Honte à la presse égyptienne qui ne représente pas les valeurs de son pays. Elle a lavé le cerveau de la population du Haut Nil pendant plus de deux mois. Résultat des courses : des joueurs algériens blessés et traumatisés, des journalistes nationaux malmenés et menacés, des supporters agressés et humiliés parce que fiers de leur algérianité. Al Goumhouriya, journal progouvernemental, a écrit dans sa précédente édition que «les joueurs algériens ont agressé leur chauffeur du bus qui les transportait à l'hôtel, ceci avant le match». Déplorable ! Heureusement que le reportage de Canal+ dément cette version. Même après la rencontre du Caire, la presse d'Oum Dounia a continué hier dans ses différentes éditions à alimenter ses pages des plus féroces écrits aucunement sportifs et à donner une image guerrière au match opposant les deux équipes nord-africaines. Le quotidien El Misri El Youm rapporte en première page que «les Algériens sont arrivés à Khartoum en promettant, après le match, de transformer Khartoum en champ de bataille». «Des supporters algériens se sont rassemblés devant l'hôtel abritant l'équipe égyptienne. Ils ont brûlé le drapeau égyptien et lancé des slogans contre le régime. La capitale soudanaise s'est transformée en caserne puisque les supporters algériens ont été transportés par des avions militaires, et ce, devant le silence de la communauté égyptienne qui compte des milliers d'expatriés», peut-on lire. La désinformation se poursuivait toujours, comme le confirme la pathétique attitude de l'ancien gardien du Ahly et de l'EN égyptienne, Ahmed Shobeir. Pour ce dernier, «l'attaque du bus algérien est un coup monté». Il exhortait d'ailleurs «les femmes égyptiennes à ne pas se rendre au Soudan sous prétexte de représailles». Au lieu de calmer le jeu et de recadrer la rencontre dans ses paramètres sportifs, Shobeir hausse le ton et accuse «la presse algérienne d'être à l'origine de la fitna». Seul le quotidien Echaâb, d'obédience nacérienne, appelle au calme et titre en page une : «Est-ce une rencontre qui va séparer les deux pays frères ?» Des chaînes de télévision privées ou publiques poursuivaient le lynchage médiatique à l'encontre des Algériens. Ce qui explique les agressions et les jets de pierres survenus en Egypte. La politisation du match par le régime de Moubarak en est la cause. Le raïs, qui prépare tant bien que mal sa succession à la tête de l'Egypte au profit de son fils Jamal, a utilisé avec habilité lematch Egypte-Algérie pour détourner l'opinion égyptienne de cette tentative antidémocratique, devenue une tradition dans les pays arabes. L'Egypte, gangrénée par la cherté de la vie, les problèmes de logement et de pauvreté, la démographie galopante, les catastrophes hygiéniques exubérantes, sans oublier le perpétuel conflit au Proche-Orient qui pourrit les esprits, a permis à Moubarak et compagnie de tromper le peuple égyptien et de transformer sa haine qu'il a envers lui contre des joueurs algériens venus disputer un match et des supporters algériens amoureux du football et fadas de leur équipe nationale. Enfin, la réaction «féminine» de la Fifa est regrettable, voire condamnable. Elle aussi cache un jeu malsain au vu de ce qui s'est produit au Caire. Désormais, la fraternité tant mise en relief pas les autorités de deux pays ne sera qu'un vague souvenir, populiste.