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INTERVIEW YAHIA BELASKRI
�Aujourd'hui, la r�volution n'est plus d'actualit� mais la dignit� est toujours � conqu�rir�
Publié dans Le Soir d'Algérie le 04 - 12 - 2008

Le Soir d'Alg�rie : Cette ville n'a pas de nom, pas plus que le pays ou les lieux de fa�on g�n�rale, sinon symboliquement : le pont des suicid�s, le carrefour de la mort. Pourquoi ce choix ?
Yahia Belaskri : J�avais d�cid�, d�s le d�part, de ne pas nommer la ville. Faire une description d�une ville particuli�re, de temps en temps, faire r�f�rence � une autre ville � le pont des suicid�s, par exemple � pour signifier que c�est une �ville-pays�. Par ce choix, je voulais que le lecteur y voit la ville qu�il veut� Laisser l�imagination du lecteur aux commandes. Le roman parle d�une ville o� des femmes et des hommes entreprennent, cr�ent, r�vent, avant de voir leurs r�ves se briser devant un syst�me qui les annihile, les broie. Cela peut concerner nombre de villes, de pays. Maintenant, il est vrai que nombre de lecteurs ont cru y d�celer la ville d�Oran, peut-�tre� J�ai rencontr� des lecteurs, un peu partout en France qui m�ont dit qu�ils reconnaissaient cette ville en Am�rique latine, d�autres en Asie. C�est cela qui m�int�ressait, partir de ce que je connaissais pour brosser le tableau d�une ville en d�liquescence.
Quelle place a tenu la po�sie dans votre vie adolescente, en particulier celle de Jean S�nac que vous �voquez dans le roman ?
Le po�te est �vigie�, disait S�nac ; il est celui qui d�friche, d�voile, met � nu. Sentinelle, dont Jamel Eddine Bencheikh disait �� un homme politique ne meurt pas de ses r�ves, un po�te si. Po�te jusqu�au bout de son impatience (�), il ne s�est pas tromp� de po�me. C�est celui-l� qu�il devait �crire, qui s�effrite et s�an�antit d�s qu�on le r�f�re au r�el, mais s�illumine et s�envole si l�on y d�chiffre le possible�. J�aimais la po�sie de cet �corch�, iconoclaste, faisant fi des tabous et des pr�jug�s. Avant de lire S�nac, j�avais lu Aragon � Les yeux d�Elsa. Puis, gr�ce � Aragon, la po�sie arabe. A l��poque, la revue Souffles, dirig�e par Abdellatif Laabi, m�avait permis d�appr�hender la cr�ation po�tique maghr�bine. S�nac est encore pr�sent aujourd�hui � plus qu�hier � car il n�a jamais renonc�. Jusqu�au bout, il s�est battu pour ses r�ves, ceux d�une Alg�rie fraternelle et tol�rante. Rejet�, humili�, il n�a pas d�sarm� ; �c�est son esp�rance qui l�a broy�, dit Albert Memmi. Le po�te l�avait compris �les hommes vivent et meurent seuls. Rien ne peut les sauver de leur image. J�ai cru vivre bard� de vigilants nuages pour �chapper � la d�tresse commune, recruter quelques id�es innocentes, qui me permissent de trouver de l�esp�rance � mes gestes quotidiens. Et me voici rompu au seuil de mon parcours�. Plus qu�une place dans mon adolescence, S�nac continue de m�irriguer, avec d�autres po�tes bien s�r : Jamel Eddine Bencheikh, notamment, cet homme intransigeant, immense �rudit toujours en col�re contre l�injustice, Jean-Claude Xuereb, Ren� Char, et bien d�autres.
Le narrateur a un rapport passionnel � la langue: rapports conflictuels avec le professeur d'arabe, rapport amoureux avec le professeur de lettres. Est-ce un hasard si la langue fran�aise est incarn�e par une femme et la langue arabe par un homme ?
Non, ce n�est pas un hasard. L�instituteur d�arabe vient du Moyen-Orient. L�enseignante de fran�ais vient de France. Je voulais faire r�f�rence � cette question des langues en Alg�rie, l�arabisation faite � la hussarde qui a handicap� nombre de personnes en Alg�rie, la langue fran�aise synonyme d�ouverture, de lumi�res. D�un c�t�, l�insulte et l�incompr�hension, de l�autre l�amour, la disponibilit�. J�ai appris et aim� la langue arabe quand elle m�a �t� enseign�e par un professeur alg�rien, M. Remaoun � qui je rends hommage. Tant que j�avais des enseignants qui venaient du Moyen-Orient, j�y �tais r�fractaire. C��tait � la fin des ann�es soixante. Cela semble simpliste et injuste, peut-�tre� C�est la vision de l�auteur, une mani�re de rendre hommage � tous ces enseignants fran�ais qui sont venus fin des ann�es soixante, d�but des ann�es soixante-dix � qui n��taient pas beaucoup plus �g�s que nous � en Alg�rie pour participer au �projet r�volutionnaire�. Le choix du personnage f�minin pour la langue fran�aise proc�de aussi du rapport que, personnellement, j�ai aux femmes. J�ai une profonde reconnaissance pour les femmes, elles qui m�ont appris le �sensible�. Depuis la m�re, analphab�te mais tol�rante, pleine de bon sens, qui ne connaissait pratiquement rien il est vrai, mais pour elle l�essentiel �tait d�aimer, d��tre aim�. Mes copines au lyc�e, � l�universit�, au th��tre, mes professeurs, toutes les femmes que j�ai rencontr�es ont apport� une pierre � ma sensibilit�. J�ai de la consid�ration et de l�estime pour les femmes, notamment les Alg�riennes pour qui les choses ne sont pas faciles ; au contraire, le combat qu�elles m�nent est titanesque � les pr�jug�s et tabous sont tenaces, la soci�t� est bloqu�e, la femme est minor�e. Au-del� de l�enseignante de fran�ais, il y a cette relation aux femmes, la reconnaissance que j�ai pour elles.
Le th��tre occupe une grande place dans ce roman. A-t-il occup� la m�me place dans la vie du romancier ?
J�ai fait du th��tre dans ma jeunesse : l�apprentissage avec Covacho, le conservatoire avec Oumer, puis la sc�ne avec le Th��tre Group�70. Cela a dur� quelques ann�es mais j�en ai �t� marqu� durablement. J�aime le th��tre et sa capacit� � traiter des probl�mes humains. Je n�en fais plus depuis longtemps, mais je vais souvent au th��tre ; chaque ann�e, j�assiste � deux ou trois festivals en Europe. Depuis peu, avec des amis (ies) de l�ex-Th��tre Group�70, nous pensons � remonter sur sc�ne, peut-�tre avec des textes de Kateb Yacine, autre po�te qui a influenc� ma jeunesse. Cela peut faire rire car nous ne sommes plus tr�s jeunes, mais nous avons toujours l�envie, en fait nous avons encore des r�ves et des projets.
Qu'est-ce que la r�volution dans votre roman d'une part, dans votre v�cu d'autre part ?
Dans le roman, c�est la possibilit� de s�indigner et de r�ver. Or, les vell�it�s des personnages se brisent, emport�es par un syst�me qui organise la m�diocrit� et l�abandon. Dans mon v�cu, je ne sais quoi vous dire. Enfant, j�ai connu l�ind�pendance et l�euphorie. Adolescent, je suis vite conquis par le projet de construction du pays autour de la libert�, la d�mocratie, la fraternit�. Lyc�en d�j�, j�adh�rai au marxisme et l�utopie prol�tarienne, puis au mao�sme. Une impasse mortelle. J�en suis revenu comme d�autres. Dans les ann�es 70, nous avions vraiment le sentiment qu�il fallait changer les choses en d�non�ant le r�gime de Boumediene. Dans le but de pr�server la dignit� des Alg�riennes et des Alg�riens. Aujourd�hui, cette dignit� est toujours � conqu�rir, et la r�volution n�est plus d�actualit�. La r�volution j�y ai �t� abreuv� avant de constater l��chec, le mien, celui de ma g�n�ration balay�e, b�illonn�e, mise au rebut. L��chec c�est Octobre 88 : 500 jeunes meurent sous les balles de l�arm�e alg�rienne. C�est ma g�n�ration qui devait �tre dans la rue, pas ces jeunes, pas ces enfants. La r�volution s��tait arr�t�e ; en fait, elle n�a jamais eu lieu. Apr�s le projet de lib�ration nationale � in�luctable et fondamentale � la broyeuse s��tait mise en marche et les r�ves s��chouaient. Alors, quelle r�volution ? Reste aujourd�hui, comme je l�ai d�j� dit, la dignit� � reconqu�rir.
A travers votre roman, avez-vous le sentiment de vous �tre lib�r� des tourments de votre pass� ?
Mon pass� n�est pas, n�a pas �t� tourment�. Enfant d�ouvrier, n� et grandi � M�dina J�dida, ex-quartier N�gre, j�ai �t� �lev� dans la pauvret� la plus extr�me avec comme objectif l��cole, consid�r�e par mon p�re comme la cl� de la r�ussite. Comme nombre d�Alg�riennes et Alg�riens. Pauvre, mais convaincu que l�avenir �tait pour moi, pour nous, celles et ceux qui me ressemblent. Tr�s t�t, j�avais pris conscience de la r�alit� de mon pays, de ses difficult�s, ses tourments, ses espoirs. J�avais particip� comme tant d�autres, � mon modeste niveau, � la construction d�un r�ve. Jeune, � peine 24 ans, j�ai eu plusieurs postes de responsabilit�. Il faut imaginer cela ! Nulle part, je n�aurais eu cette chance-l�. J�ai parl� d�euphorie, ensuite c��tait l�enthousiasme, les r�ves les plus fous. Je suis parti en 1989, au lendemain de ce que j�appelle �l��chec�. J�ai dit que je n�avais pas de tourments... ? Non, j�en ai aujourd�hui. Comment ne pas �tre tourment� quand des jeunes et des moins jeunes font le projet de fuir le pays � bord de barques, bravant la mer ? Quand tous les jours, la presse � que je lis quotidiennement � rapporte les �meutes, les mutilations, les tentatives de suicide, la pauvret� et la mis�re ? Quand des fortunes colossales s�amassent � ce peut �tre l�gitime, de mani�re indue � ce n�est plus l�gitime � au d�triment du plus grand nombre ? Oui j�ai des tourments et je ne m�en suis pas lib�r�. Je pensais m�en lib�rer. En vain, je ne me suis lib�r� de rien. J�ai de la tendresse pour mon pays, mes amis, ma famille. Je suis en col�re contre ceux qui ont mis � mal la dignit� des Alg�riens. La col�re est toujours l�, elle grossit. Mes tourments aussi.
Propos recueillis par Meriem Nour
Biobibliographie
Yahia Belaskri est journaliste et �crivain. Il a collabor� � diverses publications en Alg�rie ( Le Monde Aujourd'hui, Le Soir d'Alg�rie, L'Echo d'Oran,... et en France ( Le Nouvel Observateur, Les Lettres fran�aises,...). Il est l'auteur d'essais et de nouvelles publi�es dans des ouvrages collectifs et notamment, Histoire faussein Derni�res nouvelles de la Fran�afrique, �d. Vents d'ailleurs, et La fen�tre bleue in Fen�tres sur M�diterran�e. Le Bus dans la ville est son premier roman.
Signet
Si un roman devait suffire � condenser un sens, Le bus dans la ville de notre confr�re Yahia Belaskri nous envoie le signal de la noirceur et du pessimisme. Exag�r� ? Outre que c�est le regard de l�auteur qui transforme tout en encre noir, il faut dire qu�il y a quelques raisons objectives de sombrer dans une sorte de d�sillusion, de d�senchantement lorsque ses poumons ont �t� gonfl�s d�enthousiasme r�volutionnaire des ann�es 1970. C�est comme si, en s�effondrant, le r�ve a, pareil � un volcan, d�vers� une lave noire qui entache tout ce qu�elle touche. L�univers de Belaskri en forme d�impasse est inversement proportionnel � l�espoir que les jeunes des ann�es de soleil nourrissaient quant � l�avenir du destin collectif. En se noyant, le soleil des ind�pendances a naufrag� l�espoir. C�est de cette histoire- l� qu�il est question dans ce roman. Une histoire de longue liste d�assassinats : S�nac, Alloula et d�autres et aussi d�autres choses comme : l�espoir�
Bachir Agour
Voyage dans la tourmente
Le premier roman de Yahia Belaskri, Le bus dans la ville, est un roman sombre, tr�s sombre. C'est celui d'une ville sans arbres, sans fleurs et sans oiseaux: �Pas d'autre ombre que les n�tres qui nous effraient.� Une ville maudite revisit�e par le narrateur derri�re les vitres sales, ruisselantes d'eau de pluie, d'un bus traversant les lieux de sa jeunesse. La laideur du d�cor ternit la m�moire d'une cit� jadis color�e et enjou�e. Les souvenirs affluent, s'entrechoquent et se confondent. Le narrateur a douze ans. Une vieille 404 b�ch�e transporte la famille pour une premi�re sortie � la campagne autour du mausol�e d'un marabout. Ni eau, ni toilettes, salet�, poussi�re et chaleur suffocante. Autre s�quence. Il a dix ans et surprend des voisins d�coupant le corps d'un homme. Vomissures, terreur de l'enfant. Dix ans encore. Une bombe explose dans une voiture sur l'esplanade tuant le fr�re adul�, Hani, joueur de foot et syndicaliste. Pleurs, corps mutil�s, morceaux de chair �parpill�s. Les images d'un pass� en noir et gris d�filent par saccades, comme un vieux film en super 8 : �Sc�nes de la vie quotidienne dans une ville sans m�moire, une ville fant�me, une ville poubelle, une ville prison o� tout est grillage.� Les lieux n'ont pas de nom, sinon symbolique, �le pont des suicid�s�, le carrefour de la mort�. La colline des amours s'est mu�e en espace sanglant, sc�ne des crimes de femmes supplici�es. Jusqu'au quartier de l'enfance qui garde le go�t de la violence et de la d�serrance: �Un quartier populaire, assez vivant, avec ses voleurs, ses bandits, ses prostitu�es � cach�es, bien s�r �ses vieux et ses jeunes. Un quartier de d�class�s, survivants d'un naufrage pass� et � venir.� Une multitude de personnages s'entrecroisent dans cet univers dantesque. La m�re du narrateur, vieille � trente ans, qui �ne connaissait rien � rien, juste sa pri�re� et le p�re en burnous marron �assis sur une chaise sur le trottoir face au soleil�, dont l'unique obsession �tait la r�ussite scolaire de son enfant. Les seuls moments de paix se r�f�rent aux femmes aim�es. Cherifa, la promise, � qui il lit Victor Hugo, Le�la qui l'initie � la po�sie, les com�diennes Fa�za et Alima, Dalia l'amante aux seins lourds, Manon, la prof de lettres qui l'appelait �mon soleil�. Elles sont le fil t�nu qui le relie � la vie, avec les copains, bien s�r, ceux du th��tre et de la R�volution. Dida, le jeune metteur en sc�ne �r�volt� et �corch� vif�, Samir, l'intellectuel du groupe qui lisait Sartre et Nietzche, Toufik, le taciturne, r�volutionnaire pur et dur, Djamel �le clown� qui riait de tout, Camille, l'homme du beau... Tous chass�s de la ville, par la ville. Dans cet �lot d'humanit� se glissent des personnages que l'on conna�t et reconna�t. Jean, le po�te maudit, barbe noire et calvitie, clamant ses r�ves avant de hurler ses blessures: �Seuls les chiens l'avaient entendu. Ils l'avaient mordu � mort.� Kad, �le g�ant�, �le lion� qui parlait dans ses pi�ces des petites gens, assassin� de trois balles. Tous personnages connus et inconnus embl�matiques d'une Alg�rie encore vivante dans les ann�es 1970-1980. La nostalgie m�me est douloureuse. Regret de ne pas avoir �cout� Badil, le petit fr�re perdu: �Je n'avais pas le temps ; je faisais des �tudes, je voulais faire la R�volution, je voulais �tre po�te.� Regret de n'avoir pas su parler au p�re de son vivant. Regret de n'avoir pas �t� pr�sent aux obs�ques des parents, des amis... Et la d�tresse c�de � la col�re lorsque celui qui se d�finit: �L'impertinencechevill�eaucorps� r�alise la distance entre la vie r�v�e de ses dix-sept ans et la vie r�elle contamin�e par la peur jusqu'au d�lire. D�lire qui conduit le narrateur dans l'ab�me o� l'entra�nent, dans une danse horrifique, ses amis disparus. L'ouvrage de Yahia Belaskri est un t�moignage poignant des espoirs et des d�sillusions d'une g�n�ration perdue. Son style sobre et pr�cis conf�re � son texte une dimension po�tique et universelle.
Meriem Nour
Le bus dans la ville, Yahia Belaskri, �d. Vents d'ailleurs, 2008.


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