Quelques heures après sa rencontre avec le ministre français des Affaires étrangères, Jean Noël Barrot, en visite à N'Djamena, le chef de la diplomatie tchadienne, Aberrahmane Koulamallah, a annoncé que son pays met fin aux accords de défense avec la France. «Le gouvernement de la République du Tchad informe l'opinion nationale et internationale de sa décision de mettre fin à l'accord de coopération en matière de défense signé avec la République française», a-t-il déclaré dans un communiqué publié sur la page Facebook officielle du ministère. Il a également estimé qu'il ne s'agit pas là d'«une rupture avec la France comme le Niger ou ailleurs», mais d'une «décision, prise après une analyse approfondie, (qui) marque un tournant historique. En effet, après 66 ans de la proclamation de la République du Tchad, il est temps pour le Tchad d'affirmer sa souveraineté pleine et entière et de redéfinir ses partenariats stratégiques, selon les priorités nationales», a argumenté le ministre, dans son communiqué. Au cours d'un point presse dans la capitale tchadienne, autour de l'entretien entre le président Mahamat Idriss Déby Itno et le chef de la diplomatie française, Koulamallah, a pressé la France de «considérer désormais que le Tchad a grandi» et qu'il «a mûri» de sorte qu'il est devenu «un Etat souverain et très jaloux de sa souveraineté», sans pour autant évoquer la rupture des accords de coopération militaire. De son côté, le ministre français des AE poursuivait son périple diplomatique en Ethiopie, pendant que les capitales concernées par ce rebondissement dans une région sahélienne agitée s'interrogent sur les conséquences de la décision tchadienne. Paris avait annoncé avec tambour et trompette que le moment est venu d'une réadaptation de sa politique de coopération en Afrique et, plus particulièrement dans la région longtemps considérée comme son pré-carré. Maillon-clé de sa présence militaire au Sahel, le Tchad rejoint ainsi les autres pays de la région sahélienne, où le Mali, suivi du Burkina et du Niger ont poussé vers la sortie le contingent militaire français dont la présence était perçue comme «néocoloniale». La vague a même gagné le Sénégal où les nouveaux dirigeants, Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko ont, eux aussi, le prochain départ des troupes françaises stationnées dans de nombreuses casernes à Dakar. Pendant ce temps, la France tente de convaincre de sa volonté de mener une nouvelle stratégie africaine avec, selon le président Macron, «un partenariat renouvelé» et «co-construit». Dans cette optique, son MAE rencontre à Addis-Abeba le président sortant de la Commission de l'UA, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, après un entretien avec le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, pour leur exposer la vision française d'un renforcement des institutions multilatérales, une «résolution des crises» et les solutions aux enjeux climatiques. Un beau programme.