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Les oranges amères 19e partie
Publié dans Liberté le 11 - 01 - 2014

Résumé : Hassen poursuit son récit. Il dévoile à Camélia qu'il n'avait épousé Wassila que parce que cette dernière n'avait plus personne au monde. Il avait senti qu'elle avait besoin d'un homme pour l'épauler et la protéger. Leur amitié s'étant transformé en un lien plus profond, ils décidèrent d'unir leurs destins. Après la naissance de Aimed, Hassen se rendit compte de son erreur.
Hassen poursuit :
-Bien sûr, j'ai pensé au divorce... Mais il y avait Aimed... Cet ange ne devait dans aucun cas souffrir ou devenir le cible de notre colère... Je ne pouvais me permettre de l'abandonner alors qu'il venait à peine d'arriver dans ce monde.
Je suis son père, et il est mon fils.
Je me rendis alors compte que, pour lui, je devrais tout supporter et boire le calice jusqu'à la lie.
C'était le prix à payer pour une bêtise. Je compris que le sentiment que j'avais éprouvé pour Wassila était éphémère... Ce n'était pas de l'amour... C'était juste une attirance... Pourtant, nous avions été heureux...
Cela aurait pu continuer si elle n'avait pas provoqué ces querelles qui nous ont éloignés l'un de l'autre... Nous sommes arrivés jusqu'à nous éviter...
Il soupire encore :
-Et jusqu'à ce jour, ce n'est pas le grand bonheur entre nous. Nous nous supportons... Nous tentons de vivre sous le même toit, mais comme deux étrangers dans un grand hôtel... Aimed grandit et continue d'égayer la maison... Grâce à lui, je réapprends à vivre... Et depuis que je t'ai vue, j'ai su que ma vie serait un peu plus gaie si tu consentais à me donner ne serait-ce qu'un peu de considération.
Camélia garde le silence. Les confidences de Hassen l'avaient captivée. Ce soir, elle enrichira son récit par ces nouvelles révélations.
Son récit ? Elle se mordit les lèvres... Cet homme se livrait à elle en toute transparence, et elle, elle pense à son récit et à ce qu'elle va pouvoir ajouter dans ses paragraphes.
-Camélia, tu m'écoutes ?
-Oui... Oui, bien sûr que je t'écoute. Tu parlais de considération... Tu veux que je sois un peu plus proche de toi... N'est-ce pas Hassen ?
-J'en serais heureux.
-Mais on est déjà amis, puisqu'on est là à discuter ensemble... Je ne sors pas souvent ces derniers temps... Et le nombre de mes amis se compte sur les doigts d'une seule main... Je me suis retirée du monde pour me livrer à ma passion : l'écriture... Tu comprends donc que si je t'ai proposé cette sortie, c'est que tu je t'ai déjà donné cette considération.
Il sourit :
-J'étais certain que seule une femme aussi intelligente que toi pouvait me comprendre... Notre attirance mutuelle l'un envers l'autre n'était pas un hasard... Nous sommes faits pour nous rencontrer, nous connaître, et pourquoi pas nous aimer.
-Tu parles d'amour, alors que tu estimes t'avoir déjà trompé sur ta première relation.
-Je me suis totalement trompé, Camélia... Je ne pouvais comprendre, dans le feu de la passion, que des femmes comme Wassila ne cherchaient qu'une relation conjugale, et qu'à peine mariées, elles changent de comportement... C'est peut-être comme ça que le divorce devient de nos jours monnaie courante.
-Et maintenant, que vas-tu faire ?
Il la contemple un moment avant de demander :
-Que peut faire un homme amoureux ?
Elle sourit :
-Courir après sa dulcinée...
-Oui, mais dans notre cas, l'amour est arrivé sans crier gare...
-Alors, comment vois-tu les choses depuis ?
-Je me sens un peu moins malheureux. Je crois qu'avec le temps, je serais amené à voir plus clairement dans mes affaires. Je ne pourrais pas supporter les manigances de Wassila et ses crises de colère pour le reste de mon existence... Il va falloir que je trouve une solution à cette situation qui dure depuis trois années.
Il se tut et relève les yeux vers elle :
-Si je divorçais, consentiras-tu à devenir ma femme Camélia ?
Elle sursaute, et il le remarque :
-Je t'ai brusquée ma chérie... Je ne suis qu'un idiot... Je...
-Non, l'interrompt-elle... Non... Tu n'es pas un idiot... Tu réagis comme un homme amoureux... Ne crains-tu pas donc de refaire les erreurs du passé... ?
Il secoue la tête :
-Non... Cette fois-ci je parle à une véritable dame... Une intellectuelle doublée d'une sentimentale. Rares sont les hommes qui peuvent résister à de tels atouts, et rares sont les femmes à les posséder.
-Mais moi aussi, j'ai mes tares... Je suis une rêveuse, je vis dans l'imaginaire. Je donne beaucoup de temps à mes récits, et je travaille sur mes projets sans relâche... Je ne suis pas la femme qui sait tenir un foyer ou faire la cuisine.
Il rit :
-Si ce n'est que ça qui te préoccupe, je pourrais facilement y remédier. Je cuisine plutôt bien, et je sais tenir une maison. J'ai vécu seul durant mes années universitaires...
Elle lève la main :
-On n'en est pas encore là... Je ne veux pas que tu quittes Aimed... Il a encore besoin de toi...
-C'est justement lui qui me retient... Mais Aimed grandira et partira. Et je sais que, ce jour-là, je serai submergé de regrets... Je me sentirai tel cette bougie qui avait brûlé pour illuminer les autres.
Y. H.
(À suivre)
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