La ferveur populaire s'étant emparée très rapidement de la rue cairote la veille du match après la prière du vendredi, quelques confrontations entre ultras égyptiens et supporters algériens ont émaillé le séjour de nos compatriotes. Pourtant, à travers leurs interminables randonnées dans les multiples artères et quartiers populaires de la capitale d'Oum Dounia, les envoyés spéciaux de Liberté, ainsi que leurs confrères et amis d'Info Soir et de Planète Sport, ont pu vérifier, de visu, l'hospitalité, la grande gentillesse et la générosité du peuple égyptien. Aller jusqu'à affirmer, donc, que les incidents enregistrés dans différents points où avaient élu domicile des supporters de l'équipe nationale avaient pratiquement tous comme première étincelle des provocations de nos compatriotes serait faire un grand pas et, franchement, Liberté ne se sent pas capable d'une telle enjambée. Ce qui demeure certain, du reste, est ce qui s'est passé, à titre illustratif, à l'hôtel Europa. Amine Zerrouk, journaliste au quotidien arabophone El-Wasl, établi à Oran, dénoncera, dans une déclaration à Liberté, les incidents “graves” dont il a été témoin. “Au départ, tout était banal. Un groupe d'Algériens attablés à une terrasse de café rue El-Haram, en face d'Egyptiens, une petite provocation des nôtres qui, très sincèrement, ont allumé la première mèche, un échange d'hostilités de langage, une querelle verbale, une altercation puis l'irréparable, à savoir la confrontation directe, avec même des jets de projectiles”, relate ce témoin oculaire. Et d'enchaîner : “Il aura fallu l'intervention de la police. Même un haut responsable de la sécurité est arrivé sur les lieux. Quelques-uns de ses subalternes sont même restés à l'hôtel pour éviter que les confrontations ne reprennent ou toute autre forme de représailles des autochtones. Et franchement, là, les Algériens ont eu très peur et n'ont plus quitté l'hôtel de la soirée.” Beaucoup de témoignages allant dans ce sens alimentaient les discussions dans la rue et les cafés maures. Quelques chaînes de télévision égyptiennes ont même montré des Algériens accomplissant, en groupes, la prière du vendredi, avec aux alentours, un cordon sécuritaire bien visible, tout comme cela était valable depuis mercredi pour les établissements hôteliers où avaient réservé les envoyés spéciaux de la presse nationale. “Il y a même des supporters qui sont restés dans les mosquées de peur d'être attaqués. Du côté d'El-Guiza (le Gizeh, ndlr), la police a même instruit les Algériens de ne pas quitter leurs hôtels et de ne surtout pas sortir dans les lieux publics, afin de ne pas être pris pour cible par les ultras égyptiens. Moi-même, j'ai dû raccompagner un Algérien, assez provocateur et très insolent du reste, jusqu'au coin de la rue, car j'ai vraiment eu peur pour son intégrité physique au cas où ce qu'il clamait venait à être compris par la centaine de jeunes qui défilaient devant mon commerce”, témoigne Essaïd, dynamique propriétaire d'une chaîne de magasins en plein centre-ville. Pas très loin de cette rue marchande, Mohamed, gérant de café de son état, abonde dans le même sens. “Hier, lorsqu'ils se sont rassemblés devant leur ambassade dans le chic quartier Zamalek et réclamé des tickets d'entrée au stade pour voir le match, une quinzaine de supporters algériens ont commencé ensuite à crier des slogans anti-égyptiens. Je leur ai conseillé de se taire, car ils se trouvaient en face d'un collège du cycle moyen, mitoyen de la représentation diplomatique de votre pays. Si des élèves, de quinze-seize ans, étaient sortis en ce moment précis d'une seule classe, il serait inéluctablement arrivé malheur à vos compatriotes. C'est pourquoi je les ai exhortés à faire preuve de retenue et d'éviter de prendre un tel risque inutile en étant si inconscients”, souligne notre interlocuteur. Des témoignages exhaustifs mais assez révélateurs de l'ambiance un brin électrique qui a prévalu, la veille du match, dans différents points de la ville, précisément là où des supporters algériens — fort heureusement pas tous — ne semblaient pas avoir saisi la dangerosité de certains actes provocateurs qui auraient très bien pu leur coûter très cher.