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Le cinéma, les béquilles et le futur antérieur
L'AUTRE REGARD
Publié dans L'Expression le 10 - 12 - 2006

Ce regard rapide permet de voir l'étendue de la crise du cinéma.
La mort de notre ami Mohamed Bouamari, grand poète du cinéma, a donné à voir la tragique situation du cinéma en Algérie, marqué par une lamentable prise en charge et une inflation de discours ronflants. Depuis déjà très longtemps, on évoque une loi sur le cinéma qui viendrait corriger la grave faute commise en 1993 par le ministre de la Culture de l'époque qui a dissous les trois entreprises de cinéma existantes (Caaic, Anaf, Enpa) sans penser un seul instant à des structures de substitution, ignorant totalement les contingences sociologiques particulières d'un pays sous-développé comme l'Algérie. Le cinéma, comme les autres sphères de la vie culturelle, végètent dans un environnement hostile, malgré l'organisation de manifestations ponctuelles qui nourrissent l'illusion et les célébrations posthumes.
Certes, ces dernières années, «L'Année de l'Algérie en France», peu sérieuse et le prochain événement, «Alger, capitale de la culture arabe», ont, peut-être, permis à quelques cinéastes de retrouver les sentiers escarpés de la réalisation cinématographique, mais restent limités dans le temps. L'absence de regard prospectif n'est pas le propre du cinéma uniquement, mais de toute la production culturelle, condamnée au bricolage et au «mégotage» pour reprendre un mot cher au cinéaste sénégalais, Sembène Ousmane. C'est une excellente chose de voir des cinéastes de talent comme Rahim, Ould Khelifa, Benallal et bien d'autres, renouer avec leur métier dont ils ont été obligés de quitter momentanément. Bouamari n'a pas eu la même chose, sacrifié comme un vrai mouton à la veille de l'Aïd El Kebir. Son «mouton» sera absent, malgré les bruits absurdes pour le réanimer. Le cinéaste est bien décédé, emportant avec lui son projet parce qu'il n'avait pas trouvé preneur à Alger. Décidément, Bouamari n'a pas de chance. En 1993-1994, il nous avait demandé de lui élaborer un sujet d'une pièce qu'il devait monter dans un grand théâtre de Marseille, Shahrazade des bas fonds, tel est le titre du projet qui n'avait jamais été réalisé parce qu'il était tombé malade, juste après l'acceptation de la proposition.
Ces temps-ci, malgré l'absence tragique d'une politique culturelle cohérente, quelques cinéastes et des producteurs arrivent, avec les moyens du bord, à entamer la réalisation de films dont on ne connaît pas jusqu'à présent leur destinée éventuelle. Dans un pays où il n'y a presque plus de salles de cinéma et où la vidéo se substitue au grand écran, avec le silence complice des autorités qui laissent faire sans prendre une seule initiative pouvant libérer les initiatives et les salles, il est patent que les choses stagnent. Il faut être courageux pour chercher à distribuer, à produire et à réaliser des villes. Dans quelques pays de la planète, l'Etat intervient pour régler ce type de situations, par n'importe quel moyen. L'absence d'intervention des structures étatiques est mortelle pour le cinéma. L'Algérie ne produit plus de films depuis plusieurs années, ce qui engendre un déficit d'images. Kada Benchiha, vivant à l'étranger a, dans un film-chronique, Le cinéma et moi, dit qu'il serait heureux que la télévision diffuse, esquisse un état des lieux sans complaisance donnant la parole aux uns et aux autres, concluant avec une parole juste de Mohamed Chouikh qui estimait que l'une des erreurs est de confondre économie de marché et braderie. Après la mise en place, après 1990, de coopératives, le privé audiovisuel s'est surtout intéressé aux créneaux rentables comme la publicité, le publi-reportage, les news et parfois les «feuilletons» (sitcom) pour la télévision. Cette situation s'est encore aggravée par le malaise grandissant que vivent les salles de la cinémathèque, sans moyens et sans discours clair. Autrefois, véritables lieux de formation cinématographique, ces salles qui avaient été le théâtre de rencontres avec les grands cinéastes de la planète et qui programmaient de grands cycles, se meurent à petit feu. Dernièrement, lors de la réouverture de la salle de Annaba, fermée depuis le décès de Amar Chetibi, son directeur, les présents à la rencontre organisée à cet effet, n'ont pas manqué de dénoncer cette situation qui perdure, brossant un état des lieux qui aurait été bénéfique s'ils avaient émis des propositions de solutions possibles.
Le cinéma agonise depuis longtemps. Certes, on nous annonce des films tournés ou à tourner mais les choses restent toujours ce qu'elles sont. Une ou deux hirondelles ne feront jamais le printemps, ni faire frémir le mauvais temps dans un pays qui n'arrête pas de célébrer les occasions perdues comme le fameux programme de films du défunt gouvernorat d'Alger ou de «L'Année de l'Algérie en France». Aujourd'hui, on se tourne vers le programme du délirant «Alger, capitale de la culture arabe» de 2007. Est-il possible de rééditer le FESPAC de 1969 qu'avait suivi personnellement Mohamed Seddik Benyahia, alors ministre de la Culture et de l'Information et supervisé par Boumediene dans un contexte aussi pauvre sur le plan culturel?
On parle encore, ces jours-ci, de l'ouverture prochaine du fameux Centre national du cinéma et de projets de studio qui n'en finissent pas de recommencer. Il est aussi, chaque fois, souligné l'adoption prochaine d'une loi sur le cinéma dans un pays où on ne forme plus les métiers du cinéma depuis la fermeture de l'Institut national du cinéma en 1966-1967. Au moins, à un moment donné, c'est-à-dire vers les années 70, on envoyait des étudiants se former dans les pays de l'Est et dans l'ex-Urss. Aujourd'hui, l'Ismas (Institut supérieur des métiers des arts et du spectacle), censé s'occuper de la formation cinématographique est encore empêtré dans des questions de statut et de prérogatives. Plus de structures du cinéma ni de substitut possible. La décision de dissoudre les entreprises cinématographiques (Caaic, Anaf et Enpa), sans réfléchir à un ersatz possible qui ne pouvait pas être forcément public constitue une grave erreur mettant en péril le devenir de l'image dans notre pays. Ce type de mesures obéit à une illusoire économie de marché qui méconnaît la spécificité de l'art cinématographique et les fonctions de l'image filmique. Certes, depuis l'indépendance, les entreprises en charge du cinéma en Algérie ont souvent été défaillantes et manquant tragiquement de projets sérieux et viables, mais la mauvaise gestion de ces structures ne pouvait justifier le verrouillage systématique et presque définitif de l'image filmique. Partout, en Europe par exemple, le cinéma reçoit de sérieuses aides de l'Etat, parce qu'il est, avant tout, un service public doublé d'une entreprise commerciale et le lieu de cristallisation et d'articulation de l'image du pays.
Paradoxalement, c'est en Algérie, où le FLN de la révolution utilisa énormément le cinéma comme arme de combat et de propagande que l'image déserte les contrées de l'imaginaire et les lieux du réel. René Vautier, Jacques Charby, Chanderly, Lakhdar Hamina et bien d'autres producteurs d'images, au même titre que les sportifs et les comédiens, avaient pour mission de mettre le cinéma au service de la révolution. Le cinéma était donc un espace de libération. Ce n'est pas sans raison que les premiers dirigeants de l'Algérie indépendante ont accordé un grand intérêt à l'art cinématographique et à la formation des techniciens du cinéma, n'imaginant nullement la situation vécue actuellement par l'industrie cinématographique. Les mêmes structures qu'on tente de mettre en place existaient déjà. Certes, les conditions politiques et culturelles ne sont plus les mêmes. L'Etat prenait le contrôle des salles de cinéma (il y en avait environ 400), de la télévision, des théâtres et d'une partie des maisons d'édition. En 1964, l'Office des actualités algériennes (OAA) est créé. Les salles de spectacle étaient gérées par les mairies. Le CNC (Centre national du cinéma) et l'INC (Institut national du cinéma) voient le jour mais comme toujours, chez nous, ils ont vite disparu.
Juste après cette période, c'est-à-dire durant les années 70, les autorités en place avaient cherché à faire jouer au cinéma un rôle d'illustrateur du discours politique. C'est ainsi qu'ont vu le jour des films comme Noua de Abdelaziz Tolbi et ce qu'on avait appelé pompeusement, à l'époque, le cinéma djedid représenté essentiellement par les films de Bouamari (Le Charbonnier) ou de Lamine Merbah (Les Déracinés) et de Amar Laskri (Patrouille à l'Est). Le cinéma se mettait au service de mesures politiques précises, comme d'ailleurs une partie de la représentation artistique et littéraire. Mais cette époque dominée par l'Oncic a permis également la formation de nombreux réalisateurs et techniciens algériens en Algérie et à l'étranger (Vgik de Moscou, Lodz, Idhec, Insas, IAD, Clcf de Paris...) qui, pour la plupart, chôment ou se sont convertis dans d'autres créneaux. Certes, quelques-uns se sont installés en France ou au Canada. Seul Merzak Allouache semble s'affirmer. Son film Chouchou a fait un tabac dans les salles françaises. Ses autres films ont eu moins de chance, même s'ils avaient brillé dans de nombreux festivals, notamment aux Journées cinématographiques de Carthage où il avait décroché le Tanit d'or.
Les réalisateurs formés à l'INC allaient aussi commencer à s'affirmer. Les thèmes sociaux se frayaient un chemin dans un univers dominé par la politique. Mohamed Zinet, un homme-orchestre, va avoir la géniale idée de transformer une commande de la wilaya d'Alger en un film satirique retrouvant les espaces mythiques du théâtre de Ksentini et de Allalou. Merzak Allouache avait mis en scène son film-culte, Omar Gatlato qui avait agréablement surpris un public retrouvant les images de la culture de l'ordinaire, comme dans le cinéma italien.
Ce n'était nullement une grande nouveauté d'autant plus que la cinémathèque, au départ dirigée par Ahmed Hocine, qui avait laissé la direction quelque temps après à Boudjemaâ Karèche, devenait un véritable espace de formation et d'information où passaient les grands films et les grands cinéastes. Ainsi, découvrait-on le cinéma novo, le néo-réalisme italien, la nouvelle vague française (Truffaut, Godard...) à tel point que de nombreux films algériens reprenaient énormément de plans, d'images et d'idées de films étrangers qui parcouraient sans cesse la représentation artistique. L'impact de la cinémathèque sur le fonctionnement de l'écriture filmique est important. Une lecture immanente des films algériens nous permettrait de découvrir de nombreuses traces explicites et implicites de productions cinématographiques projetées à la cinémathèque. Nous connaissons l'importance du cinéma italien, de la nouvelle vague et du Brésilien Glauber Rocha dans la formation de nos cinéastes.
Aujourd'hui, c'est le vide sidéral qui marque un cinéma qui devrait être considéré comme un service public et qui pourrait retrouver ces images-symboles, témoins de toute une période marquée par une grande passion et un extraordinaire enthousiasme permettant à Tolbi, de nous offrir son admirable Noua, à Zinet, son film satirique, Tahia ya Didou, à Hamina, son chef-d'oeuvre, Le vent des Aurès, à Beloufa, l'inoubliable Nahla et à Tsaki, ses films singuliers trop empreints de poésie et marqués d'une extraordinaire sensibilité. Tous les genres semblent voués au silence. Ce qui est certain, c'est que tous les circuits du cinéma vivent un vide inimaginable. Il n'est pas question de parler de production sans évoquer les deux autres constituants de cette triade qui constitue l'économie du cinéma: distribution et industrie.
Ce regard rapide permet de voir l'étendue de la crise du cinéma marquée par de multiples absences et un vide apocalyptique.


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