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Bachir, au nom du p�re�
Par Mohamed Benchicou
Publié dans Le Soir d'Algérie le 09 - 10 - 2008


Il a fini comme il a v�cu : seul !
Je veux dire dans cette solitude seigneuriale
que seuls connaissent
les grands incompris, les cr�ateurs
tourment�s et les �ternels passionn�s
; une solitude intime, f�conde
et parfaitement invisible pour les
esprits communs qui n�en devinent
ni la douleur, ni la puissance ni
encore moins le privil�ge.
Aussi, � lire, hier, les hommages
�mus qui ont fait �cho � l�annonce
de sa mort, ai-je �t� r�joui d�apprendre
que nous sommes si nombreux
� nous revendiquer de
Bachir Rezzoug mais, h�las, tout
aussi nombreux � lui �tre infid�les.
Evoquer Bachir, un jour, une
larme, c��tait aussi savoir d�o� l�on
vient, se rem�morer nos prestigieuses
filiations, c��tait recenser,
du coup, toutes nos infid�lit�s.
Et s�apercevoir, Dieu, � quel
point nous avons d�m�rit� de nos
exemplaires ascendances !
Si nous avons aujourd�hui si peu
d�estime pour nous-m�mes, n�estce
pas que nous sommes d�pourvus
de panache, ayant brad� celui
de nos p�res ?
N�est-ce pas de s�en �tre interdit
les saveurs qui rendent notre
m�tier si insipide ?
Bachir emporte avec lui une
gr�ce inexplor�e.
Bachir emporte avec lui une
obstination inaccomplie. Une vertu
myst�rieuse.
Et un livre qu�on n�a jamais
ouvert. Bachir a repris une flamme
qui nous reste �trang�re : le journalisme
ind�pendant !
Nous sommes la presse d�sinvolte,
oublieuse de sa grandeur.
Que gagnerions-nous, alors, de
capital, � nous rappeler Bachir ?
Une jouvence d�licieuse : redevenir
amants. Car enfin, avouons-le,
quelle autre fascination nous a
jet�s dans les bras de ce m�tier
que cette illusion, toujours v�rifi�e,
de pouvoir le pratiquer en �ternel
libertin ? Or, c�est pr�cis�ment le
grand tr�sor que nous laisse Bachir
: le journalisme, sur cette terre surtout,
le journalisme est une fabuleuse
impi�t�. Bachir appelle cela
le �devoir d�impertinence�.
Exerc� dans la passion, il lib�re
l�homme de toutes les servitudes et
de toutes les religions, celle de l�argent
comme celle du pouvoir.
C�est la cl� du journalisme ind�pendant.
Mais qui exerce encore ce
m�tier dans la passion ?
A l�heure o� des �ditorialistes �
l��me de m�tayer pr�tent leurs voix
aux sarabandes officielles pour le
troisi�me mandat, la question
n��tait pas superflue.
C�est toutes ces d�rives qui
condamnent le journalisme � ses
yeux, qu�a su s��pargner Bachir :
servitude du pouvoir et de l�argent,
l�obsession de satisfaire les puissants,
l�amputation de la v�rit�
sous un mobile commercial ou
id�ologique, l�adulation, la vulgarit�
Bref, le m�pris de ceux � qui l�on
s�adresse...
Oui, se rappeler Bachir et redevenir
amant.
Amant d�une fascinante profession
toujours inassouvie, de ses
journ�es � s�en tourmenter, de ses
nuits � vouloir s�en d�livrer.
***
La presse de Bachir cherchait �
�clairer plut�t qu�� plaire.
Bachir a utilis� la presse comme
le plus d�mocratique des porte-voix
sans en ali�ner la modernit�.
Il l�a fait pour continuer ceux qui
nous avaient pr�c�d�s.
Pour la m�moire de son p�re,
avocat, communiste, avec lequel il
fut intern� � Theniet-El-Had durant
un an par l�arm�e coloniale.
Il l�a fait pour son village meurtri.
Il �tait l�un des rares � pouvoir
dire comme Camus, �nous
sommes quelques-uns � ne pas
supporter qu�on parle de la mis�re
autrement qu�en connaissance de
cause�.
A son peuple, Bachir avait choisi
d�offrir un autre journalisme que
celui des lampions.
C�est ce qu�il �tait venu dire, �
sa derni�re apparition publique, ce
14 juin 2008 � Tizi-Ouzou, aux centaines
de compatriotes venus
l��couter, le remercier, le consacrer.
Les gens humbles de sa terre, qui
lui ont fait oublier que ses �amis�
n��taient pas l� et qu�ils se r�servent
pour les �loges posthumes.
Ce jour-l�, nous avions d�cid�
de distinguer Bachir Rezzoug.
Pourquoi Bachir ? Parce que
c�est Bachir. Et que dans les terribles
instants de doute et d��garement,
il devient primordial de donner
un nom au p�re inconnu.
Il �tait temps, aujourd�hui, pour
la presse libre de mon pays, sujette
aux d�vergondages, de savoir
qu�elle a un p�re. Oh ! certes, un
p�re parmi quelques autres, mais
un p�re plus que d�autres quand
m�me, sans doute le plus s�ducteur,
peut-�tre le plus passionn�,
certainement le plus l�gitime.
Oui, il �tait temps de se rassurer
sur son pedigree : notre journalisme
est de race !
Il se d�gage encore aujourd�hui,
de chacun de nos journaux, l�odeur
d�un si�cle d�cisif, le regard de Pia,
la col�re de Kateb et le go�t d�un
levain oubli�. Nous ne sommes pas
d�pouill�s d�une �pop�e. Nous
n�avons rien d�une g�n�ration
spontan�e. Nous sommes les
enfants d�une longue chim�re
f�cond�e ; ses continuateurs
d�sarm�s ; ses h�ritiers insouciants.
Je crois que ce jour-l�, au
contact des hommes de son
peuple, Bachir a fini moins seul.
* * *
Le lecteur. Voil� le seul ma�tre.
Bachir nous a laiss� la preuve
qu�on pouvait diriger un journal �
succ�s sans forc�ment le r�duire �
une simple entreprise commerciale
soumise � la loi capitaliste de l�offre
et de la demande. C�est ce qu�il fit
avec l�inoubliable La R�publiqueau
d�but des ann�es 1970, ce quotidien
qui marqua des g�n�rations
d�esprits et qui reste, � ce jour, un
ph�nom�ne in�gal� d�insolence, de
libert� d�esprit et de rigueur professionnelle.
Avec La R�publique,
Bachir a �trenn� le devoir d�impertinence
� l�int�rieur du syst�me du
parti unique ! Et il a r�ussi !
Mais Bachir l�impie nous a laiss�
cette autre d�monstration qui
�branla, en son temps, le mur des
id�es re�ues : fabriquer un journal
populaire sans en faire un instrument
de puissance soumis � la
r�gle totalitaire de la propagande.
Ce fut Alger R�publicain!
L�aventure qui l�aura le plus passionn�.
Et que j�eus le privil�ge de
partager avec lui.
Avec Alger R�publicain, Bachir
tint t�te aux archev�ques de l�orthodoxie
id�ologique ainsi qu�aux
muftis de la presse et de la litt�rature
qui obligeaient d�j� les m�dias
� ne s�int�resser qu�aux th�mes
�vendeurs��
Lui, l�impie, prouva que l�on pouvait
faire du journalisme m�me
avec les choses d�daign�es par
les fetwas et la mode. Le journal
d�joua tous les pronostics des
paroissiens, surpris qu�on e�t pu �
la fois s�obstiner dans une ligne de
gauche et s�engager sur la voie de
la r�ussite commerciale ! Oui, � son
peuple, Bachir avait choisi d�offrir
un autre journalisme que celui des
lampions.
A La R�publique, Alger ce soir,
Actualit�s, Alger R�publicain et
m�me El-Moudjahid, contre les
machiav�liens, il a laiss� l�id�e
d�une presse moderne, lumineuse
et pourtant virile, � la voix respectable,
construite sur la vitalit� plut�t
que sur l�all�geance, la pure objectivit�
et non la rh�torique, l�humanit�
et non la m�diocrit�.
* * *
Bachir fut mon premier directeur
� La R�publique o� j�ai d�but� en
tant que correspondant sportif.
C�est � Alger R�publicain, ce journal
qu�il fallait ressusciter, que je fis
connaissance de l�homme.
Pour d�couvrir l�image d�un
homme heureux, il fallait avoir surpris
Bachir rayonnant devant les
amis ou hilare devant ses enfants,
fier avec sa fid�le Bibiya.
Mais pour avoir le spectacle
d�un homme combl�, il fallait avoir
surpris Bachir dans une salle de
r�daction, tourment� par l��dition �
na�tre, Bachir en train de traquer
l��v�nement, concevoir une mise
en page, pourchasser la formule,
s��puiser sur une manchette, pers�cuter
le photographe, s�acharner
sur l�introuvable illustration, se tourmenter
de la l�gende, s�obs�der
d�un jeu de mots, Bachir en train de
cr�er, Bachir en train de procr�er,
puis Bachir triomphant, Bachir
exauc�, retombant en enfance
devant son �uvre, Bachir ayant
f�cond� sa profession par son
talent, Bachir �puis� d�un bonheur
incomparable et furtif qu�il lui faudra
renouveler le lendemain�
Bachir pr�t pour la nuit qu�on ne
peut pas ne pas prolonger, pr�t
pour le dernier verre, Bachir qui
passera du surmenage au vide,
puis au vertige du petit matin, �
�puiser le d�senchantement avant
de repartir � la conqu�te d�une
autre volupt�, la volupt� du jour : un
nouveau journal.
Avec lui, comment sortir indemne
d�une passion ? On deviendra
des amants fid�les.
On respectera la musicalit� de
l��criture, on fera la chasse aux hiatus
et aux assonances, on cherchera
le raccourci, et on apprendra �
s�duire : �L��dito, une id�e, deux
feuillets�, �reportage : des faits, de
la couleur�. Et Bachir a repris tout
cela. Ce livre qu�il va falloir r��crire.


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