Très attendu par l'opinion publique, le procès de l'affaire de l'autoroute Est- Ouest est de nouveau reporté. Il a été renvoyé au 26 du mois en cours sur décision du président du tribunal criminel. Un report qui fait suite au retrait des avocats du principal mis en cause dans cette affaire, M. Chani Medjdoub. Abder Bettache - Alger (Le Soir) C'est une véritable bataille procédurale qui a marqué, hier, le procès de l'affaire dite de l'autoroute Est-Ouest. Les avocats de la défense, notamment ceux du principal mis en cause dans cette affaire, en l'occurrence M. Chani Medjdoub, ont créé l'événement tout au long d'une journée très agitée. Les avocats Amine Sidhoum, Zahia Aït Ameur, Mohand Tayeb Belarif, Philippe Penning et William Bourdon ont menacé de se retirer du procès si «les conditions d'un procès équitable et juste ne sont pas réunies». La menace brandie fut aussitôt exécutée. Chani Medjdoub plaide pour la tenue du procès mais, il refuse à ce que le tribunal lui constitue un avocat d'office ou qu'il se fasse assister par un membre de sa famille. La gêne se lit sur le visage du président du tribunal criminel. Que faut-il faire ? Tayeb Hellali discute avec ses deux conseillers et s'adresse à Chani Medjdoub : «Vos avocats se sont retirés du procès. Quelle est votre décision ?» «Ma défense s'est déconstituée. Je respecte sa décision. Moi je veux en finir, cela fait six ans que je n'ai pas vu mes enfants», lâche le principal accusé en sanglots. Le président du tribunal criminel dresse le constat et se retire pour prendre une décision. La cause : en matière criminelle, la présence de l'avocat de la défense est obligatoire. En effet très attendu, le second round du procès de l'affaire de l'autoroute Est-Ouest a déjà débuté il y a quelques jours, notamment lors e la publication du communiqué des avocats de Chani Medjdoub. Les cinq avocats signataires de la déclaration ont demandé à ce que «des conditions minimales doivent être préalablement réunies pour la tenue d'un procès équitable». «L'affaire politisée» Les cinq avocats ont exigé notamment à ce que «l'ensemble des prévenus doivent être régulièrement cités, l'ensemble des témoins y compris ceux demandés par la défense, doivent être régulièrement cités et, au besoin, amenés à comparaître y compris par la force publique, l'ensemble des preuves, pièces et documents sur lesquels s'appuie l'accusation doivent être exposés et discutés à l'audience, que les débats doivent être intégralement transcrits à l'audience et que la durée des débats doit être préalablement déterminée compte tenu de la complexité de l'affaire». Les avocats du principal mis en cause, dès le début de l'ouverture du procès, sont passés à l'offensive. Au président du tribunal criminel, ils énumèrent plusieurs «irrégularités ayant entaché l'enquête». Ils citent «les conditions d'arrestation et d'emprisonnement de leur client». Très souvent, les débats ont tourné aux prises de bec entre avocats, comme ce fut le cas entre Amine Sidhoum et Khaled Berghal. Intervenant à la demande du président du tribunal criminel, Chani Medjdoub lâche sa phrase en éclatant en sanglots : «L'affaire a été politisée. A telle enseigne qu'une enquête a été ouverte contre moi au Luxembourg. Toute ma vie et mes comptes ont été passés au crible. Je suis algérien et patriote et personne ne peut douter de mon patriotisme.» Le procès prend une dimension politique. Me Berghel prend la parole et dénonce l'internationalisation de l'affaire par le biais d'avocats étrangers «qui de surcroît attentent aux institutions algériennes, dont la justice et la police judiciaire». Et d'ajouter : «La preuve en est le communiqué signé sous la houlette des avocats étrangers et non algériens dans lequel ils reconnaissent l'internationalisation». Cafouillage. Le président du tribunal tente de calmer les esprits et se retire pour prendre sa décision. «Pas de Français : souveraineté nationale oblige !» Le premier incident d'audience a été enregistré en milieu de journée. C'était lorsque l'avocat de Chani Medjdoub, le Français William Bourdon, avocat au barreau de Paris prit la parole pour présenter ses demandes. Comme ses confrères, il a plaidé la nullité de la procédure et l'abandon des poursuites pour les mêmes arguments avancés dans la matinée. Le président du tribunal criminel lui demande de parler en arabe. Ce qu'il ne peut faire. Il insiste mais Hellali campe sur sa position : «Vous êtes le bienvenu, mais c'est une question de souveraineté. En France, on ne plaide pas en arabe.» Me Bourdon fait appel à un des traducteurs présents dans la salle. La tension monte d'un cran, lorsque Me Sidhoum dira qu'«il a eu une fiche médicale et non pas un certificat médical qui prouve que Chani a été soumis à un médecin. Les procès-verbaux de la PJ ne font pas mention que tous les moyens ont été mis à sa disposition pour contacter sa famille. On lui a rédigé une fiche médicale où on peut lire RAS. Il a été présenté au procureur de Bir-Mourad-Raïs qui a déclaré son incompétence et renvoyé à 3h du matin devant le juge d'instruction du pôle spécialisé de Sidi M'hamed». Il n'en demeure que le report sous huitaine du procès permettra, sans aucun doute, aux différentes parties d'affûter encore davantage leurs armes.