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«Fouroulou était chacun de nous»
Rabah Benamghar (écrivain)
Publié dans L'Expression le 25 - 01 - 2022

L'Expression:Peut-on savoir à quand remonte votre passion pour la littérature?
Rabah Benamghar: Quand on naît kabyle, on naît poète en même temps. C'est quoi la littérature au fait? C'est la vie de tous les jours pensée de manière intelligente. C'est la manière la plus directe de verbaliser les pensées les plus enfouies, parfois même innées, pour en faire des oeuvres à la portée du grand public. Un homme de lettres est celui qui sait, plus que les autres, donner forme au bouillonnement d'idées que génère son cerveau avec un minimum de bagage intellectuel et un art avéré pour l'écriture. On peut faire des miracles avec peu de matière. L'exemple de la civilisation pharaonique est éloquent à plus d'un titre. Il faut aussi et surtout aimer ce qu'on fait et s'y atteler avec ferveur à chaque fois.
Comment s'est effectué le passage de la lecture à l'acte d'écriture?
On dit que pour maîtriser une langue, il faut la lire et l'écrire sans cesse. La langue française m'a subjugué dès mon jeune âge. Admis au collège, je fus bouleversé par mon orientation vers une classe arabisée. C'était le début de l'application de la Charte nationale de 1976 qui préconisait une arabisation tous azimuts de l'enseignement. Alors, je me suis juré de prendre ma revanche sur le sort en lisant beaucoup de livres écrits en français. La frustration induite par cette injustice m'a poussé à aimer la langue de Molière encore plus. Quant à l'écriture, c'est par la poésie que cela a commencé à se faire. Je composais des poèmes au lycée d'une manière quasi ludique entre moi et mon alter ego poète en gestation. J'écrivais des poèmes lors des séances d'études du soir, étant interne. Je le faisais juste pour moi afin de satisfaire mes pulsations juvéniles et adolescentes. Quoi d'autre qu'un poème pour s'exprimer et exprimer ses rêveries intimes. Ma passion pour l'écriture a germé à cette époque-là pour me poursuivre jusqu'à maintenant.
Que représente l'écriture pour vous?
L'écriture est pour moi une manière de me délester d'un poids impossible à porter, ni à éventer auprès du premier venu. La complicité d'un stylo et d'une feuille blanche n'ont pas d'égal. À trois, on se dit tout sans interférence d'une quelconque curiosité nocive.
Justement, vous êtes d'abord et avant tout poète, pouvez-vous nous parler de votre recueil de poésie édité en France.
Avec l'avènement du numérique et l'arrivée des ordinateurs dans les familles, mon envie d'écrire a carrément explosé. C'est devenu tellement facile. J'ai réuni tous mes anciens poèmes et j'ai réalisé un petit manuscrit que j'ai montré un jour à un ami. J'avoue que j'appréhendais sa réaction vu qu'il était professeur de français dans un lycée et qu'il était un féru de lecture et d'écriture. «Vous ne pouvez pas laisser ça au fond d'un tiroir. Votre poésie mérite d'être lue par un large public», me conseilla-t-il de la manière la plus sérieuse en me fixant du regard. In situ, j'étais étonné et confus par sa réaction.
Pourquoi ne pas l'avoir édité en Algérie?
Comme les maisons d'éditions ici refusaient toutes, enfin celles contactées, mon recueil que j'enrichissais en même temps, j'ai contacté les éditions Edilivre et je ne les ai pas priées pour accepter mon travail. En 2013, un recueil de 120 poèmes a paru en France.
Qu'en est-il de vos deux romans publiés en Algérie?
C'est sur insistance de mon entourage qui connaissait ma passion pour l'écriture que je me suis mis au roman. Le scénario de mon premier roman Le retour au bercail cogitait déjà dans ma tête depuis très longtemps. Ayant un oncle naturalisé français et qui n'a jamais remis les pieds au pays depuis son premier départ pour la France en 1953, son histoire m'a toujours hanté au point d'en faire une fixation. Je n'ai jamais cessé de poser des questions à ceux qui avaient la chance de le croiser à Paris, avant son effacement définitif lorsqu'il apprit la mort de sa mère en 1974, dont je garde des souvenirs indélébiles. J'ai fait de ce livre son histoire, même si je ne l'ai jamais rencontré et que personne ne pouvait me donner, ne serait-ce qu'une bribe de ses péripéties. Nos villageois immigrés à Paris ont tous perdu sa trace à un moment donné. Je me suis dit alors, puisque je n'ai pas pu apprendre sur sa vie depuis son départ, autant imaginer son retour. Et ce fut fait. Ce roman sorti en 2016 est un scénario pour réaliser un film pour ceux qui veulent bien s'y intéresser. Une histoire très émouvante qui a fait pleurer plus d'un lecteur. En 2017, j'étais en France pour faire la promotion de mes oeuvres. J'ai demandé à mes amis de bien vouloir m'aider à retrouver mon oncle qui était le personnage principal de mon roman. J'avais récupéré entre-temps sa dernière adresse par l'intermédiaire d'un vieux de notre région qui le connaissait très bien. Cette personne était la seule à avoir gardé contact avec mon oncle. Et mon rêve se réalisa enfin. Je l'ai retrouvé dans l'est de la France et le scénario imaginé dans le livre allait se réaliser dans les moindres détails sans l'interférence de quelques éléments exogènes.
Qu'en est-il de votre second roman?
Pour le second, intitulé Double-vie qui raconte un sujet tabou, à savoir, l'adultère et l'illicite dans la relation amoureuse, j'ai osé le pari de transgresser la règle établie et d'aborder le sujet qui fâche. C'est une relation d'amour entre un homme et une femme mariés par-dessus tout. Mes deux romans sont édités ici pour s'adresser à des gens d'ici qui vivent ici ou ailleurs.
Votre propre vie constitue-t-elle une base pour la matière de vos romans?
Même si ma vie est un roman à elle seule qui s'écrit au jour le jour, elle n'en demeure pas moins aux antipodes de mes romans. L'environnement immédiat dans lequel nous évoluons influe directement sur nos choix multiples. Nos vies, pauvres montagnards que nous sommes, sont régies par un ésotérisme des plus sévères. Il est pour nous Kabyles pas du tout catholique de raconter sa vie dans les agoras. Tout est platonique dans nos relations avec notre environnement.
Quelle est, pour vous, la différence, quand vous vous exprimez en poèmes et dans vos romans?
La question est très intéressante bien qu'ayant plusieurs fois fait part de cette différence entre les deux sujets. La profondeur de la poésie suggère une complicité indispensable entre l'écrit et l'auteur. Les deux sont interchangeables et ne font qu'un au final. Le poème reflète la personnalité intime de l'auteur et l'auteur dicte sa pensée au poème. L'inspiration joue le lien ou le ciment entre les deux. Le poème est le son du silence du poète. Ce que le poète n'ose pas dire, le poème le dit avec toute la complexité et l'amalgame possible qui font que le poète en sort indemne de tout reproche. La poésie est le porte-parole non coupable du poète. C'est juste mon point de vue. Pour le roman, bien qu'une touche personnelle puisse intervenir, le scénario est une pure imagination de l'esprit. L'imagination est pour le roman ce qu'est l'inspiration pour le poème.
Est-ce que c'est le journalisme qui vous a mené au roman ou bien l'inverse, parlez-nous du rapport entre les deux...
Le journalisme m'a ouvert les yeux sur mes capacités à aller plus loin dans l'écriture. J'étais journaliste avant d'être romancier, bien entendu. Tout est enchevêtré en écriture. Le journalisme a besoin de manière instantanée de la matière pour assouvir la curiosité au quotidien, parfois. Dans ce cas, la contrainte est trop forte. Il faut, coûte que coûte, trouver des sujets pour alimenter la rubrique, la rédaction ou simplement l'actualité. C'est un impératif commercial et informel que le lecteur attend sans répit. Le journalisme m'a appris à être précis et juste dans le jugement et l'analyse, le roman m'a donné l'amplitude de l'imagination afin d'emmener le lecteur dans un film virtuel impossible à interrompre.
Est-ce qu'on peut savoir quels sont vos écrivains préférés, ceux qui vous ont le plus marqué?
Je lisais tout. J'étais très attiré par le roman et le sensationnel pendant ma jeunesse. Claude Simon, Feraoun, Mimouni, Dib et tant d'autres écrivains algériens étaient les vrais porte-voix de notre quotidien et surtout de notre misère. Nous nous identifions à eux. Qui d'entre nous ne frissonne pas en lisant Le fils du pauvre. Fouroulou était chacun de nous et sa vie était la nôtre. La grande maison de Dib nous renvoyait aux habitations juxtaposées des villages kabyles où il n'y avait presque pas d'intimité. Après, il y a Alexandre Soljenitsyne qui était pour nous le porte-parole du petit peuple, face à l'injustice des puissants. Et puis, tous les auteurs français Camus, Victor Hugo, Daudet qui sont une partie de nous sur le plan littéraire, grâce et à cause de la langue française.
Qu'est-ce qu'être écrivain à une époque où le lectorat se rétrécit de plus en plus surtout depuis la généralisation de l'Internet?
C'est comme avoir beaucoup d'enfants, aujourd'hui, pour finir au crépuscule de sa vie seul avec sa femme entre quatre murs. Être écrivain, aujourd'hui, c'est accepter de produire sans attendre rien au retour. La production littéraire n'intéresse presque plus et ne fait plus vivre. Les envies, les plaisirs et les passions ne sont plus les mêmes comme avant. La passion seule permet aux hommes de lettres de continuer à écrire et à produire. Le livre n'est point un produit périssable, il faut continuer à produire pour les générations futures.
Etes-vous sur un projet de nouveau roman ou recueil de poésie?
Oui, bien sûr! J'ai un livre presque fini et un recueil de poésie fini. J'avoue que cette pandémie de Covid-19 a tempéré mes ardeurs. Le coeur n'y est plus. Pour la poésie, je peux composer, jour et nuit, pour peu qu'un semblant de calme s'installe dans ma tête. Pour le roman, j'ai juste besoin d'un correcteur sérieux pour agrémenter et saupoudrer mon manuscrit. Il est dans le tiroir. Je suis aussi au début d'un autre roman que j'ai mis au frigo en attendant l'envie de réécrire.


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