Dans la configuration inédite de l'état géopolitique de la planète, l'Algérie a sa part. Elle a droit de cité auprès des pays de l'Union européenne et des Etats-Unis. Cet intérêt grandissant pour l'Algérie s'explique amplement par la décision du président de la République d'engager la candidature de l'Algérie pour rejoindre le groupe des Brics. Avant que Abdelmadjid Tebboune n'annonce cette intention de faire partie d'un bloc émergeant, aucun politique n'y pensait en Algérie. Aucun «expert» n'avait envisagé cette option, considérant à tort que le pays ne répondait à aucune norme l'amenant à postuler pour un siège avec un groupement de pays qui tiennent tête à l'Occident «dominateur». Les observateurs préconisaient un «profil bas», une attitude de neutralité passive. Le président Tebboune n'a, visiblement pas fait la même lecture de la scène géopolitique mondiale. Son ambition pour l'Algérie dépassait la petite frontière d'une posture de pays en voie de développement qui ne veut pas faire de vagues. Convaincu que son pays a tous les atouts de l'émergence, il a «osé» le pas historique. La réaction des cinq pays des Brics a donné tort aux partisans d'une Algérie sans envergure et confirmé la justesse de vue du président de la République. Avec le recul, on mesure la clairvoyance dont a fait montre Abdelmadjid Tebboune. La pertinence de son analyse de la situation géopolitique du moment relève du pur génie politique. Engager une démarche à laquelle personne ne pouvait s'attendre et recevoir un plébiscite d'aussi grands pays comme la Chine, le Brésil et l'Afrique du Sud peut relever du miracle politique. Et ce n'est pas exagérer, lorsqu'on sait que le PIB de ces pays réuni représente 31, 5% de l'ensemble de la planète. Avec ces 200 milliards de dollars, l'Algérie est effectivement loin du compte, diraient les mauvaises langues. Mais le président Tebboune a su faire jouer le formidable potentiel géostratégique du pays, son poids diplomatique reconnu, ses profondes amitiés avec les pays des Brics et son non-alignement qui a résisté à toutes les épreuves. Le désendettement de l'Algérie est manifestement son meilleur atout. Autant, cela lui permet le luxe du non-alignement, mais renforce son attractivité économique. Le chef de l'Etat, qui a toujours rejeté l'idée de recourir à l'endettement extérieur, marque par cette attitude un autre trait de son génie politique. Le pays a traversé la crise du Covid, caractérisée par des recettes pétrolières au plus bas, sans frapper à la porte du FMI. Bien au contraire, durant cette même période, des mesures de relèvements des salaires ont été initiées, histoire de donner un signal fort à la société sur la volonté de l'Etat de ne pas l'abandonner sous le prétexte de la crise. De fait, la candidature de l'Algérie paraît très sérieuse et profitera aux Brics autant qu'à l'économie nationale. Le président de la République cherche à travers cette adhésion, un bénéfice en matière d'investissement, de transferts de technologie et de renforcement de la position de l'Algérie, comme la porte de l'Afrique. Et c'est bien cette position géostratégique qui fait sa force. Les alliés des Brics auront leur part, au même titre que l'Occident, dont l'intérêt premier est de ne pas laisser l'Afrique lui échapper. Les USA et l'Union européenne ne sont pas des ennemis. L'adhésion aux Brics ne remettra pas en cause le non-alignement de l'Algérie. Ce futur probable, qui donne un rôle central à l'Algérie, trouve son explication dans le moment présent. En effet, chaque jour qui passe confirme le prochain basculement du monde dans un nouvel ordre multilatéral où l'hégémonie d'une seule puissance ne sera plus de mise. Les Etats-Unis d'Amérique et leurs alliés occidentaux qui régentaient le monde sont arrivés, avec la guerre en Ukraine, aux limites de leur influence. Ce que révèle ce conflit au coeur de l'Europe, c'est l'émergence de nouveaux pôles de puissance, assez forts pour dire «non» aux sanctions américaines à l'encontre de la Russie. Aujourd'hui, on évoque ouvertement un processus de dédolarisation de l'économie mondiale, un retour des monnaies nationales, de nouvelles perspectives d'alliances politiques et économiques et l'affranchissement de nombreuses nations de la domination des USA. Dans ce tableau, le rôle des Brics sera déterminant. D'où tout l'intérêt pour l'Algérie d'y être.