"Le contrôle doit s'effectuer d'abord à la source, soit à l'échelle du réseau de stockage, où les propriétaires de chambres froides ne maîtrisent pas le processus de fonctionnement des glacières." La chaîne du froid ne tourne pas... rond chez nos cafetiers ! C'est l'ardent constat observé durant les fortes chaleurs d'un été précoce, où il est malaisé d'étancher sa soif aux comptoirs et aux terrasses de cafés du centre-ville. S'il en est une preuve, celle-ci est à épier dans l'inertie des armoires frigorifiques frappées aux logos de limonadiers. Et à l'envie brûlante d'étancher notre soif, la réplique du "cafetier" se veut... glaciale, voire ironique : "Désolé ya kho, on vient juste de remplir le réfrigérateur." C'est l'identique constat au goût saumâtre dûment vérifié dans l'intérieur repoussant d'estaminets de banlieue, où les voyants de réfrigérateurs sont au rouge. Alors, et pour se désaltérer, le mieux est de boire frais auprès de ces petits vendeurs de bouteilles d'eau minérale glacée telle un iceberg qui arpentent le pavé du côté de la rue Patrice-Lumumba et des arrêts de bus de l'avenue du 1er-Novembre à la place des Martyrs. Boire un coup ? Le cas est d'autant tentant, voire alléchant et nous renvoie au souvenir du mythique personnage de "Berred ya âatchane" (ô assoiffé étanche ta soif), qui arpentait autrefois la "z'niqa" (venelle) Amar-El Kama à la Basse-Casbah. Aujourd'hui qu'il y a une relève, ces petits débrouillards occupent la place à l'estuaire des arcades de Bab Azzoun, où s'agglutine une foule d'assoiffée autour d'une bassine, où marinent des bouteilles d'eau minérale au milieu d'énormes blocs de glace. S'agissant des épiciers, force est d'admettre qu'ici, c'est plutôt le client qui tourne en rond autour des cageots et des packs de bouteilles de limonade stockées à même la façade et sous le soleil ! Et pour cause, l'absence du ronronnement du réfrigérateur durant ces journées où Dame météo prédit 40° C à l'ombre corrobore si besoin est une économie de bouts de chandelle. D'ailleurs, le cas de commerçants récalcitrants que nous avons choisis sur un échantillon de quartiers inscrits sur notre périple est authentique. De la sorte, l'attitude des gérants d'épiceries et de supérettes est d'autant inacceptable, eu égard au souci d'un cas de santé publique. Quoi qu'il en soit, les contrôleurs qualité ont du pain sur la planche, notamment aux Asphodèles (Ben Aknoun), au Mont d'Or (El-Biar), à la cité Résidence (Hussein Dey) et à haï El-Badr (ex-Appreval, Ben Omar) et dans d'autres quartiers de la capitale ! "Le contrôle doit s'effectuer d'abord à la source, soit à l'échelle du réseau de stockage, où les propriétaires de chambres froides ne maîtrisent pas le processus de fonctionnement des glacières. Pour la plupart du temps, la mise en marche de ces équipements est du ressort d'un novice au lieu de l'ingénieur dûment habilité par le constructeur. D'ailleurs, la maintenance de ces chambres froides n'obéit à aucun planning d'entretien", a déclaré Boulenouar Hadj-Tahar, porte-parole de l'UGCAA (Union générale des commerçants et artisans algériens). Alors que dire du petit détaillant de quartier qui ignore tout de la manipulation technique d'armoires frigorifiques qu'il allume à l'emporte-pièce ou sinon au petit bonheur la chance ? Autant d'à-propos qui sèment le doute autour de ce qu'il y a dans nos assiettes. "Pour le principe, l'apport de la chaîne du froid permet d'éviter le gaspillage qui est d'un taux de 50% et son contrecoup sur le prix à la consommation de l'ordre de 20% ici à la capitale. Mieux, ce processus permet également à la ménagère d'avoir dans son panier des légumes et des fruits hors saison", a tenu à préciser notre interlocuteur. Du reste, rien ne doit être laissé au hasard, particulièrement la filière des grossistes qui accuse également un déficit en matière d'utilisation d'une chaîne du froid. "Outre la déficience d'une chambre froide, les locaux de certains commerçants de gros ne se prêtent pas à l'emmagasinage d'aliments, d'où l'impact d'une détérioration qui intervient bien avant la date de péremption sur les aliments en boîtes de conserve", a conclu notre interlocuteur. Pour ce qui est des moyens de transport des aliments, la benne d'un camion se substitue trop souvent au camion frigorifique. En témoignent ces cartons de biscuits conçus d'œufs, de margarine et de lait ainsi que ces packs de sodas soumis à altération avant la date de péremption. Enfin, et d'ici à ce qu'il y ait un cycle formation didactique à la chaîne pour la manipulation des chambres froides, intéressons-nous pour l'heure aux crémiers de la cité Maya (Hussein Dey) qui exposent sous le soleil et à même le trottoir des dizaines de cageots contenant des sachets de lait, sans que cela émeuve les services compétents outre mesure. Cela donne... froid dans le dos ! L. N.