Au Qatar une deuxième fois pour une visite de travail et pour la première fois en Chine dans le cadre d'une visite d'Etat, le président de la République clôt une saison diplomatique très fructueuse pour l'Algérie. Ces deux déplacements qui succèdent à celui de la Russie et précèdent quelques rendez-vous multilatéraux cruciaux devant donner le coup d'envoi à une dynamique planétaire, à même de reformuler le concept de mondialisation. C'est dire tout l'intérêt pour l'Algérie de suivre de très près l'évolution de la situation géopolitique dans sa sphère d'influence, mais également auprès des pôles de puissance, anciens et nouveaux. Il est également certain que le nouvel ordre mondial qui promet d'être multipolaire, recommande à un pays comme l'Algérie de soigner les têtes de ponts, mais aussi les relais qui ne tarderont pas à se manifester. Tant en politique, il n'y a pas d'amis, mais des intérêts communs, le président de la République suit la règle immuable de la diplomatie algérienne qui a de tout temps devancé les évènements en se plaçant, à chaque tournant majeur de l'Histoire moderne, au bon endroit. C'est-à-dire à équidistance des «empires» et aux côtés des peuples asservis pour les accompagner dans leurs luttes pour l'indépendance. Cette posture que l'Algérie assume pleinement et qui fait la fierté de son peuple, l'appelle à une plus grande vigilance en ces temps où les sables mouvants de la géopolitique ne tarderont pas à engloutir certains Etats. Aussi, la multiplication des alliances constitue une parade efficace contre toute agression de quelque nature qu'elle puisse être. Mais le président de la République qui soigne les relations avec l'ensemble des représentants de la communauté internationale à l'exception de quelques Etats «criminels», n'entend pas se satisfaire de relations cordiales et de non-agressions mutuelles. Abdelmadjid Tebboune veut passer à l'étape supérieure, à savoir utiliser les anciennes et les nouvelles amitiés pour donner une perspective sérieuse à l'économie du pays. Car, en définitive, le nouvel ordre mondial ne sera pas le paradis et prime sera de toute façon donnée au plus fort. Et dans le monde multipolaire, comme dans celui unipolaire, la véritable devise qui compte demeure la puissance économique et technologique des nations. Il n'existe pas d'autre voie pour donner à l'Algérie une perspective d'un siècle d'existence. Le soft power, par la culture et le sport sont évidemment des facteurs d'influence donc de puissance, mais encore faut-il les consolider par des dizaines de milliers de brevets d'invention, une élite scientifique respectée et une industrie performante et concurrentielle. À Pékin, comme à Rome, Ankara, Moscou, Saint-Pétersbourg et Doha, la mission du chef de l'Etat est la même: drainer des investissements, réaliser des transferts de savoir-faire et des technologies. Si dans un passé récent, il était difficile de convaincre, aujourd'hui, l'Algérie dispose d'atouts plus qu'appréciables pour «forcer la main» à tous les pôles de puissance, déjà existants ou en formation. Cette opportunité historique est saisie par le président de la République qui a su construire habilement des partenariats concrets et solides avec des pays qui, présentement affichent une hostilité les uns envers les autres sans précédent depuis la fin de la guerre froide. Certains observateurs annoncent même une deuxième au regard des tensions qui caractérisent les relations entre le pôle conduit par les USA et la Russie. L'habilité dont fait montre Abdelmadjid Tebboune consiste d'éviter au pays une vassalisation aux intérêts des puissants du moment quel qu'en soit le camp. La démarche est transparente et s'appuie sur une conviction profonde que la République algérienne, née d'une révolution inédite dans l'Histoire moderne, ne saurait s'incliner devant qui que ce soit. Le propos peut paraître pompeux, mais il décrit une réalité. Le chef de l'Etat s'en sert parce qu'il est conscient que toute la société partage cette conviction. Les partenaires de l'Algérie lui reconnaissent cette force de caractère qui fait de l'Algérie une nation à part, portée par un homme qui croit profondément en la destinée de son pays. L'offre de médiation dans le conflit russo-ukrainien en est un signe probant. Mais cette propension à l'universalité ne peut se construire sur des voeux ou un simple discours. L'Algérie doit absolument réunir les facteurs de sa puissance. Le voyage du Président en Chine est un pas important sur cette voie.
