Après une éclipse de plus de 6 ans au moins, l'Algérie revient à l'Union africaine par la grande porte du Sommet de l'organisation panafricaine. Un retour qui sera consacré par la participation du président de la République, Abdelmadjid Tebboune au 33e Sommet ordinaire de l'UA. Pour sa première sortie en terre africaine, le chef de l'Etat brise «le signe indien» qui, en raison de la maladie de l'ex-président de la République, a quelque peu marginalisé le rôle de l'Algérie dans le continent noir. L'Union africaine, à qui il a manqué une pièce maîtresse dans sa force de frappe diplomatique, attend certainement beaucoup de l'Algérie pour le Sommet consacré au thème «Faire taire les armes: trouver les conditions adéquates au développement de l'Afrique». Mais pas seulement pour le rendez-vous d'aujourd'hui, mais également dans le déroulement de la stratégie de l'UA dans tous les domaines. La représentation de l'Algérie au plus haut niveau de l'Etat est, en effet, un gage de puissance supplémentaire pour une Afrique qui cherche à gagner son autonomie face aux influences extérieures. L'apport de l'Algérie sera, dans ce sens, déterminant, à l'image de la dynamique créée par l'Algérie dans les années 2000 qui a vu l'axe Alger-Abuja-Prétoria initier de nombreux projets, dans le cadre du Nepad, notamment. La participation de l'Afrique au G8 et les initiatives que prenait le continent l'avaient rendu visible et sa voix était devenue audible. Il se trouve que l'éclipse de l'Algérie de la scène africaine a mis sous le boisseau tout l'effort fourni en plusieurs années d'activisme de l'ancien président de la République, Abdelaziz Bouteflika. Même si l'on a une impression de retour à la case départ, avec des régions entières victimes de violence terroriste et un sous-développement endémique, il reste que l'Afrique s'impose depuis quelques années, comme la prochaine frontière de la croissance économique de la planète. Le continent tente de s'organiser et le 33e sommet intervient à un moment où une bonne majorité des pays a en commun la Zone de libre-échange africaine. Un outil d'intégration économique qui se veut également un espace de solidarité inter-africaine, en ce sens qu'en augmentant leurs échanges commerciaux, ils édifient leur seule parade contre la prédation des multinationales et des puissances capitalistes. Si l'objectif final des Africains est d'atteindre un niveau de développement économique qui les mettrait sur une trajectoire d'émergence, il reste que pour y parvenir, il faut prioritairement régler les problèmes de sécurité. Le pragmatisme algérien rappellera donc les Africains à leur devoir immédiat, celui d'aider les sociétés en difficultés à solutionner inclusivement leurs problèmes. Aussi, l'intervention du président Tebboune sera axée sur «la situation du terrorisme en Afrique et les moyens d'y faire face plus efficacement». Et c'est toute l'expertise algérienne en la matière qui sera d'une grande utilité pour les Libyens, les Maliens et les autres pays embourbés dans des crises internes que des puissances étrangères attisent pour les maintenir en situation de dépendance. L'approche algérienne, qui a déjà fait ses preuves à maintes occasions, sera d'un apport certainement positif lors de la réunion du Conseil de la paix et de la sécurité de l'UA, à laquelle le chef de l'Etat prendra part. En effet, l'Algérie est membre. Le président de la République qui a défendu et obtenu à Berlin le règlement inclusif de la question libyenne, devra convaincre ses pairs africains à suivre la thèse algérienne tant sur le dossier libyen que celui du Mali. La région sahélienne porte en elle les germes d'une crise qui prendra des allures continentales, si les Africains ne la résorbent pas. C'est justement ce que s'apprêtent à faire les chefs d'Etat réunis à Addis Abeba. Le poids de l'Algérie, dont on a pu mesurer l'importance sur le dossier libyen, est de nature à faire pencher la balance vers une solution pacifique. Ce leadership politique incontestable de l'Algérie devra trouver un prolongement naturel dans une action économique tout aussi puissante pour installer véritablement le pays sur le toit du continent. Le président de la République qui, révèle le communiqué de la Présidence, aura des entretiens avec ses homologues, gardera en tête que l'émergence, c'est surtout l'économie et en cela l'Algérie a une formidable opportunité en Afrique.