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TASSADIT IMACHE AU SOIR D�ALG�RIE :
�Je suis n�e d'une Fran�aise et d'un immigr� alg�rien qui s'�taient rencontr�s � l'usine�
Publié dans Le Soir d'Algérie le 17 - 02 - 2010

Ecrivaine discr�te et pudique, Tassadit Imache ne cesse depuis plus de vingt-cinq ans d�interroger ce qu�il y a d�humaniste dans sa double appartenance. N�e dans le conflit, d�une m�re fran�aise et d�un p�re alg�rien, en pleine guerre d�ind�pendance, elle porte ces traces dans sa chair et naturellement dans ses romans. C�est encore le cas dans Des nouvelles de Kora (voir Le Soir des Livres du 4 f�vrier dernier), son dernier livre. Elle s�explique sur sa trajectoire et sa cr�ation dans la premi�re interview qu�elle donne � un journal alg�rien.
Entretien r�alis� par Arezki Metref
Le Soir d�Alg�rie: Des nouvelles de Kora est votre cinqui�me roman. Quelles difficult�s avez-vous �prouv� par rapport au premier ?
Tassadit Imache : Chaque livre a son cheminement, ses points de tension, ses risques, son d�nouement. Quand le livre est enfin l�, c'est une joie. Ce qui est de plus en plus difficile, c'est de sauvegarder l'�criture dans ma vie, cet espace de libert�. Pour chaque livre, j'ai cherch� la langue et la forme la plus juste, au plus pr�s de ce qui fondait le livre. A un moment, les personnages travaillent eux-m�mes � leur cr�dibilit� et vous �clairent sur votre projet. Et ils peuvent m�me vous demander des comptes ! La puissance, le pouvoir de vie des mots est extraordinaire. Livre apr�s livre, je travaille ma langue. Les th�mes qui m'occupent particuli�rement ? La difficult� de vivre et d'aimer, d'�tre soi, les liens � ce qui nous unit ou nous s�pare � la solitude humaine, l'incommunicabilit�. Mais aussi la force des sentiments, la fraternit�. Mes personnages luttent contre tous les enfermements, les d�terminismes familiaux, sociaux, contre le destin. Il y a ces enjeux de la m�moire, l'emprise de l'Histoire sur nos vies. Nous vivons dans un monde o� tout autour de nous se souvient : ces blessures de l'Histoire, la guerre d'Alg�rie, toute aussi personnelle la Shoah, la d�portation des juifs. Dans Une fille sans histoire, mon premier roman, les personnages �taient familiers, leur histoire, proche de la mienne, la tension �tait forte: le travail de recr�ation litt�raire a �t� �prouvant. Des nouvelles de Kora, mon dernier roman, est un livre o� je mets � nu certaines obsessions � travers mon h�ro�ne, Michelle : les rapports qu'entretiennent l'identit� et la m�moire, le r�el et la fiction. Ce livre dit aussi quelque chose de la gen�se de l'�criture. Entre Une fille sans histoire et Des Nouvelles de Kora, il y a ce parcours, du point d'origine - le d�sir d'�crire - � l� o� je me situe aujourd'hui et o� la question cruciale est comment continuer. A �crire, � vivre. Michelle est une femme exigeante, solitaire, qui dit craindre �les maisons�, se d�fie des sentiments amoureux et de toute histoire. A plus de quarante ans, elle est encore tourn�e vers son pass�. Elle cherche sans cesse dans son enfance des cl�s pour sa vie pr�sente. Sa qu�te, dangereuse, est celle de la V�rit�. Elle somme sa m�re de lui raconter enfin �toute l'histoire�. Comme s'il existait un r�cit unique, av�r�, de notre vie. Sa m�re lui r�torque avec fermet� et une certaine cruaut� : �Vivre, tu verras ma fille, c'est fabriquer de l'oubli et du mensonge !�. Michelle choisit l'�criture parce que l'�criture, elle, ne ment pas !
Comme dans vos pr�c�dents romans, vous situez l'histoire sur la faille alg�ro-fran�aise. Gu�rit-on de cette cassure ?
Je suis n�e en France au milieu de la guerre d'Alg�rie, d'une Fran�aise et d'un immigr� alg�rien qui s'�taient rencontr�s � l'usine. Je suis l'enfant de ces deux-l�� des lutteurs forc�ment ! H�riti�re ill�gitime, improbable ? Ou trait d'union en perp�tuelle tension ? Le sentiment d'ill�gitimit� s'il ne vous fixe pas dans un doute permanent, vous propulse de toute la force de la n�cessit� d'�tre et vous donne donc une libert� particuli�re. Bien s�r il y a eu ce choc dans l'enfance, mon saisissement devant la violence inou�e de cette histoire-l�, celle de la France et de l'Alg�rie. Mais je n'y ai pas vu que des ombres. Doit-il y avoir une emprise � vie de cette histoire ? Pr�empte-t-elle la vie de nos enfants, de nos petits-enfants ? Doit-on construire une g�n�alogie de vies fracass�es ou f�l�es ? Toute identit� personnelle est mouvante, on ne fige bien que les morts. Quel que soit l'h�ritage familial, historique, se construire en tant qu'individu est un d�fi. Pour peu qu'on renonce � se poser � vie en cr�anciers de nos parents, de nos grands-parents, de nos �f�roces anc�tres�. Je n'ai pas le go�t de la dette et du malheur.
Kora-Michelle. Qui est qui dans votre histoire?
Dans sa qu�te de la v�rit� sur la part oubli�e, cach�e de l'histoire, Michelle jette � la t�te de sa m�re ce nom de Kora, surgi du pass�, � la fois �nigmatique et familier et dont elle pressent qu'il a en charge le chaos et les silences, et d'abord ceux de l'histoire de ses parents. Dangereuse �nonciation. Voil� Michelle qui perd pied et sombre. Invoqu�e, Kora, figure amn�sique, muette, folle, lui ram�ne son enfance et dans sa ressemblance prend prise sur sa vie, un temps l'immobilise. Michelle devra affronter ce qu'elle a convoqu� : l'incommunicable de la violence et de la souffrance de l'identit� jusqu'alors enfouies. Il faut que Kora parle, sinon �elle coulera au fond de la Seine avec ses coups de griffes et ses coups de dents�, emportant beaucoup de la vie de Michelle. Heureusement il y a les hommes de sa vie, Robert l'ami philosophe, le confident qui l'accompagne et la soutient et le docteur P., m�decin de l'�me.
Votre h�ro�ne a un p�re alg�rien et une m�re fran�aise. Le p�re incarne un pass� bless� et la m�re, le pr�sent oublieux et n�anmoins combatif. En voyant agir la m�re de Michelle, notamment en faveur des sans-papiers, on a l'impression que le temps s'est arr�t� et qu'en France l'exclusion frappe toujours les m�mes.
Y a-t-il une continuit� dans l'histoire des �trangers en France ?
Ancienne femme d'immigr�, rescap�e de l'adversit�, la m�re de Michelle est une repentie de la d�sesp�rance, elle aide naturellement les �trangers sans papiers. �Ouvres les yeux ! � crie t-elle � sa fille, toi qui regardais tant quand tu �tais petite, les gens vivent dans la r�alit� vingt-quatre heures sur vingt-quatre! Regarde ce qu'on fait aux pauvres gens pendant que tu dors, pas � l'autre bout du monde, chez nous ! Le mal qu'on leur fait dans ton dos !� La majorit� des Fran�ais ne se reconnaissent pas dans la politique actuelle men�e � l'�gard des �trangers avec ou sans papiers. Ceux qui ont une m�moire. La lecture r�trospective de l'histoire de l'immigration en France � laquelle on voudrait nous contraindre aujourd'hui � lecture fausse, n�gative, aberrante � me r�volte et m'inqui�te. Ce concept d'immigration �choisie� ou �subie� est inepte, presque �d�lirant�. Puis est venu dans la continuit� le �d�bat� sur l'identit� nationale, pr�sent� et orchestr� comme un enjeu essentiel. On en voit les r�percussions dans les esprits par les propos tenus par certains. Soit tout cela a �t� pens� et il faut �tre vigilant, soit c'est de l'inconscience, une d�rive d'�apprenti sorcier�. Je ne veux voir aujourd'hui que la r�alit� de la pluralit� des visages de la France. S' il y a un slogan des ann�es 1980 que je sauverais, c'est celui cri� et chant� par la rue fran�aise : �Nous sommes tous des enfants d'immigr�s.� J'ai confiance. Les enfants issus de cette histoire bien fran�aise sont des citoyens avertis, �veill�s. Cependant nous avons grand besoin des historiens et des philosophes pour nous rappeler les faits et nous �clairer sur ce qui est � l'�uvre. Les mots choisis et subis d'une �poque sont charg�s de sens, ont aussi en jeu son devenir. Ainsi derri�re le nouveau langage administratif qui r�git nos rapports avec les �trangers, celui de la suspicion et du rejet, ce contr�le obsessionnel des �flux migratoires�, derri�re toute la technocratie et technicit� des reconduites � la fronti�re de sans-papiers, il y a d'abord une d�shumanisation.
Vous �tes une romanci�re pudique et fid�le aux m�mes th�matiques. Celles de l'�cart�lement. Il semblerait que l'�criture chez vous soit moins une th�rapie qu'une tentative d'�lucidation. Qu'en pensez-vous ?
Les livres n'ont qu'une destination : les lecteurs. Ce que m'apporte l'�criture, c'est une fa�on de voir autrement la vie et les gens. Une lisibilit�, autre, du monde qui me le rend plus compr�hensible et donc plus habitable.
Question imprudente � poser � un �crivain. Si on vous demandait de quel courant ou de quels �crivains vous vous sentez le plus proche, que r�pondriez- vous et pourquoi ?
Il y a des �crivains qui m'int�ressent ou dont je me sens proche pour des raisons diff�rentes. Les uns par leur univers, d'autres pour leur style, d'autres encore abordent des th�matiques voisines comme par exemple Marie N'Diaye dont les personnages font r�sonner en moi des choses tr�s personnelles. Je vois et j'admire son travail. C'est chez les �crivains anglo-saxons que je me d�couvre des proximit�s : la lecture d'�Effacement� de Percival Everett a �t� r�jouissante, jubilatoire, voil� un �crivain afro-am�ricain, qui ne travaille pas l� o� il �tait attendu. Malgr� un univers tr�s diff�rent du mien, avec cet �pice typiquement britannique (la musique pop et le sexe), depuis la lecture du Bouddha de Banlieue et de Bradford, un essai compos� de trois textes, par les sujets qu'il aborde, son regard si lucide sur sa double appartenance, son analyse politique, j'ai eu l'impression de croiser en Hanif Kureishi un �presque fr�re� d'outre- Manche. Tout � fait � part, au-del� de la litt�rature : Sylvie Germain m'est pr�cieuse dans sa recherche de ce qui est au c�ur de l'humain, la souffrance, la folie de l'homme, la spiritualit� comme r�solution.


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