«La photographie, c´est la vérité et le cinéma, c´est vingt-quatre fois la vérité par seconde...» Jean-Luc Godard Dialogue du film français Le Petit soldat Il y a quelques jours, un journal a fait état de l´existence d´une télévision privée créée par un jeune Algérien sur le Web. Quoi de plus facile, aujourd´hui, que de créer sa propre télé, quand il y a le Net. Il faut dire qu´il y a quelques années, créer une télévision relevait du miracle, voire de l´impossible. Contrairement aux années précédentes, les techniques de réalisation d´un programme ou d´une production audiovisuelle sont, aujourd´hui, diverses, à la portée de tout le monde et surtout pas coûteuses. Ce qui explique le désarroi de l´Arpa (l´Association des réalisateurs et producteurs algériens) qui n´arrive pas à recenser les vrais des faux réalisateurs, (un peu comme les faux moudjahidine). Il suffit d´avoir une caméra numérique, un trépied, un micro avec un disque dur externe de 250 Go et vous êtes lancé dans l´aventure d´une carrière de réalisateur. Et pour légaliser tout cela, vous créez votre propre boîte de communication avec 100.000 DA de capital et vous êtes officiellement un producteur réalisateur indépendant. Ce qui a engendré des phénomènes comme Hadj Lakhdar, Hakim Dekkar ou encore Mohamed Sahraoui. Des comédiens et des techniciens, à la base, avec aucun diplôme en poche et aucune explosion de talent dans une oeuvre et qui s´affirment, aujourd´hui, comme les piliers de l´audiovisuel algérien. Dans les années 70, quand vous vouliez aller l´Oncic pour présenter un projet, il fallait travailler au moins trois ans comme assistant réalisateur ou avoir fait au moins trois courts métrages, pour être accepté comme réalisateur. Cette règle n´avait pas permis à certains de devenir réalisateurs à l´époque et sont restés, jusqu´à la dissolution des entreprises cinématographiques, des techniciens de l´image. Aujourd´hui, ces mêmes personnes qui continuent leur petit bonhomme de chemin, se sont vengées sur l´histoire et sont devenues non pas des réalisateurs seulement, mais des producteurs qui jouent avec les milliards de la République. Tout le monde est devenu réalisateur, même le boucher et le tailleur du coin. Aujourd´hui, on peut réaliser son film même avec son portable et l´envoyer par MMS à Al Jazeera comme PAD (Prêt à diffuser) pour venter les mérites d´Al Qaîda ou du Gspc. Des films produits par des émirs, réalisés par des terroristes et diffusés par des chaînes qui prônent le djihad au nom de la liberté d´expression. Aujourd´hui, même ce jeune qui fait des films avec sa copine «à Canal+» est devenu célèbre et quand celle-ci le quitte, il balance ce joyau d´Adam et Eve sur YouTube pour se venger de sa dulcinée. Tout cela pour vous dire que tout le monde fait sa propre «sale télé». Même cette cousine qui n´a jamais fait d´école de cinéma ou de techniques de prise de vue, qui s´invente un style et se fait un argent fou en filmant les fêtes de mariage, parce que quelques familles rigoristes n´acceptent pas qu´un homme qui a fait de la caméra son métier de service, se joigne à l´intimité d´une famille ouverte. Aujourd´hui, il existe plus de productions indépendantes filmées par des anonymes mais aussi des artistes que des vrais réalisateurs qui ont fait de ce métier leur talent. Alors, faites vos films! [email protected]