Après son lancement dans la fabrication du médicament générique, l'Algérie est-elle en mesure de s'introduire dans la fabrication du médicament bio-similaire ? Par définition, le bio-similaire est un médicament biologique qui est similaire à un médicament biologique de référence, un princeps. Ce qui rend la fabrication de ce type de médicaments, pas encore très répandu dans le monde, tout à fait différente de celle du générique. Ce dernier étant fabriqué à base de produits chimiques finis, alors que le bio-similaire est fabriqué à base de matières premières biologiques, de cellules vivantes. Ce qui fait, expliquent les spécialistes, que le lancement de la fabrication des bio-similaires nécessite au préalable la mise en place d'un tout nouveau cadre législatif, toute une réglementation spécifique et adaptée, outre les moyens logistiques et humains. Quelle réglementation devra adopter l'Algérie ? Quel bio-similaire pourra-t-on fabriquer ? Qui le fabriquera, et selon quelles normes de référence ? Pour tenter de répondre à ces questionnements, le géant international du médicament, les laboratoires Roch, a organisé, hier à Alger, une rencontre, première du genre, sous le patronage du ministère de la Santé. Intervenant à l'ouverture des travaux, le secrétaire général du ministère de la Santé, son ministre ayant fait faux bond, a déclaré que l'événement se présente pour son département comme une aubaine pour “écouter les experts à même de pouvoir lancer un travail de prospection dans la perspective de se lancer dans la fabrication du bio-similaire”, reconnaissant que notre pays “accuse un retard considérable”. La fabrication des bio-similaires intéresse l'Algérie dans la mesure où elle s'apprête à devenir “un dragon du médicament” avec la mise en place, d'ici 2020, de l'ambitieux projet de construction du pôle technologique de Sidi-Abdallah, récemment annoncé en grande pompe. Cependant, M. Kheladi Bouchenak, SG du ministère, se montre à présent “très prudent” vis-à-vis du “long processus” que nécessiterait le lancement de la fabrication des bio-similaires. “Aujourd'hui, nous nous préparons à cette question certes, mais il faudrait attendre que l'Algérie soit capable de se lancer dans la fabrication du bio-similaire ; c'est un processus très compliqué et qui demande une réflexion approfondie et la mise en place de mécanismes adéquats pour assurer une meilleure maîtrise et imposer un contrôle rigoureux de cette production”, a-t-il commenté. C'est dire que la fabrication de bio-similaires n'est pas pour demain. Pourquoi donc cette journée “anticipée” et organisée par un géant mondial du médicament, pourtant censé défendre ses produits de référence ? Les responsables des laboratoires Roch ont-ils d'autres velléités derrière la tenue de cette journée ? En fait, entendent-ils réellement faire la promotion des bio-similaires, ou bien s'agit-il, pour eux, de préserver la pérennité de leurs parts de marché en Algérie ? Autant de questions que les participants n'ont pas manqué de se poser, en aparté. L'on sait que l'Algérie avait déjà passé des accords de partenariat avec une multitude de laboratoires américains pour le lancement du centre biotechnologique de Sidi-Abdallah, comme l'ont rappelé des représentants du mouvement associatif, que nous avons approchés en marge des travaux et qui ne manquent pas d'alerter contre la propagande que pourraient “mener les multinationales du médicament contre les bio-similaires”. À signaler, enfin, que les travaux d'hier, enrichis par les interventions d'éminents experts étrangers, devaient être clôturés par l'élaboration d'une série de recommandations, autour d'une table ronde prévue dans l'après-midi, et à laquelle devait prendre part le ministre de la santé, Djamel Ould-Abbès. Farid Abdeladim
