En Algérie sont nées quatre congrégations chrétiennes qui ont rayonné sur le monde entier. Une grande confusion s'installe dès qu'on aborde la question de la présence chrétienne en Algérie. Pour la moyenne des citoyens, la religion chrétienne est arrivée dans les valises de l'armée coloniale en 1830. Ce qui est, bien entendu, totalement faux, puisqu'on peut facilement remonter au moins au deuxième siècle après Jésus-Christ, l'arrivée des premiers chrétiens en Afrique du Nord. Monseigneur Tessier archevêque d'Alger, qui a piloté en 1986 la rédaction d'un ouvrage intitulé «L'histoire des chrétiens en Afrique du Nord» situe la venue des premiers chrétiens en Afrique du Nord, plus exactement en Tunisie , à l'année 177. C'étaient les premiers martyrs de la nouvelle religion, dans une région où l'on pratiquait largement le paganisme. Si on tient compte du fait que Jésus est mort en 30, que les premiers chrétiens sont arrivés à Rome en 55, on peut logiquement considérer que l'avènement du christianisme en Afrique du nord est assez précoce. Du reste, les premières traductions de la Bible en latin furent réalisées en Afrique du Nord. La ligne de partage linguistique, qui se situait en Libye, épouse un peu la configuration de l'avancée de la nouvelle religion. En effet, à l'époque, on écrivait surtout en grec. Ainsi, en Cyrénaïque, on parlait grec, mais en Tripolitaine, on pratiquait latin. En résumé, l' Afrique du Nord était bien une terre chrétienne durant toute cette période ; et jusqu'à l'avènement de l'Islam au VII siècle. C'est-à-dire que la nouvelle religion révélée ne tombait pas dans un terrain athée ou païen, mais bien dans une région qui croyait en Dieu, connaissait déjà la genèse et les récits sur la vie des prophètes. Ce modeste article ne peut pas prétendre à l'exhaustivité sur cette question, tant l'histoire de ces premiers siècles de la chrétienté en Algérie est très riche. On en veut pour preuve que l'apport et l'influence d'un Saint Augustin, par exemple, enfant du pays s'il en est, dont l'oeuvre servira de référence au catholicisme, et qui est considéré jusqu'à aujourd'hui comme le véritable père de l'Eglise. L'apport du Maghreb à la chrétienté, loin d'être quelque chose de négatif, est, au contraire, la preuve d'une oeuvre positive, à considérer comme une richesse, et en tout cas, qu'il fait partie de notre histoire. De même que, dans le domaine archéologique, le mépris affiché à l'égard des richesses de l'antiquité et des autres périodes historiques, a coûté à ce pays la destruction ou la détérioration des vestiges historiques d'une très grande valeur, certains ayant même été classés patrimoine de l'humanité: Timgad, M'Dourouch, Djemila, Tipasa, on ne compte pas les méfaits de la bêtise des hommes. De même, on n'insistera jamais assez sur le fait que des hommes de la trempe de Saint Augustin, font partie de notre patrimoine intellectuel et culturel. Après l'arrivée de l'Islam, bien sûr, s'ouvre une autre période, d'autres hommes apparaîtront, des créateurs, des inventeurs, des philosophes , des historiens, des chroniqueurs, des exégètes, dont Ibn Khaldoun n'est pas le moins représentatif, mais les penseurs et créateurs qui ont vécu avant le VII siècle ne font pas moins partie de notre histoire et du mouvement intellectuel de ce pays. Il est important de le souligner. Et puis, bien sûr, il y a eu la colonisation, avec tous ses méfaits sur lesquels il n'est nul besoin de revenir ici. Ils sont connus de tous. Les premiers représentants de l'église en Algérie étaient des aumôniers arrivés avec l'armée française. Il n'y a rien à dire là-dessus, mais Monseigneur Tessier insiste sur le fait que dès la nomination de l'Evêque Dupuche, dépendant, lui, de l'église de France, et qui deviendra l'ami de l'émir Abd-El-Kader, les gens d'église auront à coeur de ne pas faire la différence dans leur oeuvre sociale entre les citoyens d'origine européenne, donc, de confession chrétienne, et les Algériens autochtones musulmans. Pavie construisit Notre Dame d'Afrique. Lavigerie créera le mouvement des Pères blancs et des Soeurs blanches, tout en interdisant les baptêmes. S'il construisit les orphelinats, nous dit monseigneur Tessier, vers 1868, c'était pour répondre à l'urgence suscitée par l'épidémie du choléra. La couleur blanche est ici importante, car, jusque-là les pères étaient habillés en noir. Le blanc était bien un signe distinctif de ces pères d'un genre nouveau. En tout cas, ils étaient plus riches de la population musulmane. Il y eut aussi le père de Foucault, qui fit du bon travail dans le Hoggar, en traduisant la langue tamachaq en quatre volumes, sans jamais convertir aucun Touareg, car ce n'était pas son but, et qui a créé le mouvement «Les petits frères de Jésus». On retiendra surtout que l'Algérie, terre musulmane, a permis l'émergence de quatre congrégations chrétiennes, qui ont rayonné par la suite dans le monde entier.