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Khemisti Port,entre la digue et les terres en jachère
L'extension du village est pourtant vitale pour ses occupants
Publié dans Le Temps d'Algérie le 17 - 08 - 2009

Le désespoir est grand dans cette petite bourgade du littoral, distante à peine de 50 km d'Alger. Khemisti-Port aurait pu devenir l'une des plus belles destinations touristiques de la côte ouest, mais le destin en a voulu autrement. Le destin ? Plutôt deux parcelles de terre que les autorités refusent de sacrifier. Au grand bonheur de leurs usufruitiers qui en ont détourné une partie au profit de tiers. Pour la construction de belles demeures.
Depuis la route nationale qui le longe sur quelques centaines de mètres, on ne voit pas grand-chose de Khemisti Port. Les haies de roseaux délimitant les terres agricoles soustraient au regard cette agglomération pourtant forte de 4000 habitants. On y accède à partir de la nationale 11, à hauteur du cimetière chrétien, en empruntant une voie large, d'aspect plutôt avenant. Il faut rouler quelques dizaines de mètres avant de voir apparaître les premières constructions.
A droite, on aperçoit une bâtisse d'apparence moderne mais complètement dégradée : la salle des fêtes de l'ex-Chiffalo, fermée depuis une éternité. Plus bas, sur la gauche, la mosquée bien entretenue puis la première ligne de maisonnettes, toutes décrépies, comme l'est d'ailleurs la ville entière. A l'exception de quelques rares édifices encore inachevés ou récemment inaugurés, toutes les bâtisses sont dans un état lamentable, la plupart sont quasiment en ruine, beaucoup ont été rafistolées avec les moyens du bord. Plusieurs familles à l'étroit n'ont pas hésité à accaparer les espaces communs.
On a construit des extensions sur les rues adjacentes, les trottoirs, les maigres parcelles encore libres. On s'est arrangé aussi pour créer des impasses et se partager l'espace ainsi récupéré. Plus grave, on a construit des masures sur le lit de l'oued Khemisti est, bravant les crues légendaires de ce cours d'eau qui interdisent toute circulation entre les deux parties du village. N'empêche, plusieurs familles y habitent, défiant le bon sens et l'autorité. En somme, c'est la débrouille pour des familles qui ne cessent naturellement de s'élargir. Depuis l'Indépendance, en effet, la population est passée de quelque 200 personnes à près de 4000 individus en 2008.
«Des terres d'utilité publique, pourquoi pas ?»
«Plus de 300 familles vivent cette situation alarmante de promiscuité», explique Mustapha Arrache, un natif du village. Pêcheur professionnel depuis une trentaine d'années, Mustapha occupe avec ses 7 enfants et son épouse une maisonnette vieille de plus d'un siècle, aux murs complètement rongés par l'humidité. «Beaucoup de voisins se trouvent dans la même situation, sinon dans des conditions pires, et si rien n'est fait dans les quelques années à venir, le village risque l'explosion», ajoute le pêcheur qui indique que «les terrains existent pourtant qui pourraient accueillir plus de 1200 logements au bas mot».
Et d'énumérer, en premier lieu, les deux exploitations agricoles situées entre le village et la route nationale, seul et unique endroit où peut s'effectuer véritablement l'extension du village. Plusieurs habitants de Khemisti Port sont du même avis. «L'Etat a construit des autoroutes, des logements sociaux, des écoles et des hôpitaux en sacrifiant des terres agricoles, parce que toutes ces infrastructures sont utiles, voire indispensables.
Est-ce qu'il ne peut pas sacrifier 3 ou 4 ha qui ne sont d'ailleurs plus exploités pour que les gens de Chiffalo puissent respirer ?», s'étonne Mohamed qui compte parmi les plus anciens pêcheurs de Khemisti. «le vrai propriétaire des deux exploitations agricoles, c'est l'Etat et non les individus qui les gèrent comme s'il s'agissait de leur bien privé», s'emporte Mohamed Boukerdoune, 49 ans, un chômeur dont la famille occupe une tente dressée entre deux mimosas, sur un trottoir de la populeuse cité Talas-Boualem, l'ex-camp de concentration colonial.
En fait de gestion, c'est la concussion, le trafic et la spéculation qui règnent sur ces terres agricoles censées être inaliénables et imprescriptibles. Des bâtisses récentes ont été érigées à l'intérieur de l'EAI. D'autres, somptueuses, sont en voie d'achèvement. Un garagiste y exerce également. «Dans quelque temps, toute l'exploitation sera lotie et vendue à des gens nantis, il ne restera plus rien pour les gens de Khemisti», plaisante Mohamed, qui ajoute que les terres en question ne produisent plus rien depuis des années. Attentif, Rachid Belouazani, le premier adjoint au maire de Khemisti, ne fait qu'acquiescer.
«Je ne veux surtout pas vous influencer, c'est aux citoyens de Khemisti-Port de vous faire part de leurs préoccupations», lance-t-il en notre direction. A son tour, il affirme que l'extension de la ville compte parmi les principales préoccupations des élus. Des propositions ont été émises à la tutelle et à tous les responsables qui ont eu à visiter Khemisti-Port ; la plus pressante est de déclarer d'utilité publique les terres des deux entités agricoles.
«De cette façon, les gens du village pourront enfin voir le bout du tunnel et reprendre espoir», estiment Mustapha et ses compagnons qui croient que les deux parcelles agricoles ont été pour beaucoup dans la marginalisation de Khemisti-Port. «Le village est caché à la vue des gens qui passent par la nationale 11. Beaucoup ignorent qu'il y a un abri de pêche ici», indique le représentant de Sogeport, l'entreprise qui gère les ports de pêche.
«Un village à raser, avait-on dit»
Au début des années 1980, nous dit-on, l'Etat avait projeté la démolition de tout Khemisti -Port à cause de l'état de délabrement inquiétant des constructions. Il était question d'y aménager un port de pêche et de plaisance et de construire un ensemble de logements, de commerces et d'établissements hôteliers de luxe pour en faire une marina capable de rivaliser avec les anciennes stations balnéaires de la côte algéroise.
C'était l'unique solution qui se présentait à l'époque aux autorités, vu qu'il était impossible de réhabiliter les vieilles constructions, nous explique Mohamed le pêcheur. Autrefois habité par des familles de pêcheurs siciliens originaires de Cefalù, un village situé près de Palerme, Khemisti-Port, l'ex-Chiffalo, déformation française du nom originel, n'était pas de ces villages cossus qui essaimaient l'Algérie coloniale.
«Les Italiens étaient des gens modestes, pauvres par rapport aux français, leurs maisons étaient tout aussi modestes et n'avaient rien à voir avec les belles villas de Tefeschoun (l'actuelle Khemisti-ville, ndlr)», raconte un vieux pêcheur, aujourd'hui à la retraite. Occupées par la suite par les autochtones de la région, les maisons se sont peu à peu dégradées par manque d'entretien et l'effet destructeur des aérosols marins.
L'APC, dépourvue de ressources comme le sont plusieurs autres communes de Tipasa, se dit incapable d'apporter une solution au problème. D'ailleurs, elle n'arrive même pas à récupérer une partie de ses biens. L'ancienne usine de l'Enapêche en fait partie : «La conserverie pourrait encore servir ; l'Etat devrait penser à trouver un repreneur», nous dit le premier vice-président de l'APC.
Il est soutenu par Mustapha qui pense que l'usine pourra fonctionner à l'année puisqu'ici, à Khemisti, on ne pêche que la sardine et l'anchois. Les 35 embarcations emploient d'ailleurs la quasi-totalité de la main d'œuvre active, nous précise-t-on, et ce, en dépit de l'ensablement du port.
Le parfait isolement à 300 m de la RN 11 !
Il faut une bonne dizaine de minutes de marche pour arriver du village au premier arrêt de bus. Travailleurs, collégiens et lycéens sont donc tenus à une marche forcée pour tenter d'emprunter des bus souvent remplis à craquer. «Pourquoi ne pas contraindre les transporteurs à entrer au village ?», s'interrogent nos interlocuteurs qui ne comprennent pas la frilosité des propriétaires de bus et autres fourgons assurant la navette entre Khemisti-ville et Bou Ismaïl, ou entre cette dernière ville et Bouharoun, deux localités situées presque à équidistance de Khemisti-Port.
Le manque de transport accentue l'isolement du village. Ici, il n'y a que le port qui fonctionne. La pêche de la sardine nourrit la quasi-totalité des familles. Le petit chantier naval de l'Ecorep est à l'arrêt, l'unique restaurant digne de ce nom est en réfection. Seuls quelques petits commerces tiennent encore qui font vivoter leurs propriétaires.
A Khemisti-Port, il n'y a pas de pharmacie, pas de boulangerie non plus. Pour n'importe quelle emplette, il faut se déplacer à Bou Ismaïl ou Bouharoun. Maigre consolation, la population bénéficie depuis une année des services de la nouvelle annexe de l'APC, un imposant édifice qui a remplacé l'ancienne annexe, un affreux bureau de 4m⊃2; dépourvu de la moindre commodité.
Jeunes et vieux s'ennuient à mourir. Les premiers n'ont ni stade ni cercle où se rencontrer. Beaucoup de talentueux footballeurs ont tenté leur chance à Bou Ismaïl, certains à Alger, voire dans les villes de l'intérieur. Les plus âgés ont pris l'habitude de se rencontrer sur les quais ou aux abords de la mosquée. Mais tout le monde se rassemble, le soir venu, dans les rares cafés du village.
Ironie du découpage administratif, les habitants du lotissement Mohamed-Mokhtari dépendent de Bou Ismaïl alors que leurs habitations sont séparées d'une rue du reste du village. «Même éloigné de leur chef-lieu de commune, leur situation est meilleure comparée à la nôtre», reconnaissent nos pêcheurs. «Leurs élus les ont autorisés à construire sur des terres agricoles, pas les nôtres», indique malicieusement l'un de nos interlocuteurs.
Logeant avec ses deux frères mariés dans une même maisonnette à la cité Talas-Boualem, il aurait aimé bénéficier d'un lot à bâtir dans la commune voisine et rompre avec la misère qui le poursuit comme une teigne. Son dossier a été rejeté sous prétexte qu'il est étranger à la commune.


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