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“Le ministre a corrompu des magistrats”
MOHAMED RAS EL-AIN ACCUSE
Publié dans Liberté le 04 - 11 - 2003

l'identité des magistrats touchés par le mouvement n'a pas été divulguée
Le black-out
Ce sont toutes les cours du pays qui se retrouvent aujourd'hui paralysées, en attendant la publication des listes des personnes concernées.
Jusque tard dans la journée d'hier, aucune information officielle n'a filtré sur l'identité des magistrats touchés par le mouvement opéré la veille par le président de la République. Pratiquement l'ensemble du corps était dans l'expectative. “Nous attendons les nouvelles, puisque nous sommes tous potentiellement concernés”, dira Djamel Aïdouni, président par intérim du Syndicat national des magistrats (SNM) et juge d'instruction au tribunal d'El-Harrach. Une magistrate de la Cour suprême nous a confirmé le black-out entretenu autour de la liste des dix présidents de cour et onze procureurs généraux relevés de leurs fonctions, et celle de leurs remplaçants. “Ce mouvement était prévisible. Nous l'attendions effectivement pour ce mois de ramadan”, a ajouté notre interlocutrice. Au ministère de la Justice, on n'en savait pas plus. “Nous n'avons pas encore reçu la liste des magistrats désignés par le président de la République”, a assuré le chef de cabinet du garde des Sceaux. Il nous a indiqué, toutefois, qu'ils seront installés à leurs nouveaux postes vers la fin de la semaine en cours.
Selon certaines indiscrétions, il a été mis fin aux fonctions des présidents des cours de Blida, Biskra, Annaba, Constantine et Alger. Bien que Mohamed Zitouni, président de la cour d'Alger, ait certifié, hier matin, à un de ses proches, qu'il n'était jusqu'alors destinataire d'aucune notification dans ce sens, il fait probablement partie des magistrats partants. Le président de la République ne lui a pas pardonné, sans aucun doute, sa promptitude à révéler qu'il avait appris la décision de justice interdisant le congrès extraordinaire du FLN, lors du journal télévisé de 20 heures. Sa mise à l'écart a été comprise par l'opinion publique comme une grave entorse à la régularité des procédures en justice.
Il est possible que le mouvement dans le corps des magistrats, décidé par le chef de l'Etat, réponde à une stratégie bien précise : sanctionner ceux qui sont proches de Ali Benflis, secrétaire général du FLN, et gratifier ceux qui défendent les intérêts de son adversaire farouche, Abdelaziz Bouteflika en l'occurrence. Cette thèse ne sera confirmée ou infirmée que le jour où seront connus les noms des magistrats concernés par le changement.
S. H.
La justice, selon Bouteflika
Lentement mais sûrement. Bouteflika est en train de faire le tour de ses réformes qu'il dépoussière et met en chantier, tant bien que mal, au crépuscule de son mandat. Sa course contre la montre se fait à la vitesse de l'éclair, à telle enseigne qu'il tente l'incroyable mission de faire bouger une Algérie presque en panne avant le rendez-vous d'avril 2004. Coup sur coup, Abdelaziz Bouteflika introduit les nouvelles mesures contenues dans la réforme de l'école, met en place une commission chargée de la révision, en urgence, du code de la famille et enfin procède à un large mouvement dans le corps des magistrats (procureurs généraux et présidents de cour ).
En touchant à la justice, clé de voûte de l'Etat de droit mais aussi secteur “emblématique” de la corruption, des passe-droits et de l'abus de pouvoir, Bouteflika a certainement plusieurs tours dans son sac. Si, en valeur absolue, on ne peut raisonnablement trouver matière à critiquer de telles mesures qui, théoriquement, visent à extraire les magistrats du clientélisme, du népotisme ou plus prosaïquement de la corruption, le contexte dans lequel elles interviennent autorise d'autres lectures. Pourquoi donc le président de la République a mis quatre années pour entreprendre la réforme de la justice ?
Pourtant, le candidat du consensus a charmé tout son monde en 1999 par sa vision novatrice et moderniste de la justice. S'ensuit l'installation de la fameuse commission présidée par Mohand Issad lequel, par sa réputation et sa compétence, avait donné un surcroît de crédibilité au projet du Président.
Le peuple avait cru sérieusement que le temps de la justice aux ordres était désormais révolu. Ceci, d'autant plus que la commission de réforme de la justice a “accouché” d'une série de recommandations dignes des anciennes démocraties occidentales. Mais l'engouement populaire était juste pour un temps ; le temps d'une élection qui autorise toutes les formes de promesses, y compris celles qui relèvent des travaux d'Hercule, comme la réforme de la justice précisément. Quatre ans plus tard, le peuple, sevré de justice, ne voyant rien venir, a vite fait de déchanter. L'ambitieuse réforme de la justice n'est pas pour demain et le rapport de la commission Issad moisit dans les tiroirs de la chancellerie qui a changé de responsable quatre fois en autant d'années sous Bouteflika.
La “consommation” de quatre ministres de la Justice est également un signe qui ne trompe pas sur les intentions du Président. C'est que, a priori, aucune des personnalités qu'il a lui-même choisies pour mettre en œuvre la réforme ne cadre avec son plan stratégique : s'assurer la mainmise sur un secteur dont l'apport pourrait être crucial pour la reconquête du palais d'El-Mouradia.
Autant retarder le plus longtemps possible la concrétisation d'une réforme qui risque d'immuniser la justice contre toute forme d'instrumentalisation politicienne. Et l'épisode de l'annulation de la tenue du congrès extraordinaire du FLN, le mois dernier, confirme bien cette tentation de mettre la justice au service d'une cause politique qui consiste à barrer la route — par un artifice judiciaire où une argutie juridique — à Ali Benflis via l'invalidation du VIIIe congrès de son parti. Autre pièce à verser au dossier de Bouteflika : le limogeage — à distance — du président du Syndicat national des magistrats, Mohamed Ras El-Aïn qui a osé dénoncer l'irrégularité de la procédure — prise de nuit — portant interdiction de la tenue du congrès du FLN.
À cinq mois de l'élection présidentielle dans laquelle il sera l'homme à abattre, Bouteflika tente, vaille que vaille, de mettre tous les atouts de son côté.
Le rôle du secteur de la justice dans l'organisation de l'élection n'étant pas négligeable, ce large mouvement au sein des magistrats ne peut logiquement échapper à la suspicion à la veille de la convocation du corps électoral. Surtout que ce mouvement a touché le président de la cour d'Alger, Zitouni, qui a, lui aussi, dénoncé le fait qu'il ne soit pas informé de la décision d'invalider le congrès extraordinaire du FLN.
Mesure disciplinaire ? Sans doute. C'est certainement aussi cela la justice, selon Bouteflika.
HASSAN MOALI
Le professeur Mohand Issad à Liberté
“Les magistrats subissent de fortes pressions”
Liberté : Le chef de l'Etat a procédé, dimanche soir, à un mouvement dans le corps des magistrats. D'aucuns pensent que cette décision vise à mettre l'institution judiciaire au service du Président-candidat. Qu'en pensez-vous ?
Mohand Issad : Le problème me semble ressortir davantage de l'opportunité politique que du jeu de la loi. Il n'y a rien à dire que ce qui a été dit. Les journalistes ont saisi ce matin (hier, ndlr) la portée de cette opération.
Justement, la question de l'instrumentalisation de la justice à des fins électoralistes est plus que jamais posée. Cette utilisation s'est vérifiée dans l'affaire du FLN. À votre avis, qui est en cause : le pouvoir politique ou les magistrats qui ont accepté de faire son jeu ?
Dans cette affaire, il faut s'en prendre aux seuls magistrats qui ont bien voulu jouer le jeu. Après tout, on rencontre dans chaque profession des gens qui font correctement leur travail sans courber l'échine. Il n'y a pas de raison, dans cette affaire particulièrement, de chercher des boucs émissaires ailleurs.
Les magistrats qui ont joué tel ou tel jeu l'ont fait certainement en toute connaissance de cause. Cependant, je n'exclus pas l'existence de pressions parfois très fortes. Mais, cela n'est pas nouveau. Il n'y a rien à dire de plus, sauf que la lutte pour l'Etat de droit doit se poursuivre.
Cette lutte, du moins dans le secteur de la justice, semble aléatoire quand on sait que les principaux concernés, les magistrats, sont privés de leur indépendance. Quel commentaire faites-vous de la guerre qui déchire actuellement le Syndicat national des magistrats ?
Je suis avocat. Parfois, au Conseil de l'ordre, lors des élections, il y a des remous, mais on ne parle pas de coup d'Etat. Il appartient aux magistrats eux-mêmes de régler leurs problèmes. Je peux seulement émettre le vœu que cela se fasse dans le cadre de la loi.
N'avez-vous pas de regrets en constatant que l'indépendance de la justice pour laquelle vous avez milité lorsque vous présidiez la Commission nationale de réforme (CNRJ) est toujours un leurre ?
La CNRJ a fait un travail. Le vœu de toute commission est de voir son travail appliqué. Maintenant, il faut croire qu'il y a des obstacles d'ordres technique et politique à la mise en œuvre de cette réforme de la justice. Je remarque qu'il en est de même pour l'école et l'Etat. Donc, apparemment, c'est tout le pays qui a besoin d'une réforme.
Propos recueillis par Samia Lokmane
Putsch au syndicat des magistrats
Ras El-Aïn accuse le garde des Sceaux
L'ex-responsable du SNM a eu des mots très durs, hier, pour les responsables du ministère de la Justice.
Le président “déchu” du Syndicat national des magistrats s'est expliqué, hier soir, sur les péripéties du dernier conseil national qui lui a retiré sa confiance à la tête du syndicat.
Dans une conférence de presse tenue au siège du journal El Watan, Mohamed Ras El-Aïn accuse ouvertement le ministère de la Justice d'avoir concocté un putsch contre sa personne. “Des magistrats ont été menacés. Ils ont reçu des appels téléphoniques, de nuit, leur intimant l'ordre de se déplacer à Alger pour assister au fameux conseil national convoqué à la hussarde”, révèle l'orateur. Selon lui, la chancellerie a instruit les différentes cours à l'effet de prendre en charge les déplacements en avion des concernés. “C'est une preuve que ces gens — les organisateurs du putsch — sont assistés dans leur tâche par l'administration”, soutient-il. D'ailleurs, Ras El-Aïn n'a pas hésité à pointer du doigt le ministre du travail, Tayeb Louh, par ailleurs ex-président du même syndicat, qui l'avait, a-t-il dit, dissuadé de tenir sa première conférence de presse au lendemain de l'interdiction du congrès extraordinaire du FLN par la cour d'Alger. “Pour qui roule Tayeb Louh ?”, s'interroge Ras El-Aïn, avant d'affubler le ministre du qualificatif de “redresseur”.
Au reproche qui lui a été fait de se livrer à une activité politique en dénonçant l'instrumentalisation de la justice dans l'affaire du FLN, le magistrat, indigné, rétorque : “Qui fait de la politique, c'est Louh ou moi ?” Il se défend, d'autant plus qu'il se place en dehors de la bataille rangée que se livrent les protagonistes de la prochaine élection présidentielle pour le contrôle de l'appareil FLN. Ras El-Aïn suggère aux journalistes que c'est son souci d'extraire la justice des luttes politiciennes qui lui a valu son éviction de manière peu orthodoxe.
En effet, le conférencier rejette en bloc et son limogeage et la légitimité du nouveau conseil, constitué en dehors de l'assemblée générale. Sur ce point précis, Ras El-Aïn met en exergue les anomalies, voire les violations qui ont émaillé la rencontre du 30 octobre dernier qui a abouti à l'élection d'un nouveau président. “Les magistrats ont reçu des convocations 48 heures avant la réunion, sans date, ni ordre du jour, ni même une signature”, s'écrie-t-il.
Et de brandir la convocation qui lui a été adressée, alors qu'en tant que président, c'est à lui qu'échoit, en vertu des statuts, le rôle de convoquer le conseil. Ras El-Aïn conteste la légalité de ce “comité”, comme il l'appelle, puisque, même “le quorum n'était pas atteint”. Il conteste, également, sa représentativité en ce sens que certains membres ne figurent plus dans les sections locales et d'autres portent des mandats autres que ceux de leur wilaya, à l'image de celui du bureau exécutif de Boumerdès qui était venu sous la bannière de… Médéa. Bien sûr, Ras El-Aïn exhibe à chaque fois des documents pour étayer ses révélations et confirmer les “dérapages” commis par les partisans de Aïdouni, son remplaçant catapulté à la tête du syndicat. Plus grave encore, l'orateur jette un véritable pavé dans la marre en déclarant : “tous ceux qui sont venus — à la réunion du conseil national — sont originaires de l'Ouest, alors que les magistrats de l'est du pays furent tout simplement exclus.” “Qu'allez-vous faire maintenant pour mettre de l'ordre dans votre syndicat ?”, avons-nous demandé. Bien qu'il ait reconnu “l'illégitimité, l'illégalité, le faux et usage de faux” qui ont jalonné, d'après lui, tous les processus de sa destitution, Ras El-Aïn se garde de porter l'affaire devant la justice. “Je suis légitime, c'est à eux de saisir la justice, et si cette dernière leur donne gain de cause, je m'y plierai”, a-t-il, tout simplement, déclaré. Interrogé sur les motivations du dernier mouvement dans le corps des magistrats décidé par le chef de l'état, Ras El-Aïn considère cela comme un “mépris et un deuxième coup asséné à la corporation, après les vicissitudes vécues par leur syndicat”.
Samia Lokmane et Hassan Moali
Ras El-Aïn indésirable dans les hôtels d'alger
Il semble bien que Ras El-Aïn soit persona non grata dans les hôtels de la capitale. En effet, ayant sollicité les directeurs du Riadh et d'Essafir pour servir de cadre à sa rencontre avec les journalistes, le magistrat encombrant a essuyé des refus polis de la part de ses interlocuteurs. Le hic est que ces derniers ont accueilli favorablement sa demande, au départ, avant de se rétracter à la dernière minute. Motif : une instruction expresse de la wilaya d'Alger leur intimant l'ordre de réclamer à Ras El-Aïn une autorisation de l'administration ! En désespoir de cause, le magistrat a été contraint de se réfugier dans les locaux du journal El Watan.
Le chef de l'état étend sa mainmise sur les institutions
À la cour de Bouteflika
Sans sacrifier à la nécessaire explication que commande un tel changement dans une institution clé de la République, le mouvement dans le corps des magistrats auquel vient de procéder le président de la République est justifié par la réforme engagée dans le secteur de la justice. “Dans le cadre de la démarche de réforme globale de la justice, le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, a procédé à un mouvement au sein du corps des magistrats, conformément aux dispositions de l'article 78 de la Constitution, de l'article 3 du statut de la magistrature et de l'article 39 du code de procédure pénale”, explique laconiquement le communiqué de la présidence de la République.
Ni la liste nominative des magistrats touchés par ce mouvement, encore moins les griefs retenus contre ceux qui sont touchés par la décision de “fin de fonctions” n'ont été divulgués. On aurait été sans doute mieux éclairé si, en guise d'explication, on avait relevé en quoi les magistrats “jugés indésirables” constituaient une entrave à la réforme prônée, puisque tel semble être le mobile de leur mise à l'écart.
À vrai dire, et les non-dits sont nombreux, les raisons sont ailleurs, comme dirait l'autre. Et à bien des égards, le mouvement qui vient d'être opéré semble beaucoup plus obéir à des considérations purement politiciennes et à des schémas de pensée bassement régionalistes qu'à un souci de réforme. Faut-il rappeler, dans ce contexte, que ce mouvement intervient seulement quelques jours après le putsch organisé par certains magistrats acquis au cercle présidentiel contre le président du Syndicat national des magistrats, Mohamed Ras El-Aïn. “Ils veulent entraîner le syndicat dans un courant politique”, expliquait, à juste titre, ce dernier, au lendemain de la tenue du “conseil parallèle” qui a procédé à sa destitution.
Certes, on peut légitimement associer cette réaction à une déception mal dissimulée d'un homme “déchu”, mais force est de constater que les effluves des contours de ce qu'allait être le mouvement dans le corps des magistrats étaient déjà perceptibles dès la tenue de l'assemblée du SNM, le 9 octobre dernier. Lors de cette assemblée qui s'est déroulée dans des circonstances houleuses, des clivages régionaux entre des magistrats acquis à Benflis et ceux qui “roulaient” pour Bouteflika étaient apparus au grand jour. Au motif qu'il s'est mêlé de politique pour avoir dénoncé l'instrumentalisation de la justice dans l'affaire du FLN, les opposants à Ras El-Aïn avaient réussi à “perturber” l'AG. Résultat des courses : l'assemblée a été reportée à juin, soit après l'élection présidentielle. “C'est une lutte entre Batna et Tlemcen”, avait résumé ce jour-là un magistrat sous le sceau de l'anonymat. Et curieusement, c'est le chef de file de la fronde, lors de l'AG avortée du 9 octobre, qui se retrouve, aujourd'hui, comme président de l'autre aile du syndicat qui s'est réunie vendredi dernier.
Outre qu'il est originaire de Tlemcen, il avait, pour rappel, instruit l'affaire du directeur du quotidien Le Matin, Mohamed Benchicou. L'éclatement du syndicat est devenu, depuis, effectif et les luttes pour la neutralité de la justice illusoires. Selon certaines sources, les magistrats qui viennent d'être promus sont connus pour avoir mené les hostilités contre Mohamed Ras El-Aïn et seraient très proches du cercle présidentiel. En les gratifiant d'une promotion, Bouteflika ne fait donc que les remercier pour services rendus. Ainsi, le chef de l'Etat “se taille une cour” à la mesure de ses ambitions.
Et la justice, c'est connu, se révèle toujours décisive dans les rendez-vous électoraux. Décidément, on a comme l'impression d'évoluer dans la cour du roi Pétaud, où règne la confusion, où chacun, présentement le Président, agit à sa guise.
KARIM KEBIR


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