Le porte-parole du RND a également reconnu la complicité de son parti dans l'attribution au chef de l'Etat de messages, de décisions et de mesures, dont il n'est ni l'auteur ni l'instigateur. Le porte-parole du RND, Seddik Chihab, a jeté un pavé dans la mare, mardi, lors d'un passage sur un plateau d'une chaîne de télévision privée. Même désavoué le lendemain publiquement par la direction de son parti, son intervention ne perd cependant pas pour autant de sa force d'impact sur une opinion publique, qui ne doute presque plus de l'incapacité du président Bouteflika, considérablement affaibli par ses gros problèmes de santé, à assurer ses charges au sommet de l'Etat. Seddik Chihab est connu pour être l'homme de confiance de l'ex-Premier ministre et secrétaire général du Rassemblement national démocratique, Ahmed Ouyahia. Cette proximité le hisse à une position qui lui permet d'obtenir des éléments de décryptage de la vie du sérail à défaut d'être constamment dans les secrets d'alcôve. Ses propos sont, dès lors, logiquement considérés comme des vérités confessées de l'intérieur du régime. "Il y a des forces qui sont gênées par les partis politiques. Il s'agit de forces non structurées. Des forces non constitutionnelles, non organisées... Elles sont partout, y compris dans le hirak (mouvement populaire, ndlr). L'Algérie a été dirigée par ces forces durant au moins ces cinq, six ou sept dernières années", a-t-il lâché, face aux caméras avec de la conviction dans la voix. Il n'a pas identifié clairement le groupe qui usurpe les prérogatives constitutionnelles du chef de l'Etat. Il n'a pas réussi, non plus, à dédouaner le RND de sa responsabilité dans la confiscation de la fonction présidentielle. "Tout ce qui émane de la Présidence vient, pour nous, du Président. Mais pour savoir qui décide réellement, il faut interroger quelqu'un de la Présidence qui pourrait le savoir. Le RND n'est pas édifié sur ces détails. Nous sommes un parti discipliné. Nous avons des liens et des engagements pris avec le président de la République pour le soutenir, ainsi que sa politique réformatrice car cela correspond à notre vision. À un certain moment, le train a dévié, mais encore une fois, nous ne connaissons pas ces détails." Le député a reconnu, dans ce passage, le silence complice de sa famille politique sur une promptitude à attribuer au premier magistrat des messages, des décisions et des mesures dont il n'est ni l'auteur ni l'instigateur. Il a rendu évidente aussi la participation active du RND, dans le cadre de l'Alliance présidentielle, à une mascarade, dont le dernier acte est le soutien appuyé au 5e mandat. "Nous nous sommes trompés d'appréciation de la situation. Nous avons manqué de discernement. Mais il y avait un climat, une atmosphère et un entourage qui nous poussaient dans cette direction", a-t-il souligné dans son interview à la chaîne El-Bilad. Le temps d'une soirée et d'une matinée, l'on croyait naïvement que Seddik Chihab faisait écho à une décision assumée du secrétaire général de son parti de sortir du giron du système et de débusquer les marionnettistes qui tirent les ficelles dans l'ombre du président Bouteflika. Il n'en est rien, en apparence du moins. Le communiqué, diffusé hier en début d'après-midi, replace le RND dans le camp des soutiens à la feuille de route du chef de l'Etat. Pourtant, il est difficile d'admettre que M. Chihab n'a parlé qu'en son propre nom. Souhila Hammadi