Agriculture : la vente des moutons de l'Aïd importés débute le 1er mai prochain    Ligue 1 Mobilis (24e J) : le PAC et l'ESS se neutralisent (0-0)    Coupe d'Algérie de basket-ball: victoire du NB Staouéli devant le CRB Dar Beida (83-60)    Journée mondiale de la propriété intellectuelle: poursuite du développement du système législatif et règlementaire en soutien à la créativité et à l'innovation    Ouverture à Alger de la manifestation "Prague rencontre Alger"    Le président de la République rencontre les représentants de la société civile de la wilaya de Béchar    Le président de la République lance le complexe sportif de Béchar    Installation d'une commission multisectorielle chargée de l'élaboration du PNJ 2025-2029    Tunisie: décès de l'ancien président par intérim Fouad Mebazaa    Camps d'été: les inscriptions électroniques se poursuivront jusqu'au 3 mai    Sante: l'Algérie dispose de tous les moyens pour une prise en charge optimale des brûlés    Belhadj prend part à Istanbul à la célébration du 63e anniversaire de la création de la Cour constitutionnelle turque    Agrément à la nomination du nouvel ambassadeur d'Algérie en République de Guinée    Ouverture des inscriptions pour participer à la caravane touristique nationale    Attaf reçu à Helsinki par le président de la République de Finlande    Clôture de la 14e édition du Festival culturel international de musique symphonique    Grande campagne de nettoyage durant ce week-end    Régulation Boursière : la Cosob prend la présidence du Conseil des autorités arabes    Ghaza: le bilan de l'agression génocidaire sioniste s'élève à 51.355 martyrs et 117.248 blessés    Quand les abus menacent la paix mondiale !    La famine se propage..    «Les relations qui ont connu un développement notable doivent évoluer vers une nouvelle étape»    Ooredoo brille lors de la 2e journée de l'ICT Africa Summit 2025    Naissance d'un club sportif du nom du chahid Pr Djilali-Liabes    Des armes de guerre du Sahel et des drogues du Maroc saisies par l'ANP    Manuel de survie pour un régime en sursis    Guerre ouverte contre la violence !    «Ziani va nous rejoindre à la DTN»    Condoléances du président de la République à la famille de la défunte    Une vision prospective claire, selon les experts    L'arbitre de la rencontre USMK-PAC au box des accusés !    Les tombeaux royaux de Numidie proposés au classement ''dès l'année prochaine''    Convergences transcendentalement divergentes entre l'art et la religion    Un programme sportif suspendu    «Construire un front médiatique uni pour défendre l'Algérie»    Hamlaoui présente trois projets d'aide pour les femmes du mouvement associatif    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



LEILA SEBBAR :
�Double appartenance, oui ; double culture, non�
Publié dans Le Soir d'Algérie le 29 - 03 - 2007

Le Soir d�Alg�rie : En tant qu��crivaine, vous semblez vous situer sur une faille � � moins que ce ne soit une passerelle �, celle du rapport franco-alg�rien. Double culture, double appartenance. Richesse ou blessure ?
Le�la Sebbar : Je me situerais plut�t au croisement de l�Occident avec l�Orient, l�Afrique, l�Asie, pour �tre plus pr�cise l�Europe, dont la France, et ses anciennes colonies avec toutes les migrations, les exils que cela suppose et la complexit� des rapports dominants/domin�s , aujourd�hui encore.
Bien s�r, l�Alg�rie, mon pays natal, le pays de mon p�re a la pr�f�rence. Double appartenance, oui, double culture, non. Mon p�re ne m�a pas donn� son histoire, sa religion, sa langue. J�ai d�, et c�est pour cette raison que j��cris, conqu�rir ces savoirs, seule, avec les armes intellectuelles que m�ont donn�es mes p�re et m�re, instituteurs la�ques, gens du livre profane.
L�un des livres les plus importants qui composent votre autobiographie est Je ne parle pas la langue de mon p�re. Cette langue que vous ne parlez pas n�est-elle pas plut�t celle de l��motion ?
L�arabe, la langue de mon p�re que je ne parle pas, que je ne veux pas apprendre comme un simple instrument de communication, cette langue que j�aime entendre sans la comprendre, la langue des femmes arabes alg�riennes, peu nombreuses, de ma courte vie dans l�Alg�rie fran�aise et coloniale, oui, c�est la langue de l��motion. Sans elle, absente mais profonde en moi, je n�aurais pas �crit parce que c�est l�exil de la langue de mon p�re qui me fait �crire.
Vous �tes une �crivaine plut�t prolixe avec un ou deux livres par an. Qu�est-ce qui vous d�mange dans l��criture ?
La publication correspond au rythme de l��dition plus qu�� celui de l��criture. Ce qui est publi� durant la m�me ann�e n�a pas �t� toujours �crit la m�me ann�e. J��cris dans des genres litt�raires diff�rents, ce qui me permet de publier chez des �diteurs diff�rents et � un rythme qui fait croire � une prolixit� qui n�est pas la mienne. Je ne travaille pas au m�me rythme pour un livre collectif d�in�dits sur un th�me que je choisis, qui m�int�resse et qui int�resse aussi d�autres �crivains, que je dirige et auquel je collabore (un � deux ans de travail avant publication) pour un recueil de nouvelles, th�matique ou non, pour un roman ou un r�cit autobiographique.
Vous �tes �galement une organisatrice. Vous avez coordonn� plusieurs ouvrages collectifs. A quel besoin correspond ce partage des �critures ?
Ces livres collectifs d�in�dits d��crivains (je m�adresse toujours � des �crivains parce que je pense qu�un r�cit autobiographique peut avoir une forme litt�raire et c�est ce que je souhaite, pas seulement du t�moignage � l��tat brut) m�int�ressent parce qu�ils explorent une histoire commune � divers �crivains, une histoire d�exil dedans et dehors. Ces r�cits constituent � la fois une m�moire, une histoire singuli�re et collective qui peuvent servir � �clairer l�Histoire. M�ler l�intime et le politique, c�est ce que je fais depuis que j��cris et c�est ce que j�aime faire avec d�autres qui sont, en quelque sorte, mes compagnes dans ces aventures particuli�res.
Vous semblez �tre particuli�rement int�ress�e par le langage de la photo puisque vous avez particip� � la publication de livres de photos de femmes alg�riennes. Quel message souhaitez-vous faire passer � travers ces photos de femmes ?
C�est l�image qui m�int�resse (photos, peinture, dessins�). Parce qu�elle est � la fois repr�sentation et trace. J�ai v�cu ma vie alg�rienne (enfance, adolescence, s�par�e du r�el imm�diat), j�ai pass� les ann�es de la guerre en internat derri�re de hauts murs aveugles� C�est comme si j�avais �t� voil�e. Mais un voile qui laisse un �il ouvert comme l��il d�une cam�ra, d�autant plus agile et aigu qu�il doit para�tre indiff�rent. C�est vrai que les femmes occupent une place privil�gi�e � l�image, les images qui m�inspirent sont habit�es par des femmes, des femmes enferm�es, des femmes en exode avec des enfants (photos de guerre que je d�coupe dans la presse), des femmes voil�es, j�aime les femmes voil�es (comme romanci�re, pas comme citoyenne�), elles me bouleversent toujours.
Le th�me de la femme, et plus particuli�rement de la femme souffrante, est central dans votre �uvre. Est-ce que, selon vous, la souffrance fait partie int�grante de la situation faite aux femmes dans les pays du Maghreb ?
Ce n�est pas du tout �la femme souffrante� qui m�int�resse. Les femmes que je mets en sc�ne sont des femmes en r�volte, en r�sistance (bien s�r contre ce qu�elles subissent, o� qu�elles se trouvent, au Maghreb ou ailleurs). La violence occupe une place importante dans mes histoires : violence coloniale, violence des guerres, violences domestiques et familiales, les femmes et les jeunes filles cherchent � �chapper � ce qui les contraint � la r�signation, la soumission� La fugue dans mes nouvelles et romans est l�une des formes de ces transgressions multiples qui s�expriment en actes ou en paroles. J�aime les rebelles, je leur donne la meilleure place dans mes livres, hommes, femmes, enfants.
Dans votre dernier livre, Les femmes au bain , vous poursuivez la d�fense et l�illustration de la cause des femmes. Vous poussez la porte d�un lieu interdit : le hammam. D�voilement, purification. Le hammam est-il encore aujourd�hui le lieu de l�intimit� f�minine ?
Les femmes au bain, �bain turc�, �bain maure�, �hammam�, le m�me lieu o� se �purifient� les femmes entre elles, c�t� corps, c�t� esprit par la libert� des mots. C�est pour moi un lieu � la fois symbolique et r�el, n�cessaire aux femmes, toutes les femmes. La surveillance patriarcale, sociale, familiale ne s�exerce plus aussi directement (il y a bien quelques vieilles femmes qui veillent � la morale, mais�). Les femmes parlent et se parlent. Sans r�serve, en confiance. Elles disent leurs r�veries, leurs col�res, des secrets dans l�intimit� qu�elles partagent quelques heures durant. Elles se racontent des histoires, vraies ou fausses. Les fables et les contes servent � l�initiation des plus jeunes, attentives aux mots des femmes, m�res, �pouses, amantes, savantes ou illettr�es, aventuri�res ou s�dentaires. Elles �coutent la sc�ne du monde racont� par les femmes, aujourd�hui encore. J�en suis convaincue, bien que je n�aille pas au hammam.
Propos recueillis par Bachir Aggour
�Les femmes au bain� (*)
L��criture de Le�la Sebbar est envo�tante. Sans doute parce qu�elle est proche du c�ur, des mots simples, nets, vifs, un peu �corch�s comme le sont les femmes dont les r�ves et les plaintes couvrent les pages de ses �uvres. Dans Le Bain des femmes, son dernier roman paru chez Bleu autour, elle nous convie � l��coute de l�intime suintant dans la chaleur moite du hammam. Mots et maux de femmes s��gr�nent comme une litanie, tant�t par la bouche de la Bien-aim�e, tant�t par celle de l�Etranger de sang, l�amant emprisonn� sur ordre des fr�res de l�amoureuse. L��criture est gourmande, fluide et bavarde telle la parole de ces femmes qui parlent toutes � la fois, lib�r�es du carcan de l�autorit� des m�les. Les histoires se chevauchent, s�entrecroisent comme dans les souvenirs o� se m�lent le v�cu individuel et les bribes de m�moire collective. De qui parlent-elles ? �Des hommes, �poux, amants (oui amants), p�res et fr�res qui ont d�tourn� l�h�ritage des absents, des s�urs d�biles, des veuves et des orphelins�� Les personnages se bousculent, femmes jeunes ou vieilles, savantes ou illettr�es, folles ou sages, vierges ou courtisanes, saintes ou p�cheresses, orphelines ou filles aim�es, esclaves ou ma�tresses, conteuses, voyantes, saltimbanques, mar�tres� Elles parlent d�amour illicite, adult�re ou saphique, d�amour sublim� ou charnel. Elles questionnent : �Pourquoi cherchent-ils � punir la femme, pour sa beaut� de femme et sa puissance de m�re ? Une haine qui vient de si loin avec une telle force, pourquoi ? (�) Pourquoi cette nuit de noces et de sang, terreur et malheur ?...� Entre rires, chuchotements et confidences, les images du chaos des �ann�es maudites� sont pr�gnantes : �ces hommes-l� ont interdit les bains, douceur et volupt�, les femmes doivent souffrir depuis la naissance jusqu�� la mort, non pas au service de Dieu, au service des hommes, p�re, fr�re, mari (�) au nom d�un Dieu que je ne reconnais pas, il a br�l� les �mes, arr�t� les mots et les vers, d�capit� les corps des r�sistants et des r�sistantes, �ventr�, �gorg�. (�) ils sont n�s de femmes et ils ne sont pas humains.� Ce roman est un hymne � la libert�, un long chant de r�sistance � la n�gation de l�amour. Le�la Sebbar n�a oubli� ni la langue ni la culture de son p�re, qui la rattachent l�une et l�autre � cette longue lign�e de femmes rebelles, illustres ou anonymes. Meriem Nour
* Les Femmes au bain, Le�la Sebbar,
Ed. Bleu autour, sept. 2006

Bio-bibliographie de Le�la Sebbar
Le�la Sebbar est n�e � Aflou, d'un p�re alg�rien et d'une m�re fran�aise, instituteurs. En 1957, son p�re est arr�t� par l�arm�e fran�aise et incarc�r� � Orl�ansville (aujourd�hui Chlef) durant plusieurs mois. Ses p�re et m�re vivent en Alg�rie jusqu�en 1968, puis � Nice. Le�la Sebbar, apr�s une ann�e en classe pr�paratoire (Hypokh�gne) au lyc�e Bugeaud d�Alger, quitte l�Alg�rie en 1961. Elle poursuit des �tudes sup�rieures de lettres � l�universit� d�Aix-en-Provence o� elle passe deux ann�es au cours desquelles elle cr�e, avec des amis �tudiants, la premi�re cin�math�que. En 1963, elle s�installe � Paris, o� elle vit aujourd�hui. Dipl�m�e de l�Education nationale, elle enseigne la litt�rature fran�aise tout en poursuivant son travail de recherche.
Derniers ouvrages parus
C'�tait leur France, en Alg�rie, avant
l'ind�pendance, textes in�dits recueillis
par Le�la Sebbar, Gallimard, 2007.
Le Ravin de la femme sauvage,
Editions Thierry Magnier, 2007.
Mon p�re, textes in�dits recueillis par
Le�la Sebbar, Editions Ch�vre-feuille �toil�e, 2007.
Le�la Sebbar, Emma Belhaj Yahia,
Ma�ssa Bey, Rajae Benchemsi, C�cile
Oumhani. A cinq mains, Elyzad, 2007.
Les Femmes au bain, Bleu autour,
Collection d'un Lieu l'autre, 2006.
L�Habit vert, Editions Thierry Magnier,2006.
Amours rebelles, Bey, Ma�ssa, Sebbar,
Le�la, Traversac, Behja, Ch�vre-feuille �toil�e, 2005.
Val-Nord, fragments de banlieue, texte
de Le�la Sebbar, photographies de Gilles
Larvor, Stock, 1984, Editions Thierry Magnier, 2005.
Alg�riens fr�res de sang: Jean S�nac,
lieux de m�moire, Photographies de Yves
Jeanmougin, texte de Le�la Sebbar, M�tamorphoses, 2005.
Parle mon fils, parle � ta m�re, Stock,
1984, Editions Thierry Magnier, 2005.
Journal de mes Alg�ries en France, Bleu autour, 2005.
Isabelle l�Alg�rien. Nouvelles et r�cits
du Magreb. Dessins de S�bastien Pignon, Al Manar, 2005.
Zizou l'Alg�rien, �ditions ANEP, Alg�rie, 2005.
Mes Alg�ries en France, Carnets de voyage Bleu autour, 2004.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.