À force d'abuser du recours à la grève, un droit pourtant reconnu constitutionnellement, les syndicats des enseignants ont perdu l'estime et la solidarité dont ils avaient bénéficié au commencement du mouvement revendicatif. La levée de boucliers des associations des parents et des écoliers eux-mêmes fatigués de faire les frais, chaque année, d'un conflit dont ils sont les premières victimes, a été ce signal que le soutien au combat, quand bien même légitime, avait atteint ses limites. Plusieurs raisons peuvent être recensées pour expliquer l'attitude plus que légitime des élèves dont l'avenir scolaire est déjà fortement compromis par la faillite des réformes successives du système pédagogique. Au-delà des revendications salariales, les enseignants n'ont à aucun moment alerté l'opinion publique sur les défaillances du livre scolaire dont les erreurs de langue, par exemple, sont devenues monnaie courante au point de douter des principes généraux de la grammaire ou de la syntaxe, ou de cette tradition purement algérienne instaurée depuis plusieurs années et qui voudrait que l'élève ne révise que les leçons dispensées en cours et non le programme entier, comme l'exige la norme internationale. On est allé jusqu'à élargir cette absurdité à l'épreuve du baccalauréat justement pour donner l'illusion d'une année scolaire bien remplie alors que, dans la réalité, les lycéens candidats au bac n'ont réalisé qu'une partie du programme en raison de la persistance des mouvements de débrayage du corps enseignant ces dernières années. Bien entendu, il n'est pas question de faire le procès des enseignants qui ne sont pas les seuls responsables du pourrissement. Le gouvernement a également une part de responsabilité. En privilégiant la forme sur le fond et en ouvrant le dossier des salaires sans un débat clair sur le système éducatif, l'état n'a pas su accompagner son effort pécuniaire par une stratégie globale qui rassurerait et impliquerait l'enseignant dans toute réforme de l'école. L'option populiste du gouvernement a produit l'anarchie et permis à toutes les tendances radicales d'émerger et de faire de l'école un véritable champ de bataille. Il est grand temps de penser aux élèves et remettre l'école au cœur du débat afin que les générations futures puissent s'impliquer dans la construction de l'Algérie de demain. n Nom Adresse email