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L'artiste précoce
LE FABULEUX DESTIN DE BAYA
Publié dans L'Expression le 12 - 03 - 2007

«Baya faisait corps avec son oeuvre», écrivait Edmonde Charles Roux, rédactrice à la revue Vogue.
A l'occasion de la Journée internationale de la femme, l'Algérie célèbre cet événement en rendant hommage aux femmes pionnières dans leur domaine et qui avaient travaillé à une époque où l'accès à l'art et à l'écriture, entre autres, était difficile à la femme algérienne de l'époque. On relève, notamment, cet hommage rendu récemment aux premières femmes journalistes du pays par un quotidien national qui avaient exercé leur métier dans un créneau aussi difficile, en relevant le défi et le combat pour contribuer, à leur manière, à l'indépendance de l'Algérie. Parmi les femmes qui se sont imposées sur la scène «prématurément» et avant même la révolution de novembre 1954, on cite l'exemple de l'artiste Fatma Haddad ou «la douce Baya», qualificatif artistique «inventé» par Edmonde Charles Roux à Baya la dessinatrice qui est née à Bordj El Kiffan, ex-Fort de l'eau (20 km à l'est d'Alger) en 1931. Orpheline à l'âge de cinq ans, elle fut adoptée par sa grand-mère qui travaillait comme domestique dans une ferme appartenant à une famille de colons. C'est la soeur de la propriétaire, une certaine Marguerite, épouse d'un amateur d'art, qui a découvert ses talents et ses penchants pour la peinture et le dessin. Dans ce sens, «la petite douée», et pour l'occuper, on lui donna des crayons de couleur, du papier et de la glaise et c'est à partir de là qu'elle a pu «s'imposer» et attirer les regards vers elle, alors qu'elle n'avait que 13 ans, en produisant des oeuvres propres à elle. J'ai commencé très jeune. A cinq ans environ, j'avais trouvé une revue pour enfants et je m'étais mise à copier les dessins. Alors, on m'avait dit: «Ce n'est pas bien, c'est défendu, ça ne sert à rien de copier. Si tu veux peindre, peins ce qui te passe par la tête, mais il ne faut jamais recopier» avoua-t-elle à un journaliste d'Algérie Actualité en 1982. A l'âge de 15 ans, un célèbre marchand d'art, Aimé Maeght, lui rendit visite et tomba «amoureux» d'une gouache à elle en lançant avec spontanéité et grande joie: «C'est cela que je veux exposer!»
Picasso, Breton et les autres
Une année plus tard, l'artiste de Blida pénétra avec succès dans la cour des grands en exposant douze grandes gouaches à Paris, au niveau de la galerie Maeght, en remportant un large succès. «Ce jour-là, elle était une véritable princesse orientale surtout avec son seroual à rayures dorées et babouches brodées», nous dira l'un de ses fils, Othmane, qui nous a ébahis lorsqu'il nous a montré ces vêtements traditionnels, ô combien très bien conservés, de sa toute première exposition. En 1948, Baya qui avait aussi «la main» de potière et de sculptrice et dont les oeuvres sont restées intactes chez elle, a fait la connaissance du grand artiste Picasso à Vallauris (France) lors d'une exposition. «Picasso faisait à l'époque ses fameuses assiettes. Nos ateliers étaient voisins et il venait de temps en temps me rendre visite. Nous discutions. Parfois, nous mangions le couscous ensemble. Des gens ont dit qu'il m'avait montré comment travailler. Pas du tout. Chacun travaillait en fait de son côté. C'était pour moi, d'une certaine manière, un choc. Connaître tout ce monde, voir tant de choses. Je n'étais pas habituée.», disait-elle au journaliste du défunt hebdomadaire Algérie Actualité. Les écrits sur elle par des critiques connus de l'époque, ont fait le tour des journaux et des revues spécialisées. Le «père» du surréalisme, André Breton, émerveillé par le travail intuitif de Baya, lui consacra un long et élogieux texte dans la revue Derrière le miroir. «Baya qui tient et ranime le rameau d'or». Jean de Maisonseul a écrit: «C'est le mystérieux secret de Baya, qui surgit des sources les plus lointaines du mythe et du rêve dont certains savent retrouver la clef». Edmonde Charles Roux, rédactrice à la revue Vogue et envoyée couvrir l'événement dira: «Baya faisait corps avec son oeuvre.» «Elle m'apparaissait comme un personnage mythique, mi-fille, mi-oiseau, échappé de l'une de ses gouaches ou l'un de ses contes dont elle avait le secret et qui lui venait on savait d'où...». Ma mère qui est de nature silencieuse et qui s'exprimait de la manière la plus aisée à travers les pinceaux, est autodidacte. Elle n'a jamais suivi une quelconque formation. D'ailleurs, l'Ecole des Beaux-arts d'Alger l'avait sollicitée pour donner des cours et elle avait carrément décliné l'offre, car elle voyait que cela ne servait à rien du moment que cela était une affaire de don. Bref, elle disait que «l'art n'est pas à imposer, il est dans le sang». Ce dernier défendant la vision de sa mère, classée par certains critiques comme étant parmi les peintres embrassant l'école du surréalisme, il ajouta: «On était souvent avec notre maman mais on n'avait rien pris d'elle puisque notre vocation n'était pas artistique tout simplement». Certes, Baya n'a pas enfanté des artistes peintres, mais des artistes de par leur comportement et leur diplomatie, tant appréciés par la population blidéenne puisqu'ils sont conscients du legs de leur mère et tiennent à transmettre cette richesse aux générations présentes et futures. Durant les années 50 et le début des années 60 et au moment où le nom de Baya était sur toutes les langues des grands peintres de l'époque, le mariage dans la tradition avec un artiste, comme elle, était au rendez-vous coïncidant avec le déclenchement de la guerre de Libération nationale, ce qui lui a causé un arrêt de plus d'une décennie en se consacrant uniquement à ses six enfants et à sa vie familiale.
En 1963, Baya entame sa deuxième vie d'artiste et le Musée d'Alger acheta ses oeuvres. Son conservateur, Jean De Maison et sa femme Mireille, amie de Marguerite, celle qui a découvert le «génie» de Baya, continuent d'admirer ses tableaux et de l'encourager davantage. L'artiste blidéenne connaîtra ensuite l'âge d'or de sa carrière en produisant ses plus beaux tableaux, ceux où la fille-fleur se transforme en femme arabesque. Ses dessins demeuraient alors pudiques mais les couleurs y sont toujours éclatantes, presque saturées. Le musicien Hadj El Mahfoudh, qui fut également son mari, ne l'avait pas laissé indifférente puisque les instruments de musique comme le luth, le mandole et la guitare étaient souvent présents dans ses oeuvres, une manière «spontanée» et surtout «naïve» de montrer sa fidélité envers son mari. Ce dernier mourut en 1979 et Baya deviendra alors veuve, une situation qui l'a fait replonger dans son enfance et son adolescence, celle de la fille orpheline et, quelque part, mélancolique, à la recherche de l'amour maternel et cela était visible sur ses oeuvres de l'époque. Néanmoins, elle trouve dans la pratique de son art un moyen de soulagement et de refuge. De même, les succès et les encouragements remportées lors des manifestations internationales ainsi que les distinctions obtenues, sont d'autres motifs de satisfaction et de consécration logique de son oeuvre forgée à coup de labeur et de sacrifice. En 1982, le président français de l'époque, François Mitterrand, l'a honorée après l'inauguration d'une exposition individuelle au musée Cantini à Marseille. Quelques années plus tard, c'est au président Chadli Bendjedid de l'honorer, à son tour, à la suite de sa remarquable contribution à la culture algérienne puisque ses tableaux faisaient le tour du monde. Dans ce sens, depuis sa première exposition de Paris en 1947, Baya exposa à Beyrouth en 1978 à côté d'autres artistes arabes en solidarité avec le peuple palestinien, à Marseille en 1982, lors d'une manifestation appelée «L'Orient des provençaux». Le quotidien français Le Monde avait écrit, lors de cet événement, un certain 10 novembre 1982, «L'Algérie reste, malgré tout, la nation extérieure la plus présente aux expositions de Marseille, notamment grâce à l'étincelante rétrospective de Baya, cette femme peintre autodidacte, échappant à toutes les classifications établies, et l'un des sommets des manifestations marseillaises». Elle a exposé, également, à La Havane (Cuba) en 1986, à Bruxelles en 1989, au Koweït en 1990, à Washington en 1994, au Sharjah (Emirats arabes unis) en 1995, à Tunis en 1996, à Thessaloniki (Grèce) en 1997, et enfin, à Ankara (Turquie) en 1998. En 2001, une salle d'exposition dédiée à la mémoire de Baya a été inaugurée au niveau du Palais de la culture d'Alger. En 2003, une exposition ayant pour objectif la «rétrospective» de la carrière, ô combien riche, de Baya a eu lieu au niveau du Musée d'Arles, dans le Sud de la France en collaboration avec sa famille où plus de 70 oeuvres y étaient exposées. «En 1996, l'ambassadeur de France accrédité à Alger est venu chez nous pour lui rendre visite et voir ses premiers tableaux. Le diplomate l'a même invitée à partir en France pour fuir le terrorisme et d'être mieux prise en charge, chose qu'elle avait déclinée sans aucune hésitation. L'artiste Denis Martinez, qui vivait à Blida durant cette période, avait fait la même chose pour elle avant de quitter définitivement l'Algérie, mais c'était en vain» nous dit son fils Othmane qui insista sur le fait que malgré les menaces qui guettaient les artistes de l'époque, sa mère continuait, sans aucun souci, à sillonner les rues de la ville des Roses qu'elle admirait en faisant son marché et en allant constamment chez «lahbab», un savoir-vivre qui n'avait jamais quitté Baya jusqu'à sa mort le 9 novembre 1998, 67 ans, âge relativement jeune pour une artiste qui pouvait encore donner. Heureusement qu'elle a été considérée dans son propre pays et notre source nous révéla que la présidence et les ministères avaient acheté un nombre important de ses oeuvres afin de les exposer au niveau des halls et couloirs de ces institutions. Le ministère des Affaires étrangères en avait fait de même pour nos ambassades et chancelleries à l'étranger. Une manière de mieux faire connaître Baya à nos concitoyens vivant dans les quatre coins du monde et d'être la représentante de la femme algérienne. Il faut dire que même le président de la République, M.Abdelaziz Bouteflika est aussi un grand amateur de Baya. Lors de sa première visite à Blida, en 2001, les Blidéens n'ont pas trouvé mieux, pour lui faire plaisir, que de lui offrir un de ses tableaux. Toutefois, la ville chère à Baya, connue pour avoir enfanté des noms et des noms d'artistes, demeure, à ce jour, dépourvue de musée. Un vide à combler pour permettre aux habitants et visiteurs d'admirer les oeuvres d'artistes blidéens dont Baya sur «la terre» de Blida.
L'enfant prodige de Blida
La galerie d'art de la Sonatrach avait rendu un hommage à cette peintre du 6 au 11 mars 2006 à l'occasion de la Journée de la femme en exposant ses tableaux les plus connus à l'instar de Femme en orange, produit en 1948, La grande harpe en 1984, Bougeoir et instrument en 1997, Instruments avec oiseaux en 1989, Femmes avec deux vases en 1947, Femme avec sa fille sous le palmier en 1948. Baya, à l'instar des peintres de sa génération comme Khadda, Racim et Issiakhem, a apporté sa contribution remarquable ayant ouvert la voie à la peinture algérienne contemporaine en lui consacrant un demi-siècle de parcours. Ses oeuvres vont certainement rester pour être admirées par les générations futures. Son fils Othmane, à côté de ses frères, a annoncé qu'un site Internet regroupant la biographie, les oeuvres, des témoignages interviews et articles de presse sur Baya sera créé prochainement par sa famille, qui, merveilleusement, a pu conserver avec «finesse» et «délicatesse» tout son héritage. Plusieurs de ces publications et ouvrages, nationaux et étrangers, ont fait écho et commentaires, comme Derrière le miroir, Tourisme et travail, Travail et culture, Vogue, pendant les années 40 et bien après dans Révolution africaine, Le Monde, les quotidiens nationaux dont L'Expression, le Dictionnaire général du surréalisme et de ses environs, Le Nouvel observateur, Baya, le livre d'art, Jointure, Repères, Tassili, Cahier de l'Adeiao, L'art contemporain arabe, Mémoires algériennes, Alger et ses peintres et surtout le travail sur Baya par The Grove Dictionary of art, dictionnaire sur l'art et qui est considéré comme le plus important travail de référence d'art du XXe siècle. La famille de la défunte envisage également de créer une fondation portant son nom afin de perpétuer «le phénomène» et «le mythe» Baya. Cette dernière, et à travers ses oeuvres, sera sans doute présente lors de la manifestation de: Alger, capitale de la culture arabe qui se déroule au courant de cette année. La création de la fondation aura lieu l'an prochain au grand bonheur de ses admirateurs et de ceux qui ont l'oeil artistique. «On est prêt à mobiliser toutes les oeuvres de ma mère pour honorer notre pays en participant à cet important événement», conclura M.Othmane Mahieddine.


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