Cela sent bon l'effluve du géranium et de saboune Dzaïr au fouqanif (étage) du qas'r eriyasf, où l'artisane Kouider Zohra mêle, dans sa ghorfa, l'essence du terroir à celle de l'iode de la plage de Remila que l'on hume du s'tah (terrasse) de la salle de conférences du Centre des arts et de la culture du Bastion 23 durant cette matinée du jeudi 7 septembre ! À l'occasion, l'auditorium s'est avéré trop étroit à l'accueil des fées du logis d'ici, de l'Algérie profonde et du royaume chérifien afin de s'instruire d'un savoir-faire séculaire que la créatrice de fragrance envisage de partager avec l'auditoire. Adroite dans le geste, l'oratrice a apparemment plus d'un t'baq (panier) de pétales à son q'tar (distillateur d'arômes) : "Il s'agit de moissonner l'huile essentielle à l'aide de la vapeur d'eau. De cette façon, l'extrait de plante aromatique est recueilli pour qu'il soit utilisé en parfumerie, alors que les eaux aromatisées extraites d'autres essences sont réservées à d'autres usages", a dévoilé l'oratrice. Dieu qu'il est agréable de s'investir dans ce métier qui recueille d'emblée l'adhésion du voisinage, du fait que les effluves qui émanent de l'alambic embaument d'agréables exhalaisons l'environnement, d'habitude vicié, du quartier. Eclos tel une rose à l'aube de l'humanité à Blida, l'apprentissage du métier fut enseigné également à Koléa, Miliana et Constantine. À ce titre, la distillation traditionnelle de l'ma ouard ou l'ma z'har (eau de rose et eau de fleur d'oranger) se doit d'être sauvegardée, eu égard à l'impact économique engendré. Seulement, le métier nécessite un zeste de délicatesse et un soupçon d'élégance qu'on ne trouve que chez une femme. Outre ces qualités, le métier nécessite aussi l'apprentissage de l'horticulture et pourquoi pas le langage des fleurs ! D'où l'exigence que la cueillette de fleurs et le tri de pétales soit l'apanage unique de la gent féminine. "Et puisqu'on évoque l'environnement, il s'agit d'élaguer la fleur de façon à préserver la repousse au printemps", a recommandé l'oratrice. Au cours du débat, on se serait cru dans l'intérieur mielleux d'une ruche, où l'essentiel des artisanes de Santé Res'Art, Refam et les femmes rurales de B'gayet s'est coalisé comme les doigts d'une seule main autour de la relance de l'activité artisanale, source de richesse et de création d'emplois. Que faut-il retenir de cette rencontre si ce n'est que les femmes ont répliqué au SOS environnement lancé par l'association Chabab oua mawahib et Femmes en communication à partir de l'ancien siège de la capitainerie et pilotage de la Régence d'Alger. À noter qu'une caravane s'élancera d'ici peu vers l'oasis de Djanet afin d'initier les femmes de la capitale du Tassili n'Ajjer aux techniques de la distillation. Pour l'histoire, nos mères artisanes ont puisé de la ressource dans les objets qui meublent notre quotidien, dont l'entretien de la hidoura (toison) pour extraire de la laine et approvisionner ainsi le métier à tisser, le tapis et le haïk ainsi que l'art de tresser le doum pour la fabrication de couffins. Autant de produits du terroir que ces femmes envisagent de réinscrire dans la nomenclature des produits de l'artisanat, a-t-on su de Maya Azeggagh de Femmes en communication. Louhal Noureddine