Ouyahia fait la morale à la presse

Il était hier devant les membres du Conseil de la nation

Le Chef du gouvernement encourage “la critique objective�, mettant en garde, cependant, la presse contre ce qu’il a qualifié de “propension à amplifier les faits�.
Le Chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, a structuré son discours, adressé hier matin aux sénateurs, autour du projet de réconciliation nationale, dont les contours demeurent imprécis pour le commun des politiques et des citoyens. “Je peux donner une définition simple à la réconciliation nationale. Elle représente l’amour de la patrie�, a suggéré Ahmed Ouyahia.
À partir de là , il a apporté les correctifs nécessaires à la compréhension d’une démarche portée à bout de bras par le président de la République, par son gouvernement et aussi par le Parlement — avec ses deux Chambres —, qui vient de donner, à la majorité absolue de ses membres, son feu vert à sa mise en œuvre. “Si nous poursuivons avec conviction la lutte contre le terrorisme, les mains de l’État resteront tendues vers ceux qui veulent déposer les armes�, a indiqué Ahmed Ouyahia. Il a jugé utile de rappeler que l’État respectera les engagements pris envers les repentis dans le cadre de la loi portant rétablissement de la concorde civile, de même qu’il prendra en charge comme il se doit, les familles des victimes du terrorisme. “Il n’est plus question de revenir au schéma politique du début des années 1990�, a-t-il répété, ajoutant qu’il ne convient pas “d’enfermer la réconciliation nationale dans un seul point. Elle représente un très vaste chantier�. Il a confirmé que la violence intégriste a bel et bien reculé. “N’oublions pas pour autant par quoi nous sommes passés, ni les retards que nous avons accumulés dans tous les domaines�.
Le Chef du gouvernement a soutenu que “certains esprits malintentionnés disent que le président de la République et son Chef du gouvernement n’ont pas la même vision de la réconciliation nationale. Je vous dis que c’est faux�.
Il fait de cette mise au point une jonction entre le premier sujet abordé (la réconciliation nationale) et un second d’une nature légèrement différente (des reproches à la presse). “Nous avons besoin de renforcer notre patriotisme et notre nationalisme. C’est l’esprit civique qui construit une société et une démocratie�. Il a signifié alors que “la démocratie et la liberté ne sous-entendent pas anarchie�.
Petite digression sans conséquence ? Ce n’est pas si certain. Le Chef du gouvernement semble avoir préparé son intervention de telle manière à lancer quelques messages à l’opinion publique, à l’opposition et surtout à la presse nationale. “L’État ne souhaite pas faire recours à la violence face aux émeutes. Les citoyens doivent comprendre néanmoins qu’il ne lui est pas possible de régler tous leurs problèmes simultanément�. Plus fermement, il a affirmé que “la violation des lois ne donne raison à personne. S’il y a réellement des failles, nous prendrons les mesures qu’il faut, le cas échéant, la loi sera appliquée�.
Dans le même sillage, il a reproché à la presse d’amplifier les faits et de faire souvent dans l’intox. Il a cité l’affaire des treize bébés décédés à l’hôpital de Djelfa de décembre 2003 à avril 2004. “Un journal a rapporté qu’ils sont morts le même jour�. Il a parlé aussi d’un journal qui a titré à la Une que plus de 500 enfants ont été intoxiqués à la cantine à El-Mohammadia alors “qu’en réalité, ils n’étaient que 48 dont seulement onze ont été gardés en observation à l’hôpital�.
À ce titre, le premier responsable de l’Exécutif a incité la presse “à la critique juste� et la mise en garde contre “la démagogie et la surenchère�. Il a reconnu que le pays peut être assimilé à un grand chantier.
Tout est à faire. “Cessons toutefois de jouer avec le désespoir des gens pour des intérêts personnels�. Il n’a pas trouvé mieux que de revenir, encore une fois, à l’affaire Khalifa, “une escroquerie qui a coûté 145 milliards de dinars�, mais dont on a soigneusement évité d’en faire étalage dans les journaux. “On nous terrorisera, ni par la plume ni par un autre moyen�, a asséné Ahmed Ouyahia, ajoutant que “la sinistrose et le climat d’anarchie sont un obstacle à l’avancée du pays�. Il a revisité ensuite les réformes économiques que le gouvernement s’échinera à mener à bien.
Les sénateurs, qui ont tenu à faire valoir leur droit constitutionnel à présenter une motion de soutien au gouvernement, ont voté son programme à l’unanimité à l’exception de deux abstentions.
S. H.