Et pan! «En Algérie, il n'y a pas d'opposition mais des opposants seulement», a asséné, dans l'interview accordée, hier, au quotidien El Khabar, le président du Mouvement populaire algérien (MPA), Amara Benyounès. C'est tellement vrai et tellement bien formulé qu'on ne peut s'empêcher de le reprendre. Surtout quand on est sevré, comme nous, de discours politiques aux idées claires portées par des mots percutants. Benyounès résume en une seule phrase l'état des lieux de la scène politique nationale. Il est vrai que le premier espace où doit exister une opposition c'est au Parlement. Or, le «fromage», comme disent les statisticiens, dans les deux chambres, ne laisse apparaître qu'une majorité regroupant les principaux partis. Le reste est constitué de petites portions de formations politiques disparates et aux programmes indéfinis. Alors, bien sûr, quand on entend des voix «hébergées» seulement par des médias, elles ne peuvent provenir que des opposants. C'est-à-dire de personnes qui ne représentent qu'elles-mêmes ou au mieux, des groupuscules sans ancrage politique réel. C'est triste à dire mais c'est ainsi. Avec un peu de chance, nous aurons, un jour, une vraie opposition. Celle qui interviendrait régulièrement et sur chaque événement d'importance qui concerne le pays. Un jour peut-être car jusqu'à maintenant et pour ne prendre que le dernier événement vécu par la population de Ghardaïa, aucun décibel, d'une quelconque opposition, n'a été décelé. A l'inverse, nous avons eu droit à une «perle». Un leader d'un parti (d'opposition?) s'est brusquement réveillé, avant-hier, pour informer l'opinion qu'il comptait se rendre sur les lieux pour mieux comprendre ce qui s'y passe et tenter de trouver une solution. Il n'a pas été plus précis sur son calendrier. De toute manière, quand on a attendu des semaines pour se «réveiller» on peut bien prendre quelques jours pour «s'étirer». Non, franchement, est-ce une attitude d'une opposition responsable qu'un tel flegme lorsqu'il y a le feu dans la maison? On ne jettera pas la pierre à ce seul responsable sachant que son cas n'est pas unique. On peut ainsi prendre tous les grands dossiers qui ont fait ou qui font l'actualité dans notre pays et aboutir, malheureusement, au même constat. Où est l'opposition avec sa solution sur la réforme du service public? Sur la diversification de notre économie? Sur la crise du logement? Sur la sécurité alimentaire? Sur la création d'emplois? Sur le système de santé publique? Ou plus simplement sur les loisirs et les manèges de proximité? Il fallait remettre les choses à leur place. Amara Benyounès a ce mérite de l'avoir fait. En une seule phrase. Oui, car et à la différence de l'opposition, les opposants se font entendre. Comment les reconnaît-on? Lorsqu'ils dénoncent la fraude électorale quatre mois avant la tenue du scrutin. Lorsqu'ils «se tirent une balle dans le pied» en affirmant que la fraude a toujours existé. Du coup, ils délégitiment tous les élus, locaux, régionaux et parlementaires du même courant qu'eux. On les reconnaît surtout lorsqu'ils insistent sur l'alternance au pouvoir. Là aussi, Amara Benyounès fait mouche avec son franc-parler. Ni une ni deux, pour lui ce concept est «importé». Logique démocratique imparable qui exige de ne jamais entraver la consultation populaire. La sanction par les urnes. Sans exclusion aucune. Ceux qui invoquent cette alternance cachent mal leur peur de se soumettre à cette sanction. Tout le monde comprendra notre fierté de reprendre un discours politique qui «tire vers le haut». On connaissait la position du MPA et de son leader à travers ses «30 priorités pour un printemps algérien». Un tel programme politique dans un désert de propositions partisanes vaut son pesant de respect. Comme l'interview d'hier!