La convocation adressée mercredi par le juge anti- corruption José Castro du tribunal de Palma à la princesse Cristina, fille cadette du roi Juan Carlos, pour l'entendre dans une grave affaire de trafic d'influence et de corruption dans laquelle sont impliqués son mari, Iñaki Urdangarin, et son associé, Diego Torres, a déstabilisé l'institution royale et mis la classe politique dans un grand embarras. Le magistrat soupçonne la princesse d'être au courant de l'utilisation des «liens familiaux» avec le roi par son mari, un ancien capitaine de l´équipe nationale de handball championne du monde, pour négocier ses affaires. Un trafic d´influence sévèrement sanctionné par le code pénal. Utilisation des «liens avec la famille royale» Elevé au rang de duc de Palma depuis qu´il a fait son entrée dans la famille royale en 1997, Iñaki Urdangarin risque la prison et une forte amende en millions d'euros. Ce sportif de haut niveau a tout fait pour éviter toute implication de son épouse dans cette affaire et préserver l´honorabilité de la famille royale. Ce qui apparaît comme un premier pas vers une mise en examen de la princesse est fondé sur une douzaine d'indices sur la supposée utilisation des «liens familiaux» dans cette affaire, mais qui «manque pour le moment de consistance juridique», selon le juge lui-même. C'est la recherche de consistance juridique qui explique toutefois l'obstination du juge à regarder le dossier à la loupe. La princesse a-t-elle joué un rôle dans les tractations financières de son époux ? Le magistrat veut en avoir le cœur net. Hier, il a fini par tenter de calmer le jeu dans cette affaire qui a eu un écho mondial. Il a décidé d'attendre, avant d'écouter la princesse, la réponse de l´Audience provinciale de Mallorca devant laquelle le procureur anti-corruption de Palma, Pedro Horrach, introduira le 27 avril prochain un recours en appel. La classe politique dans l'embarras La première réaction de la Zarzuela fut sa «surprise face au changement de position» du juge Castro qui n'avait jusque-là, à aucun moment, laissé entrevoir une telle initiative, donnant l'impression de vouloir ménager la famille royale. La princesse doit-elle renoncer à ses liens dynastiques, comme l'ont réclamé quelques représentants de la classe politique au teint républicain ? Il n´est pas exclu qu'une telle décision soit prise en cas de sa mise en examen. Embarrassée, la classe politique diverge dans ses réactions à l´initiative du juge Castro. Le Parti Populaire du président Mariano Rajoy a fait part de sa «préoccupation» pour les dommages que cette affaire pourrait causer à la stabilité institutionnelle du pays déjà confronté à une crise économique des plus sévères qui a renforcé l´aspiration indépendantiste en Catalogne et au Pays basque. A gauche, les socialistes ont appelé au respect de la procédure judiciaire. Les communistes et les républicains sont allés jusqu'à critiquer le recours en appel du procureur. Ces derniers estiment que les membres de la famille royale doivent être traités de la même manière que les responsables politiques. El Mundo : «Son Altesse est impliquée» dans le scandale Le quotidien libéral El Mundo titrait, mercredi, en grande manchette et avec ironie que «Son Altesse est impliquée» dans ce scandale. Son confrère El Pais mettait cette affaire dans le même espace rédactionnel que les articles sur le scandale du compte en Suisse de l'ex-ministre français des Finances «démissionné» par François Hollande. Tous deux font le même clin d´œil au juge, l'invitant à ne pas céder aux pressions des partisans de l'immunité judiciaire pour les membres de la famille royale.