�e nationale. Oy� ! Oy� !
Abderrahmane Zakad, urbaniste-�crivain
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