On ne prend pas grand risque de se tromper en affirmant de prime abord que toutes les lois en vigueur relatives aux hydrocarbures sont la r�sultante de situations �videntes de d�tresse : formalis�es en temps de vaches maigres elles ont toutes vocation � assouplir les conditions d'acc�s du capital �tranger dans la prospection et l'exploitation de cette richesse. En for�ant le trait, on peut les comparer � des lois �conomiques d'exception ou d'urgence durables. Ce faisant, elles t�moignent toutes de notre volont� d'accompagner la vague, plut�t que de s'ent�ter � l'enfermement pr�conis� par les "souverainistes", sans trop d'arguments, ni de convictions d'ailleurs. Il s'agit, la plupart du temps, de compenser les pertes de prix par des volumes sup�rieurs d'extraction ; la production alg�rienne de brut �tant naturellement inf�rieure � son quota OPEP. Les adaptations successives de la l�gislation n'auraient jamais �t� envisag�es si le pays n'avait pas connu de restrictions draconiennes dans les conditions qui lui �taient impos�es pour l'obtention des cr�dits ext�rieurs n�cessaires au d�veloppement projet�. Toutes font suite � des crises de liquidit� (et non de solvabilit�). Il y a une raison majeure � cela : les emprunts ayant contribu� � construire l'�conomie alg�rienne sont induits par les seuls revenus, r�els et virtuels, des hydrocarbures et ces revenus garantissent la solvabilit� du pays. N�anmoins leur �volution erratique expose les r�serves de change � des al�as d'autant plus pr�judiciables que, si l'on excepte la courte parenth�se du "reprofilage" par lequel les r�formateurs se sont efforc�s de se maintenir sur les march�s financiers ext�rieurs sans recourir au r��chelonnement et sans ali�ner leur pouvoir souverain de d�cision, � l'exception donc de cette parenth�se, les autorit�s n'ont jamais dispos� d'une r�elle strat�gie de gestion des emprunts ext�rieurs. La loi 86-14 du 19 ao�t 1986 relative aux activit�s de prospection, de recherche, d'exploitation, de transport par canalisations des hydrocarbures n'avait pas d'autre finalit� que de faire face au probl�me de liquidit� g�n�r� par une chute brutale des prix du p�trole enregistr�e une ann�e auparavant, et cons�quemment, des r�serves de change. Elle ne r�ussira cependant pas � la juguler puisque les r�serves officielles de change n'arr�teront pas de fondre jusqu'� atteindre la couverture de moins d'un mois des importations en 1989. Elle poussera n�anmoins les entreprises � recourir elles-m�mes aux march�s financiers ext�rieurs pour couvrir leurs importations, y compris de biens courants, et se procurer les seuls �quipements ou investissements dits "compl�mentaires". C'est � cette occasion que les entreprises s'initieront pour la premi�re fois aux cr�dits documentaires refinanc�s � 12, 15 ou 18 mois, avec pour cons�quences, un accroissement de la part des cr�anciers priv�s , de la dette d�bours�e � taux variable et de la dette � court terme. A l'exp�rience, il s'av�re que l'esprit g�n�ral de la loi n'�tait autre que de transf�rer vers les entreprises et les banques l'initiative (et non la responsabilit�) des financements ext�rieurs. Elle ne fera cependant pas � l'Alg�rie l'�conomie de l'explosion sociale d'octobre 1988 et incitera l'Etat � se d�sengager davantage de la sph�re �conomique. Et, c'est uniquement les caisses vides, que les r�formateurs s'exerceront � leurs formules de "reprofilage". Leurs adversaires, eux, gardaient les yeux riv�s non sur les r�sultats �conomiques mais sur le montant des ressources, sonnantes et tr�buchantes, qu'ils avaient laborieusement r�ussi � se procurer du Cr�dit Lyonnais ou � la faveur de la ligne de cr�dit italienne. La loi 91-21 du 4 d�cembre 1991, modifiant et compl�tant la loi 86-14 que nous venons d'�voquer connut le m�me sort. Comme toujours, les r�gles en vigueur restent du ressort du contrat et r�sultent du seul processus des n�gociations – le mod�le en vigueur �tant "le contrat Getty", du nom de la soci�t� am�ricaine Getty Petroleum Company qui, anticipant les d�veloppements � venir, conclut le 19 octobre 1968 un accord par lequel elle transf�ra au profit de Sonatrach 51% des droits qu'elle poss�dait sur la concession de Rhourde El Baguel et sur le permis du m�me lieu. En mati�re d'intervention des soci�t�s p�troli�res �trang�res, le syst�me juridique alg�rien n'a pas beaucoup �volu�. Il est construit principalement sur le r�gime de l'association sous deux formes : l'association en participation (joint-venture) et le contrat de "partage de production". Dans le premier cas, le partenaire �tranger a droit � une part de la production au champ correspondant au pourcentage de sa participation, moyennant le paiement des co�ts d'exploitation, de la redevance et de l'imp�t p�trolier. Dans le second cas, le partenaire �tranger a droit � une part de la production nette d'imp�t (au titre du remboursement de ses d�penses et d'une r�mun�ration selon les dispositions contractuelles). Les deux formules ont notamment cours dans l'exploitation du gaz naturel. La loi 91-21 du 4 d�cembre 1991 introduit une troisi�me formule de partenariat : la vente au partenaire �tranger d'une partie de la production attendue du gisement, moyennant un "droit d'entr�e" plus important. Par ce biais, le gouvernement Ghozali se proposait d'accro�tre de 20% le taux de r�cup�ration, g�n�rant pour l'Alg�rie des revenus suppl�mentaires de 6 � 8 milliards de dollars d'argent frais pour contourner le r��chelonnement qui se profilait � l'horizon. Sid-Ahmed Ghozali �tait naturellement sinc�re lorsqu'il exhortait la vente "d'une part de Hassi Messaoud pour sortir du cercle infernal de la dette". On ne doutera �galement pas de son patriotisme puisque la vente par anticipation destin�e � relever le taux de r�cup�ration n'avait pas pour corollaire la vente des gisements de p�trole qui demeurent la propri�t� exclusive de la collectivit� nationale, ni des installations d'exploitation. Nul ne peut enfin douter de sa comp�tence ou de celle de son �quipe, notamment dans leur domaine de pr�dilection, mais l'histoire retiendra que la loi de 1991 n'a pas emp�ch� l'Alg�rie d'aller au r��chelonnement et de placer son �conomie et ses actes de gestion sous le strict et �troit "contr�le de performance" du Fonds mon�taire international. Une question se pose alors : n'est-il pas pr�f�rable de l�gif�rer par temps d'aisance que contraint et dans l'urgence ? Cette question est corr�lative � une autre interrogation pertinente : est-il n�cessaire de soumettre au d�bat public des probl�mes de haute technicit� g�n�ralement r�serv�s aux experts ? Ce d�bat reste-t-il possible lorsque le mode de confection des textes prend une trop forte connotation sectorielle qui n'autorise pas les synergies requises avec les autres activit�s crois�es en amont et en aval ? Force est de dire que le probl�me n'est pas tant de livrer aux foules un document inintelligible d'experts que de se surprendre � regretter le "bon vieux temp" du parti unique avec un souci de coh�rence et un sens des responsabilit�s autrement plus marqu�s. On le regrette d'autant qu'il s'agit ici du meilleur usage � faire d'une ressource non renouvelable qui ne pr�sente d'int�r�t r�el que parce qu'elle procure des financements ext�rieurs indispensables au d�veloppement. Plus t�t on le r�alisera, plus seront pertinents nos choix d�veloppementaux.